N’y allons pas par quatre chemins. A la lecture du synopsis d’un homme idéal, mon cœur n’a pas vraiment palpité. Bien au contraire. Du lu, vu et revu, réchauffé au micro-onde, maladroitement conservé au frigidaire. Une bande-annonce qui, tout en nous en disant trop, confirme mes craintes sur l’absence de singularité de ce nouveau métrage de monsieur Yann Gozlan.
"The Words" avec Bradley Cooper, "
Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu" de
Woody Allen… La liste des films similaires est encore bien longue, trop longue peut-être. Et pourtant. Si le vol et le plagiait de manuscrit n’a en soit rien d’original, le traitement, la réalisation et le jeu d’acteur du fraichement césarisé Pierre Niney font de ce film sans prétention un thriller des plus angoissant.
Pierre Niney n’est pas franchement mon homme idéal (si vous voulez tout savoir, je suis plutôt team Gaspard Ulliel, physiquement parlant j’entends bien). Il n’empêche que l’ex Yves Saint Laurent arrive encore et toujours à nous surprendre. Son jeu, ses mimiques sont d’une surprenante justesse du haut de son jeune âge. Jamais too much, l’acteur arrive tantôt, et ce à travers un simple regard, à exprimer le néant du désespoir… pour quelques minutes suivantes, apparaître plus déterminé et cruel que jamais. Une performance qui rend son personnage d’écrivain raté, bien qu’au sommet de la dangerosité, hautement sympathique. On saluera également la performance des acteurs secondaires dont la jolie Ana Girardot, mais pas forcément le traitement de leur histoire sentimental.
A travers les interviews et promotions, le réalisateur ne cesse de présenter son nouveau-né comme une belle (et tragique) histoire d’amour. Or, cette thématique est, à mon sens, quelque peu survolée au détriment de la recherche identitaire et la question du génie artistique. Mathieu est un jeune homme passionné, animé par le désir de vivre de sa plume. Hélas, le talent lui fait défaut. A travers son plagiat, c’est toute une mécanique qui se met en place : la reconstruction de soi. Mathieu enquête sur la guerre d’Algérie, imite ses écrivains préférés en interview, s’éprend de chaque miroir qui croise son chemin… pour mieux s’admirer mais aussi se confronter à ce qu’il est vraiment.
La mise en abyme avec le jeu d’acteur est alors plus qu’évidente. Mais, sans trop spoiler, la situation finale fait que sa quête d’identité prendra une toute autre tournure. Somme toutes, si Mathieu fait de tels efforts, c’est avant tout par pur hédonisme. Même si bien sûr, une de ses plus profondes craintes reste qu’Alice sa douce et tendre découvre la vérité, sa quête personnelle prime sur sa romance. Qui, au fond, n’est qu’apparence puisque basée sur des débris de « faux semblants ».
La question du génie artistique est elle aussi très bien traitée. Créer est-il, par la force des circonstances, à relier avec peine et souffrance ? En effet, Mathieu n’est capable d’écrire que lorsqu’il revient vivant de toutes ses péripéties mortelles. Mais dans ce cas me direz-vous, le génie n’est donc pas chose innée, et peut s’acquérir ? La question est délicate car c’est là l’un des petits bémols du synopsis. En effet, il nous est dit explicitement et ce tout au long du film que si Mathieu ne brille pas du côté des maisons d’éditions, c’est à cause de la pauvreté de ses histoires mais aussi et surtout de son absence totale de style ! Que l’inspiration lui vienne est une chose mais qu’il acquiert une sublime prose en est tout autre, et cela est techniquement peu probable. Mais bon, ne nous acharnons pas sur ce modeste détail.
Dans un paysage Français composé de comédies familiales drôles ou dramatique, "Un homme idéal" détonne et trouvera, on l’espère, sa place au soleil. Si, comme moi, le pitch de base ne vous émoustille pas, comptez sur son traitement et sa réalisation pour vous faire chavirer, inexorablement. Car comme le (prétendu) style de Mathieu, le film est vif, sec, tranchant.
Pour un thriller, que demander de plus ?
