HypnoFanfics

L'avenir n'est pas gravé .....

Série : Merlin (2008)
Création : 06.12.2013 à 17h43
Auteur : crystal14 
Statut : Terminée

« Suite de " La promesse" L'histoire se situe entre la fin de la 313 et et début 401.  » crystal14 

COMMENTER CETTE FANFIC

Cette fanfic compte déjà 23 paragraphes

Afficher la fanfic

           « L’avenir n’est pas gravé dans la pierre. »

 

                                        CHAPITRE 1 :

 

Au loin, la forêt immense encadrait le château de Camelot où émergeaient des tours. A leur sommet, les drapeaux flottaient à l’effigie de la famille royale : un dragon. En contrebas, en direction du sud, des scintillements attirèrent son attention. La rivière serpentait à travers la forêt, dense par endroit et verdoyante, pour rejoindre le lac d’Avalon. Dans un coin de cette vaste forêt, vers le nord, une silhouette évalua le chemin parcouru pour revenir à Camelot. Sur ce promontoire, il dominait le panorama.

A la lueur de l’aube, quelques oiseaux voletaient dans le ciel naissant. La beauté du paysage laissa insensible la silhouette qui ne prêtait aucune attention au lever du soleil qui se préparait derrière les montagnes. L’aube conviait le jour à s’installer sur le royaume. L’étranger amorça sa descente, une lueur malveillante traversa ses iris. Dans sa main, il contempla le morceau du tissu provenant de la veste du cueilleur. S’il avait tenu qu’à lui, ce traitre serait mort mais le plan qu’il avait élaboré avec son allié avait empêché de concrétiser son geste.

Plus tard, au nord de Camelot, le jeune homme au teint aussi pale que la lune se dirigea, d’un pas assuré, dans la direction opposée, sur un sentier rocailleux et ombrageux. De ce côté de la forêt, la végétation était dense, permettant à peine aux rayons du soleil de filtrer à travers les feuillages des arbres.

Deux heures avaient suffi à la silhouette pour atteindre sa destination. Elle s’arrêta à quelques mètres de la grotte. Après tant de mois de recherche, il contempla le site, savourant enfin sa première victoire. Selon le peuple des Druides, la légende racontait que ce lieu mythique avait disparu sans laisser de trace après la Grande Purge. Grace à sa persévérance et aux informations récoltées auprès des Druides, le jeune homme se tenait devant son destin. C’était les Druides qui l’avaient conduit jusqu’ici sans se douter un seul instant qu’il allait être le précurseur d’un nouveau futur. D’un mouvement circulaire, ses yeux bleus translucides scrutèrent les lieux. Il était seul.

Un silence sinistre régnait autour de lui. Seules les feuilles frémissaient sous l’effet du vent, semblant traduire leur désapprobation aux agissements malveillants que s’apprêtait à entreprendre l’étranger. Les nuages gris annonçaient une météo peu clémente. Mais ces signes annonciateurs d’une catastrophe ne trouvèrent aucune oreille attentive.

Comme une bouche béante, l’entrée de la caverne semblait attendre patiemment sa proie pour la happer dans son antre. D’une légère inspiration, le jeune homme décida de pénétrer dans ce lieu peu avenant et inquiétant. De cette entrevue dépendait le retour de la magie. Sourire au coin et vêtue de noir, la silhouette s’engouffra à l’intérieur de la grotte, se fondant dans les ténèbres.

Au seuil de la grotte, il fut surpris de trouver une torche insérée dans une petite cavité naturelle, semblant lui indiquer le passage à suivre. Dans la pénombre, il distingua plusieurs galeries qui se présentaient à son regard. Puis il saisit le bâton résineux et d’une seule pensée, le jeune homme enflamma l’extrémité de la torche. L’intrus promena son regard sombre autour de lui, sa torche éclaira la façade suintante. Il devina sans peine que les autres galeries dont le plafond s’affaissait àquelques mètres, se terminaient en cul-de-sac. Suivant son instinct, il s’achemina donc vers cette unique galerie qui s’élargissait au fur et à mesure qu’il avançait.

Comme une bête affamée, l’obscurité enveloppa le jeune homme. A chacun de ses pas, elle s’écartait à la lueur de la torche enflammée. Il continua de s’enfoncer dans ce tunnel sinueux et inégal mais un sentiment de doute s’insinua en lui. Avait-il bien trouvé la grotte en question? En guise de réponse, un bruit lointain résonna, l’encourageant à poursuivre sa progression. Il fronça les sourcils. Il enfouit sa main libre dans sa poche de son manteau et serra le bout de tissu. Ce simple contact raviva sa détermination. Après quelques minutes, le jeune homme déboucha sur une grande caverne ensablée et éclairée. Il ne fut pas long à trouver ce qu’il cherchait.

Sur un feu, un chaudron était apposé sur un grand foyer. A chaque recoin et renfoncements de cette caverne étrange se trouvaient des chandelles à moitié consumées, éclairant suffisamment l’endroit isolé. Une grande et longue cuillère à la main, une vieille femme poursuivait de touiller sa potion en ébullition sans se préoccuper de l’apparition de son jeune visiteur.

Derrière elle, des pots d’herbes séchées étaient impeccablement rangés. Le dos vouté par le poids des années, la vieillefemme se tourna et saisit un pot et elle enfouit ses doigts presque squelettiques à l’intérieur, ajoutant une petite quantité d’une matière poudreuse dans cette mystérieuse mixture.

Selon la légende, il était d’usage lorsqu’on s’adressait à Iziaslava, de poser les deux mains sur sa poitrine, la main droite sous la gauche puis les incliner en les gardant l’une au-dessus de l’autre, paumes vers le ciel pour offrir à Iziaslava la lecture de son cœur.

Cette sorcière était celle qu’il avait tant cherchéecar nul ne connaissait sa véritable apparence.

Intimidé malgré lui, le jeune homme exécuta les gestes rituels puis l’observa et patienta un moment avant que cette vieille femme, au visage émacié, lui adresse la parole.

-                     Te voilà enfin, jeune Mordred.

Mordred ne montra aucun étonnement apparaitre sur son visage d’une blancheur extrême quand elle prononça son nom. Grace au geste rituel, cette vieille sorcière avait lu dans son cœur. Comment avait-elle fait sans l’avoir regardé ? Lisait-elle dans les pensées ? C’était bien Iziaslava, la sorcière la plus puissante de l’Ancienne Religion.

Mordred se crispa légèrement en entendant sa voix de crécelle. C’était le son plus désagréable qu’il n’avait jamais entendu. La caverne semblait être sonorisée car aucun écho ne venait percuter à ses oreilles. Etrange, pensa le jeune druide, étonné.

-                     Etes-vous Iziaslava ?, s’assura-t-il malgré lui.

Pour la première fois, la nommée Iziaslava montra son visage raviné. Un sourire édenté illumina ses yeux gris sombre qui s’harmonisaient avec les haillons qu’elle portait sur ses frêles épaules décharnées.

-                     Perds-tu toujours ton temps à poser des questions dont tu connais déjà la réponse, jeune Mordred?, demanda-t-elle d’une voix de crécelle.

Le jeune homme haussa les sourcils, partagé entre l’étonnement et l’irritation. Iziaslava semblait s’amuser de le voir ainsi. Perplexe et agacé, le jeune druide attendit, résigné. Pour se donner du courage, il pensa à son père, aux peuples des Druides massacrés par les soldats d’Arthur Pendragon. Curieusement, il n’avait aucune rancune contre l’héritier qui exécutait simplement les ordres donnés par son père, le roi Uther Pendragon. Il nourrissait sa rancœur et sa haine vers ce traitre de …..

-                     Au lieu de rester comme une stalagmite au milieu de cette grotte, avance donc, mon petit ! Mon acuité visuelle n’est plus aussi bonne que dans ma jeunesse.

Mordred sursauta à la voix aigüe de son interlocutrice puis il s’exécuta avec une légère appréhension. Sous cette apparence indécise, le jeune homme se redressa en se rassurant que tout allait se passer pour le mieux.

D’où il était, le jeune druide percevait le clapotis du liquide qui bouillonnait à l’intérieur du chaudron. Une odeur nauséabonde s’en échappait et lui chatouillait ses narines délicates. Mordred en eut le haut-le-cœur.

-                     Me donneras-tu cette chose que tu caches dans ta poche ? Pour achever ma potion, il me faut ce dernier ingrédient.

Avec lenteur et sans la quitter des yeux, Mordred retira un bout de tissu chiffonné, le caressant du pouce puis le tendit vers la vielle femme en formulant silencieusement : Que Merlin connaisse les affres de la souffrance et soit ainsi dans l’incapacité de contrecarrer les futurs plans de Morgane.


crystal14  (06.12.2013 à 17:45)

A son contact, un léger frisson se propagea tout le long de la colonne vertébrale de la vieille sorcière. Iziaslava contempla le tissu déchiré et une lueur inquiétante traversa son regard devenu terne. Pensive, elle le plongea dans le liquide bouillant et touilla de nouveau. Les mains flétries par le temps, la vieille femme tint fermement la longue cuillère lorsque le tissu remonta à la surface de sa préparation. Elle fronça les sourcils grisonnants, baissa ses paupières ridées et cessa de touiller sa précieuse potion tandis que Mordred l’observait, fasciné malgré lui.

  • Ce que tu complotes entrainera des bouleversements qui engloutiront tout espoir pour Camelot, annonça –t-elle sans relever les yeux d’un gris terne.

Mordred se figea et un tressaillement imperceptible parcourut jusqu’au tréfonds de son être car les derniers mots lui prodiguèrent une profonde satisfaction.

  • Toutefois, chaque homme est destiné à jouer un rôle pour améliorer l’avenir. Quel que soit son rang. Qu’il soit un serviteur ou pas, continua la vieille femme.

Le jeune homme pressentit qu’elle lui parlait de … Merlin. Décidément, la légende ne mentait pas sur l’étendue du pouvoir de cette sorcière.

  • Dans ce cas, son rôle dans l’histoire s’achèvera bientôt, dit-il, d’une voix troublée.

  • Pourquoi t’es-tu allié avec la jeune sorcière Morgane ?

  • Perdez-vous toujours votre temps à poser des questions dont vous connaissez déjà la réponse ? , répliqua ironiquement le jeune druide, répétant la même question qu’elle lui avait posée un moment plutôt.

Iziaslava étudia son interlocuteur avec un léger sourire. Ce jeune homme ne manquait pas d’aplomb.Bien entendu, elle connaissait son objectif premier. Maitriser Merlin et consacrer Morgane, reine de Camelot.

  • Je veux être certaine d’avoir bien interpréter ta demande, jeune druide.

  • Morgane et moi, nous sommes pareils. Nous possédons la magie. Elle m’a sauvé la vie. Sans Merlin, Arthur sera sans défense, lui laissant l’opportunité d’accéder au trône. Ensemble, nous pouvons rétablir la magie dans ce royaume. Plus de persécution, plus de massacre, plus de condamnation. Nous offrirons à tous ceux ou toutes celles qui possèdent la magie de vivre enfin sans la peur d’être arrêté et exécuté. Et surtout, je me vengerai de celui qui m’a trahi.

  • Hmm, la vengeance, susurra-t-elle, d’une voix inaudible. Réfléchis bien, jeune druide. Le passé est le passé. C’est déjà écrit. C’est immuable, souligna-t-elle en se grattant le menton.

  • Comme ma vengeance. Sans Merlin, elle serait déjà Reine de Camelot, persista Mordred.

  • Il me semble que c’est grâce à l’intervention de Merlin que tu es aujourd’hui devant moi afin de lui porter un coup fatal. La vie est éphémère, jeune Mordred. On nait pour accomplir ce pourquoi on est destiné depuis la nuit des temps. Nos décisions, nos actes, nos attitudes influent sur le futur, souligna-t-elle en fixant le bout du tissu flottait dans la potion.

  • Le peuple druide s’accroche à cette prophétie où il est écrit qu’Emrys doit ramener la magie sur le royaume et au lieu d’accomplir son destin comme vous aimez le nommer, il trahit les siens ! La première fois, j’ai dû le supplier pour qu’il vienne à mon secours. Finalement, s’il est venu, c’était pour Arthur, pas pour moi. Et la deuxième fois, aux côtés d’Arthur, il a contribué au massacre de mon peuple. Emrys est resté sans bouger à regarder ma famille se faire tuer les uns après les autres. Il a utilisé sa magie contre moi afin que je subisse le même sort que mes proches mais j’ai réussi à me débarrasser des soldats. A cause de lui, je suis devenu à nouveau orphelin. Durant ces années, je n’avais de cesse à vouloir me venger pour toute la souffrance qu’il m’avait causée. Et, aujourd’hui avec Morgane, ma patience va enfin porter ses fruits. Maintenant, j’entrevois l’avenir sous un meilleur jour. Le futur, c’est Morgane pas Emrys !

La véhémence de ses paroles n’impressionna, nullement, Iziaslava qui avait écouté, sans interrompre, le jeune druide. Elle plongea son regard perçant sur Mordred, déchiffrant sans difficulté la haine qui flamboyait dansle sien, d’un bleu translucide.

Dissimulant un sourire narquois, Iziaslava capta cette hostilité palpable envahir le cœur du jeune druide qui n’aurait de cesse de poursuivre sa quête de vengeance. Néanmoins, elle y lut quelque chose d’autre qui l’incita à continuer le dialogue.

  • Peut-être que Morgane n’est pas destinée à être reine de Camelot ?

D’un pas, il s’approcha de la vieille femme en plongeant sans crainte son regard d’un bleu glacial dans les yeux gris de son interlocutrice.

  • Quoi qui m’en coute, je ne laisserai quiconque me détourner d’accomplir le destin de Morgane. Lorsqu’elle sera enfin reine de Camelot, la magie renaitra de ses cendres. Dans le cas contraire, je lutterai à rétablir la vérité sur Emrys. On verra bien s’il est aussi puissant que dit la légende, articula-t-il d’une voix implacable.

  • Es-tu prêt à assumer les conséquences qui vont en découler ?

Aveuglé par de sombres ressentiments, le regard du jeune druide se durcit et soutint admirablement celui d’Iziaslava.

  • Comme je t’ai dit un peu plutôt, le passé est une chose immuable. Si le destin de ce jeune prince est de devenir roi de Camelot. Rien et ni personne ne pourra pas l’en empêcher.

Mordred entrouvrit ses lèvres pour protester mais Iziaslava continua en levant son doigt tordu vers le ciel en poursuivant :

  • Le futur, dans son infini bonté, propose des possibilités aux hommes de faire un choix pour emprunter un seul chemin qui le conduira à sa destination finale.

Iziaslava saisit une fiole vide et sous le regard perplexe de Mordred, elle la remplit de sa potion, la bouchonna et la lui tendit. Le jeune homme contempla le liquide de couleur ambre contenu dans la petite bouteille. Ce simple liquide lui permettrait de se débarrasser enfin de Merlin, accélérant l’ascension au trône de Morgane Pendragon.

Maintenant que la magie coulait en lui sans retenue, sa soif de vengeance ne pourrait jamais être étanchée tant que la jeune sorcière ne serait pas installée sur le trône de Camelot et qu'il n'aurait pasvuses ennemis agenouillés devant elle.

  • La magie est un pouvoir si puissant qu’on peut réaliser pratiquement tout ce que l’on désire. Il nous appartient de l’utiliser à bon escient. En attaquant Emrys, tu éteindras l’étincelle d’espoir qui anime toutes ces personnes qui dépendent de son succès. Tu le blâmes sans connaitre les circonstances qui l’ont emmené à réagir à commettre cette ….trahison.

Atteint par cette critique, ce dernier blêmit de rage. Un éclair de colère traversa ses yeux bleus assombris par la haine. S’il n'avait tenu qu’à lui, cette vieille folle, si puissante soit-elle, aurait gouté à sa magie, néanmoins, Mordred se contint au prix d’un grand effort.

  • Si vous possédez la réponse, éclairez-moi !, lança –t-il, d’un ton sarcastique.

Ignorant la provocation, la vieille femme éluda la question volontairement et d’un ton ferme intimida àMordred de prendre la fiole qu'il serrait maintenant dans ses mains. Il s’accrocha à ce petit objet comme si son destin en dépendait. D’ailleurs, c’était le cas. Ne serait-ce la tenir qu'au creux de sa main avait déclenché, sans aucun doute, la marche vers le destin de Morgane.

La voix de crécelle de la vieille sorcière brisa ses pensées.

  • Prend garde, une magie sommeille à Camelot qu'il n’est pas prudent de réveiller. Les conséquences seront l’anéantissement de ton projet, avertit-elle en rangeant ses fioles sur les étagères.

Qui possédait une magie aussi puissante que celle d’Iziaslava dans ce royaume ? Personne à sa connaissance ! pensa-t-il, intrigué. Rien ni personne ne pourrait sauver Merlin de son funeste destin.

  • De quelle magie parlez-vous ?, voulut savoir le jeune druide.

Une nouvelle fois, Iziaslava esquiva la question.

  • Un choix s’offrira à toi, jeune Mordred. J’espère sincèrement que ce libre arbitre te conduira vers le droit chemin, souhaita- t-elle en saisissant un long bâton tordu.

Insensible aux avertissements de la vieille sorcière, le jeune homme se saisit de la torche et se retourna pour emprunter de nouveau les tunnels lorsqu’il tourna la tête en entendant une légère implosion.

Iziaslava et tout son matériel avaient disparu de la caverne où l’unique issue était là où se tenait le jeune druide. Impassible, ce dernier s’engouffra dans le tunnel.

La lueur de la torche s’estompait derrière le jeune Mordred, engloutissant la caverne dans l’obscurité la plus totale. Soudain, une voix, surgie de nulle part, s’éleva, perçant le silence pesant.

  • Merlin est Emrys, rappela une voix caverneuse.

  • Tu as modifié le futur du prince Arthur, intervint une autre.

  • Merlin a besoin d’Arthur…. Commença une voix plus douce.

  • Tout comme Arthur a besoin de Merlin…. Renchérit une voix fluette.

  • Afin d’accomplir leur destinée. Réunir les Terres d’Albion, poursuivit une voix grave.

  • Il causera leur perte, acheva une voix ferme.

  • Il mérite une chance de choisir, déclara Iziaslava, d’une voix ferme. J’ai lu dans son cœur, une lueur d’espoir qu’il a tenté d’étouffer en me faisant croire à sa noirceur. De plus, Emrys est protégé et lié par une magie indéfectible. Cette magie sera son salut dans l’épreuve qui l’attend si ce jeune druide devait appliquer sa vengeance, conclut-elle en mettant un terme à leur protestation.

  • Espérons-le pour l’avenir de Camelot, s’exprimèrent à l’unisson les voix.

     

 


crystal14  (13.12.2013 à 08:26)

                                                                    CHAPITRE 2

 

Aux premières lueurs de l’aube, Merlin ne s’était pas octroyé une seule minute de repos, s’attelant à ses tâches quotidiennes : nettoyer l’écurie, polir l’armure, laver les chemises du prince …. Il aurait bien aimé profiter de cette accalmie pour rendre visite à sa mère dans leur village à Ealdor. Depuis l’histoire avec Nimueh, il ne l’avait plus revue. Elle lui manquait. Il frissonna à la pensée qu’elle avait failli mourir à cause de cette sorcière de l’Ancienne Religion.

L’année dernière, Merlin s’était jeté à corps perdu dans son travail afin de satisfaire du mieux qu’il pouvait les corvées pour Gaius et Arthur; comme si cela ne lui suffisait pas, les attaques continuelles des ennemis du prince de Camelot se greffaient à son emploi du temps déjà surchargé, ne lui accordant aucun répit.

Parallèlement, il avait occulté la peine que lui avait causé la perte de son père ainsi que de sa bien-aimée, Freya. Son cœur lui avait hurlé sa douleur que sa raison avait enterrée au fond de son cœur meurtri. Il avait dû se montrer courageux et ferme pour guider et soutenir son ami Arthur quand il avait appris que la jeune femme assis sur le trône face au roi Uther, agenouillé et meurtri dans sa chair, n’était d’autre que sa propre sœur. La vérité cruelle s'était abattue sans pitié sur le jeune prince.

Les précédentes épreuves de ces derniers mois l’avaient totalement éprouvé. L’attaque envers Camelot par Morgane, Morgause et leur allié, Cenred, aurait failli remporter un franc succès si Merlin n’avait pas été retrouvé Freya au lac d’Avalon où cette dernière lui avait rendu l’épée Excalibur, permettant ainsi à Arthur, prince de Camelot, de reconquérir son palais et libérer son peuple de l’oppression de Morgane.

Aujourd’hui, la précarité de cette paix fragile illusionnait tous ses habitants, soulagés de retrouver une certaine stabilité au royaume. Merlin pressentait que Morgane tramait sa vengeance. Il la connaissait mieux que quiconque.

Grâce aux bons soinsde chaque homme et femmes de Camelot qui avaient contribué aux travaux de restauration, le château cicatrisa du ravage, qu’avait occasionné le passage de Morgane et de ses chevaliers noirs. Aucun citoyen n’avait rechigné à la tache considérable qui les attendait. Tous avaient répondu à l’appel du prince Arthur.

Cependant, l’héritier de Camelotn’en avait pas moins oubliéson peuple dont la plupart avait perdu leur bien : leur maison brulée par ses ennemis. Il n’avait pas hésité une seule seconde et avait ordonné aux charpentiers d’intervenir sur le champ. Les bucherons s’étaient occupés de découper les troncs d’arbres afin que le charpentier puisse entreprendre les travaux de reconstruction avec l’aide inestimable des habitants. Il devait ajuster les poutres, creusait des trous, façonnait puis une fois le bois posé, il devait installait la chaume qui constituerait le toit. Durant des semaines, il n’avait pas ménagé sa peine. Pour ses outils, le charpentier avait fait appel au forgeron, soit pour lui fabriquer de nouveaux outils soit pour les réparer. Même les apprentis du forgeron avaient été sollicités à entretenir le feu des journées durant.

Les plus gros œuvres venaient d’être achevés et pour récompenser son peuple de son dévouement, Arthur avait organisé une grande fête marquant ainsi que la paix était revenue à Camelot.

Le peuple en liesse avait profité de ces moments festifs avant d’être occupé par les travaux des champs ou l’entrainement militaire pour les chevaliers. Les musiciens du village avaient joué de tout leur cœur. Certains avaient récité la bravoure des chevaliers de Camelot face aux chevaliers noirs. Il y avait eu des chants, des danses, des profusions de rires.

C’était merveilleux de voir ces habitants se divertir après de tels événements, avait pensé Merlin, ce soir-là.

À l’aide de son marteau, le forgeron martela le métal chaud qu'il tenait avec la pince. En passant devant, les martèlements qui en échappaient firent grimacer le jeune homme dont la clameur des marchands d’étoffes, des fruits et légumes, de vanneries, et d’autres marchands ambulants venus exprès vendre leur produits ne suffisait pas à dominer les bruits sonores provenant de l’atelier; néanmoins ce bain de foule et ces nuisances firent sortir Merlin de la torpeur.

Chargé d’un panier rempli de brindilles, Merlin accéléra le pas et remonta la ruelle bondée de monde. Il lui restait tant de choses à faire !

Le jeune sorcier se fraya un chemin parmi les gens de la cité en écartant gentiment avec ses coudes, en lâchant des « pardon » et « excusez-moi » au passage. Parvenir à l’entrée du château se montrait aujourd’hui, très laborieux !

Merlin déposa le panier dans un coin de la cuisine qui fourmillait de domestiques vaquant chacun à leur besognes. La chaleur qui y régnait était encore pire qu’un jour d’été. Il n’allait pas trainer dans cet enfer ! jugea-t-il avant de se munir d’un plateau repas pour s’empresser de prendre les ingrédients manquants qui composeraient le petit-déjeuner de son altesse.

Dans le corridor partiellement ombragé, le jeune homme se dirigea tout guilleret vers les appartements d’Arthur. Les autres domestiques se retournèrent à son passage, surpris de l’entendre chantonner.

Merlin toqua légèrement à la porte de la chambre du prince mais ne reçut aucune réponse. Depuis quand annonçait-il son arrivée ?, pouffa-t-il en réalisant son geste. Il poussa doucement la porte et pénétra dans la pièce plongée encore dans la pénombre. Le serviteur de Camelot posa le plateau rempli de victuailles sur la table et tira les rideaux. La lumière du jour inonda agressivement la pièce.

Un spectacle déplaisant l’attendait. Franchement, Arthur pourrait au moins faire un effort pour garder, ne serait-ce un jour, une heure même, sa chambre rangée. C’était un miracle qu’il n’ait pas trébuché dans ses affaires ! pensa-t-il en soufflant profondément, découragé par ce capharnaüm.

Merlin se tourna vers Arthur encore endormi, avachi à travers son lit. Prenant le pied de la coupe d’une main et une cuillère de l’autre, il s’approcha du lit, et se pinça les lèvres pour étouffer un éclat de rire. Merlin tapa la cuillère sur la coupe, produisant un son aigu qui résonna aux oreilles du dormeur.

Arthur marmonna et enfouit sa tête blonde sous l’oreiller. C’était le plus désagréable son qu’il avait entendu de toute sa vie. Il préférait encore le tocsin ou les cloches, enfin n’importe quoi plutôt que cette voix enflammée qui lui ordonnait de se lever. Arthur remercia silencieusement le ciel de l’avoir épargné d’entendre le tonitruant « Allez debout, les morts ! » de son valet.

En reculant, Merlin se buta sur la table qui bougea et la coupe vide tomba sur le sol, faisant un bruit sonore. Il la ramassa et se cogna l’épaule sur le recoin du meuble.

  • Ouille ! étouffa-t-il en se massant son épaule endolorie.

  • Merlin !? , dit Arthur, d’une voix ensommeillée tout en plaquant son oreiller sur sa tête.

  • Bravo, Sire. C’est bien moi ! , claironna son serviteur.

Relevant à peine l’oreiller, Arthur ouvrit un œil sur un visage rayonnant de son ami. Déjà exaspéré par le son de sa voix, le prince s’assit à contrecœur au bord du lit et s’étira mollement.

  •                Le tocsin serait une musique bien plus agréable que le son de ta voix !, le jeune prince en feignant de bailler de tout son soul.

  • J’adore votre sens de l’humour ! Si cet instrument de torture peut vous aider à vous réveiller plus vite, répondit-il d’un ton enjoué, lui jetant sa chemise sur la tête blonde ébouriffée. Heureusement que le soleil n’est pas aussi paresseux que vous sinon on n’était pas prêt de voir la lumière du jour ! ajouta-t-il d’un ton moqueur.

Le jeune prince ôta d’un geste lent le vêtement fraichement repassé. Il pouvait encore sentir l’odeur de la plaque de métal chauffante sur le tissu rugueux de sa chemise.

  • Qu’est-ce que tout cela ?, dit-il en lui montrant la table pleine de victuailles, complétement réveillé.

    Merlin haussa les sourcils et lui répondit négligemment.

  •  Votre petit-déjeuner, sire !, s’exclama le valet en versant l’eau dans la coupe qu'il tendit à son prince.

Jetant un regard oblique sur un Merlin survolté, Arthur s’en saisit puis la déposa sur la table. Le prince dut se frotter les yeux pour être sûr de ne pas souffrir d’hallucinations.

Arthur se leva, détaillant d’un regard indéterminé tous ces aliments succulents et observa son serviteur d’un air suspect puis il contourna le lit où il aperçut le reste de ses vêtements pliés soigneusement sur la chaise. Il passa sa main dessus le tissu extrêmement lisse, d’un air pensif.

  • Ai-je oublié quelque chose, Arthur ?, demanda le jeune sorcier, d’un sourire espiègle.

    Peu habitué à ce genre de choses, de la part de son serviteur, le prince chassa son trouble.

  • Apparemment, non, murmura-t-il pour lui-même.

Merlin afficha un sourire si radieux que le prince ne put s’empêcher de lui rétorquer, légèrement irrité malgré lui :

  • Parfait, il y a mon armure à nettoyer et.....

  • C’est fait ! coupa-t-il, d’un ton fier. J’ai aiguisé votre épée. J’ai également sorti vos chiens tôt ce matin. Ils ont pu profiter ainsi de la fraîcheur matinale et...

  • Assez, Merlin ! Il pointa le doigt vers son serviteur. Et cesse d’afficher ce sourire imbécile! lui ordonna-t-il en enfilant rageusement sa chemise.

Merlin feignit d’être abasourdi par la critique d’Arthur.

  •  La paix est revenue sur Camelot alors j’ai pensé que m’avancer dans mon travail serait une excellente idée, se justifia- t-il en le dévisageant, d’un air faussement offusqué. De toute façon, vous êtes un éternel insatisfait ! Toujours à grogner sur votre pauvre serviteur ! 

  • Je te demande pardon ? , s’étonna Arthur, n'en croyant pas ses oreilles.

  • Je vous l’accorde, Arthur. Je vous rejoindrai à l’entrainement mais pour l’heure, je dois faire des corvées pour Gaius, s’empressa-t-il de direen contractant sa mâchoire mais le regard pétillant trahissait sa pensée.

Merlin ne concéda pas le temps à Arthur de répliquer, qui le suivit, d’un regard ahuri, quitter ses appartements d’un pas rapide.

  • C’était une question, et non pas une excuse! , réagit–il soudain à la méprise de son valet.

Aussitôt, la tête brune de Merlin apparut derrière le chambranle de la porte.

  • L’idiot que je suis n’a pas saisi toute la subtilité de vos paroles ! dit-il malicieusement avant de disparaître de nouveau.

  • Tu ne perds rien pour attendre, Merlin !  s’écria Arthur en secouant la tête.

Sacré Merlin, un vague sourire flotta sur le visage du prince.

Par la fenêtre ouverte dont la clarté du jour annonçait que la matinée était bien entamée, il percevait le tumulte des habitants dans la cité basse. L’été approchait à grand pas à Camelot. Le regard dans le vague, le jeune prince capta un mouvement rapide parmi la foule qui attira son attention. C’était Merlin qui courait, un seau à la main vers la fontaine.

Les bienfaits de cette fontaine étaient appréciés par tous les habitants de la citadelle. Plus besoin de faire de longs trajets jusqu’à la rivière et transporter, au retour, les seaux devenus lourds remplis de ce liquide précieux. La fontaine se trouvait près de l’entrée de la cour d’honneur afin que les domestiques et les villageois puissent à loisir et en toute sécurité puiser l’eau que leur offrait cette généreuse fontaine.

De nouveau, Arthur aperçut son serviteur porter un seau rempli d’eau puis disparaitre dans le corridor du palais. Ildétourna son regard sombre de la cour d’honneur puis contempla sans aucun plaisir la table dressée pour son copieux petit-déjeuner. Inexplicablement, il éprouva un dégout pour ces aliments. La culpabilité lui avait coupé l’appétit.

Soupirant, Arthur plongea ses mains dans la cuve d’eau en s’aspergeant plusieurs fois sa figure. Il passa ses mains sur le visage pour éliminer l’excédent d’eau qui tomba sur sa chemise propre. Les mains appuyées sur le rebord de la cuve, l’héritier du trône souhaitait étouffer ses pensées sombres qui torturaient son esprit mais elles s’obstinaient à revenir inlassablement dans sa tête. Il en avait honte mais il ne pouvait s’empêcher d’y penser.

Son regard s’attarda sur la table. Pour une fois que j’ai un petit-déjeuner digne d’un roi, me voilà frappé par l’inappétence !, songea-t-il, en se laissant tomber lourdement sur son oreiller, les yeux rivés sur le plafond, envahi par des pensées infâmes. Brusquement, Arthur bondit sur ses pieds et sortit de sa chambre.

                                                                  *******


crystal14  (20.12.2013 à 08:55)

                                                            ********

 

Fourbu et courbaturé par ses taches journalières, Merlin entra dans le laboratoire de Gaius qui s’affairait à trier les quelques fioles sur la grande table. Le vieux médecin releva sa tête aux cheveux blanchis par les années et dirigea son attention sur son assistant qui déposait le seau d’eau sur la table. Merlin grimaça lorsqu’il voulut s’étirer. Gaius eut un large sourire puis il fronça les sourcils.

  • Allez viens par ici. Je vais t’enduire d'onguent. Cela apaisera tes courbatures.

Le jeune homme se mit en califourchon sur la chaise, enleva sa chemise et posa ses bras sur le dossier de la chaise tandis que Gaius cherchait l’onguent analgésique sur l’étagère. Il ôta le couvercle du pot puis il jeta un coup d’œil sur son jeune assistant, pensif.

  • A quoi songes-tu, Merlin ? questionna Gaius en appliquant sa pommade anesthésiante sur les omoplates de son assistant.

Le jeune sorcier contracta ses muscles au contact de la pâte froide. Le vieux médecin fronça les sourcils. Merlin soupira silencieusement.

  • Je ne cesse de penser à Morgane si désespérée et hurlant de douleur en voyant sa sœur étendue sur le sol, inconsciente. Son cri strident résonne encore dans ma tête. (Il se retourna vers Gaius) Je dois protéger Arthur contre ses ennemis jurés et contre la mauvaise magie. Et sans me dévoiler ? Je suis constamment sur mes gardes. Si par malheur, Morgane découvrait ma véritable nature...

     

  • Fais en sorte que cela n’arrive jamais, Merlin. Tu es un jeune homme plein de ressources. J’ai pleine confiance en toi.

Merlin grimaça de douleur en sentant glisser la main du vieux médecin sur son épaule endolorie. En guise d’excuse, ce dernier se mordit les lèvres en compatissant à la douleur de son assistant.

  • Et dire que je suis sensé le guider sur le chemin de la magie. Parfois, j’ai l’impression que je suis à deux doigt de réussir et puis au dernier moment, un événement imprévu surgit et vlan, me revoilà au point de départ. On change les règles du jeu pour ce pauvre Merlin. Alors renforçons-lui la difficulté, c’était si simple avant ! , poursuivit le jeune sorcier en maugréant.

  • Tu sauras faire front à ce genre difficulté! J’en suis certain !, affirma-t-il en lui massant ses épaules. Et puis, je n’ai jamais prétendu que devenir un grand sorcier serait facile.

Esquissant à peine un sourire, Merlin eut l’impression qu’un poids supplémentaire venait de se rajouter sur ses épaules déjà chargées de responsabilités. Où puiserait-t-il la force de continuer à jouer le rôle d’idiot, de protecteur, réconcilier Arthur avec la magie, réunir les terres d’Albion et quoi d’autre encore ?

Le jeune homme était ravi qu’Arthur ait trouvé un soutien moral en la présence de son oncle, Agravain. Heureusement, ce dernier se montrait bienveillant et complaisant envers l’héritier. Contrairement à Morgane qui avait trahi sa patrie, trompé sa famille et utilisé la magie pour servir le mal. Comment amener Arthur sur le chemin de la magie après ce qu’il avait vécu durant ces mois ? Et comme si le médecin de la cour lisait dans ses pensées, il ajouta :

  • Morgane a révélé son vrai visage à tout Camelot. Ses actes étaient significatifs, tu ne crois pas ?, lui rappela-t-il en remettant le couvercle du pot. Morgane a su endormir la méfiance d’Uther et d’Arthur sous l’apparence d’une fille et d’une sœur aimante. Pour le moment, la seule chose que nous pouvons faire est d’être attentifs et surtout veiller sur la famille royale.

D’un air grave, Merlin hocha la tête, se leva, souleva la chaise et s’approcha de la table.

  • Merci, Gaius. Toute cette conversation m’a ouvert l’appétit, conclut-il sur une note d’ironie puis il enfila sa chemise.

Gaius lui adressa un sourire tandis que Merlin s’attablait en face de lui.

  • L’état de ta chambre est un champ de bataille, dit le médecin de la cour en prenant le plat que lui tendait son assistant. Il faudra trouver du temps pour la ranger, ajouta-t-il.

  • Si j’utilisais la magie, cela sera fait en un clin d’œil, proposa le jeune sorcier, d’un air taquin.

  • Ne t’avises surtout pas à….. commença à dire le médecin sur un ton sévère.

  • D’accord, je note cela dans ma longue et interminable liste de mes corvées ! se défendit-il en lui adressant un sourire malicieux.

Gaius maugréa quelque chose tandis que le jeune sorcier se servait de l’eau fraiche. Pendant un long moment, le silence de la pièce ne fut troublé que par les clameurs des habitants qui provenaient de la fenêtre entrebâillée.

  • A propos, vos recherches sur l’origine du don de Claire ont abouti à quelque chose? questionna Gaius en coupant le pain.

     

  • Si cela avait été le cas, je vous aurai prévenu, répondit le jeune sorcier en haussant les épaules. Claire ne ménage pas son temps, croyez-moi ! En l’aidant, on finira bien par trouver ! ajouta-t-il en haussant les sourcils. Et vous, de votre côté ?

Le médecin de la Cour secoua la tête, posant son regard inquisiteur sur son assistant dont les joues s’étaient légèrement colorées. L’air de rien, Merlin but une gorgée d’eau, fuyant le regard de son mentor.

  • Autre chose, Gaius ? , questionna-t-il innocemment en un sourire gêné.

     

  • Elle ne t’est pas indifférente, n’est-ce pas ?, devina le vieux médecin.

     

  • Vous me connaissez ? Je ne peux pas m’empêcher d’aider une personne qui en a besoin, se justifia le jeune sorcier en haussant ses épaules.

Dès que Gaius abordait le sujet, il remarquait que son assistant rougissait. Ce qu’il lui avait mis la puce à l’oreille, c’était quand il l'avait entendu chantonner dans sa chambre. Pour le médecin c’était révélateur. Merlin était amoureux. Il ne pouvait pas se tromper car Merlin avait eu le même comportement que lorsqu’il avait été amoureux de la jeune druidesse. Une fin tragique avait écourté leur romance.

  • Nous vivons dans une époque où les gens sont effrayés par la magie telle qu’elle soit ! Et quand il est donné à l’un des sorciers la chance de rencontrer l’âme sœur, il se doit de la saisir. Trouver une partenaire qui partage son secret est une chose qui se produit rarement une deuxième fois.

Saisissant l’allusion, Merlin baissa les yeux sur son assiette.

  • Je peux penser à Freya sans que mon cœur saigne mais dois-je pour autant l’oublier, Gaius ? suggéra-t-il en relevant les yeux sur son mentor.

     

  • En aucun cas, Merlin mais il parfois plus facile de faire le deuil d’un être aimé que de la savoir quelque part en se demandant inlassablement si elle est encore en vie, si elle est bonne santé, si elle est en difficulté, si elle est heureuse, si elle pense …

     

  • Vous pensez à Alice, n’est-ce pas ? C’est à cause de moi si… , se reprocha le jeune homme.

     

  • Non. C’était mon choix, ma décision. Merlin, mon petit, j’essaye de te faire comprendre qu’un peu de bonheur dans notre existence chaotique que nous menons, peut nous donner la force de continuer et à accomplir ce pourquoi nous sommes destinés. Ne rejette pas ce que la vie te donne par peur de souffrir. Dans l’adversité, la douleur tout comme la félicité, nous font avancer. C’est parfois injuste mais ainsi va la vie ! Dans mon cas, j’ai perdu Alice mais je t’ai, toi.

La conversation eut un effet revigorant sur le jeune sorcier. Pour toute réponse, Merlin le gratifia d’un sourire chaleureux.

 

                                                              Chapitre 3

 

Le soleil était à son zénith et dardait impitoyablement ses rayons sur les pauvres paysans partis aux champs, leur faux sur leur épaule. Les champs se situaient en dehors de la cité où l’orge et l’avoine fleurissaient à perte de vue. La récolte débuterait en été afin de confectionner des gerbes qui seraient entassées en meules dans les grands champs. Le temps chaud serait propice pour que la récolte sèche avant de débuter à séparer le grain de la paille. Ce serait un long et pénible travail qui devrait être effectué avant la saison des pluies.

C’était le premier jour de la fenaison. Ainsi, l’herbe coupée et séchée deviendrait foin qui serait ensuite entreposé dans le fenil près de l’étable afin d’y être conservé pour alimenter le bétail pour l’hiver et le début de printemps. Le travail était ardu mais nécessaire pour la survie du royaume.

Chacun s’attelait à sa tâche quotidienne. Claire n’échappait pas à la règle.

Pour la millième fois, Claire transversa le seau d’eau tiède dans la cuve. Elle saupoudra de la terre de foulon. Cette argile en poudre se délaya sans aucune difficulté dans cette eau tiède. La jeune fille trempa les vêtements sales dans la grande cuve. Munie d’un long bâton, Claire remua le linge. Puis elle les sortit un à un pour les frotter, les rincer et les essorer à la main. Saisissant son panier en osier alourdi par le poids des vêtements mouillés, Claire retourna chez elle.

Cette idée lui plaisait car d’aussi loin qu’elle s’en souvienne, Claire et son grand-père avaient habité dans un petit village situé dans le royaume de Bayard. Comme tous les enfants, elle était insouciante et pleine de vie. Comme dans tous les villages, la vie se déroulait paisiblement dans un dur labeur jusqu’au jour où elle avait commencé à voir les spectres.

Loin d’en avoir peur, elle avait tenté de s’en faire des compagnons de jeux. A la voir jouer et parler seule, son grand-père avait cru un temps que sa petite-fille s’était inventé des amis imaginaires, néanmoins il lui avait ordonné expressément de cesser de parler dans le néant en présence des villageois. Elle avait obéi sans rechigner, sans poser de questions, sans protester parce qu’elle respectait infiniment son grand-père.

Toutefois, le mal était fait. Les villageois commençaient à lui lancer des regards suspects et à murmurer sur leur passage. Les parents interdisaient à leurs enfants de la fréquenter tandis que son grand-père rencontrait de l’hostilité de la part de ses voisins et amis. Il pensait qu’avec le temps, ils oublieraient mais un évènement allait accélérer leur départ précipité.

Un jour, Claire avait révélé, innocemment, à ses voisins que, Lucie, leur fille désirait leur dire combien elle les aimait et qu’ils devaient cesser de pleurer et qu’elle allait bien. Evidemment, cette Lucie était décédée trois mois plutôt d’une pneumonie. A cette annonce hérétique, ils avaient craché leur mépris mélangé à de la terreur.

Terrorisée par tant de véhémence du couple, Claire s’était réfugiée dans les bras de son grand-père et entrecoupée par les sanglots, elle lui avait tout raconté. Le sang s’était retiré de son visage ridé et une peur incontrôlable s’était reflété dans son regard marron. Dans la crainte des représailles, son grand-père avait emballé leurs effets personnels et ils avaient quitté le village au milieu de la nuit hivernale.

Claire s’était adaptée à la vie itinérante que lui avait imposée son grand-père. Parfois, ils s’installaient dans une grotte ou une cabane abandonnée loin des villages environnants. Ils rencontraient rarement des personnes sur leur chemin.

Durant des années, ils avaient parcouru et traversé des royaumes amis ou ennemis discrètement sans jamais attirer l’attention sur eux. Son grand-père était très doué pour brouiller les pistes. Les mois, les années s’étaient écoulées paisiblement dans la précarité, dans la solitude, dans la joie, dans la tristesse, dans l’insouciance jusqu’à ce que la petite fille devienne une adolescente. Sous le regard protecteur du vieil homme, Claire était devenue une jolie jeune fille.

Ce dernier lui avait appris tout ce qu’elle savait sauf sur la mort de ses parents. Un jour, elle avait tellement insisté que le vieil homme s’emporta violemment contre elle. Elle avait été tellement effrayée qu’elle n’en avait plus jamais parlé.

Avec du recul, Claire réalisa qu’ils avaient eu de la chance de ne pas être tombés dans une embuscade ou être faits prisonniers par des brigands, par des barbares ou par des soldats d’un des royaumes ennemis.

Un jour, la jeune fille avait dû avouer à son unique parent qu’elle était sans cesse harcelée par ces étranges spectres quêtant son aide. Sur les conseils du vieil homme, elle refusait le soutien désiré, avec une pointe de tristesse dans le regard quand les fantômes s’évaporaient en fumée. Néanmoins, certains d’entre eux insistaient, la harcelant jour et nuit.

Inquiet pour la santé de sa petite-fille, le vieil homme lui avait donné un remède afin de la soulager. Ce dernier avait-il considéré cette chose comme une maladie ? Une pensée lugubre s’était formée dans son esprit chaotique : était-elle maudite, envoutée, ensorcelée ? Lui voulait-on du mal ? Existait-il un lien entre Lucie et son maudit don, si don il y avait ?

Outre ce problème de son don de voir et entendre les esprits des morts, Claire soupçonnait que son grand-père lui dissimulait quelque chose. Elle avait tenté de percer ce mur de silence mais il avait persisté dans son mutisme. Toutefois, l’amour qu’elle lui portait atténuait sa colère, ses doutes. Elle l’aimait tellement.

Pendant un temps, la présence des fantômes se raréfia autour d’elle, toutefois cette paix n’avait pas duré longtemps.

Ce jour-là, son grand-père avait décidé d’entreprendre le voyage vers Camelot où lui avait-il dit, il connaissait un vieil ami qui saurait la guérir. Du moins, l’avait-elle cru.

Camelot ! Le jour où elle avait franchi les portes de cette cité accompagnée de son grand-père, Claire n’aurait imaginé que son voyage s’achèverait là.

Il ne restait de l’existence de son grand-père que ce pendentif magnifique qui ornait sa poitrine. L’objet, qui avait appartenu à sa mère, était ovale et d’une couleur d’un bleu opaque dont le reflet s’irisait à la lumière du jour. Le bijou glissa entre ses doigts fins pour se plaquer sur sa poitrine.


crystal14  (27.12.2013 à 19:36)

 Après tant d’années d’errance, la jeune fille et son grand-père avaient trouvé leur place dans la cité de Camelot. Malgré son don, Claire s’ouvrait à la vie. Elle était rayonnante et épanouie, entourée de ses nouveaux amis. Cependant, un nuage s’était glissé dans sa nouvelle vie. Une nuit, sans crier garde, son grand-père s’en était allé. La mort avait emporté le vieil homme dans son sommeil. Claire était demeurée inconsolable mais avec le soutien de Gwen et de Merlin, elle avait réussi à surmonter la perte d’un être cher. Gaius lui avait trouvé une maisonnette et du travail à la bibliothèque de Camelot.

La première fois qu’elle avait franchi le seuil de cette bibliothèque, ses yeux s’étaient agrandis d’émerveillement. Jamais de sa vie, Claire n’avait rencontré tant de livres dans un si vaste lieu. Aussi loin que portait son regard, des couloirs d’une longueur interminable accédaient aux rayonnages où de nombreuses piles de livres semblaient attendre qu’une âme charitable prenne soin d’eux et les mette en valeur dans ces étagères poussiéreuses. Après tout, n’étaient-ils pas la mémoire de l’homme, avait-elle pensé, ce jour-là.

Claire avait observé le vieux bibliothécaire consulter ses papiers. Une barbe, une moustache blanchie, le crâne dégarni dû à son grand âge. Derrière lui, des étagères où livres et rouleaux de papyrus étaient empilés. Deux chandelles éteintes ornaient la table parsemée de rouleaux ficelés d’un ruban rouge, d'un grand livre, d'une plume blanche et de son encrier ainsi que de papiers.                                                                               Geoffroy de Monmouth était généalogiste officiel de la cour et il était également le gardien de la bibliothèque de Camelot. Il avait l’habitude de travailler en solitaire depuis de très, très longues années alors que maintenant, elle était dans son sanctuaire.

Le travail ne lui faisant pas peur, la jeune fille avait retroussé ses manches et s’était aussitôt mise à l’ouvrage sous l’œil sceptique de son maitre. Si ce dernier ne l’avait pas arraché à son application, elle serait restée jusqu’à l’aube. Trier, dépoussiérer, classer tous ces livres prenaient un temps considérable. Puis, nettoyer les étagères afin d’accueillir ces nouveaux occupants en papiers. C’était une tache minutieuse et de longue haleine mais c’était une mission qu’elle accomplirait avec honneur et gratitude.

Au début, Geoffrey de Monmouth surveillait ses moindres faits et gestes mais au fil des semaines, il semblait lui avoir accordé sa confiance même si parfois il employait quelques fois un ton bourru envers elle. C’était dans son caractère, avait-elle supposé.

Un jour, elle avait profité de ses courtes absences pour consulter les livres qu’elle devait ranger. Elle pensait trouver ainsi quelques renseignements sur des personnes qui, comme elle, avaient le don d’entrevoir les fantômes. Cependant, à ce rythme-là, elle allait demeurer éternellement dans ce lieu si vaste.

D’ailleurs, assistée par Merlin, ce dernier lui avait proposé de continuer leurs investigations à la nuit tombée. Ils seraient plus tranquilles. Malgré tout, leurs recherches avaient été infructueuses jusqu’à maintenant. Durant ces nuits, ils s’étaient confiés, l’un à l’autre.

Elle lui avait raconté son enfance itinérante. Comment son don était apparu alors qu’elle jouait près de la rivière. Pourquoi son grand-père s’était décidé à venir à Camelot.

Et, le jeune sorcier lui avait confié comment il avait été obligé de quitter son village, Ealdor, pour venir habiter à Camelot. Comment Gaius avait fait de lui l'homme qu’il était aujourd’hui. Le médecin était un ancien sorcier. Ses connaissances sur l’histoire de la Grande Purge, sur les créatures magiques et son enseignement sur la magie lui avaient permis d’entrevoir ses capacités. « Le secret était souvent la meilleure des protections et il devait choisir avec grand soin ses confidents. Cette règle était la plus difficile à respecter ». Lui avait-il confié, l’autre nuit.

 

Depuis la mort de son grand-père, avait-elle remarqué, l’attitude de Merlin avait changé du jour au lendemain. Elle lui était reconnaissante de sa patience mais deux mois s’étaient écoulés depuis. Pourtant, la jeune fille n’ignorait pas que les sentiments de Merlin, cette nuit-là,étaient sincères.Le baiser qu’il lui avait donné en était la preuve. Elle pouvait encore sentir le gout de ses lèvres sur les siennes. Avait-il regretté son geste, cette nuit-là ? Peut-être avait-il cru qu’il avait précipité les choses ? Claire nageait dans l’incompréhension la plus totale. Cependant, elle n’avait jamais demandé d’explication. Elle n’en avait pas besoin. Peut-être que Freya était encore trop présente dans son cœur ?

Car, Claire comprenait la réaction de Merlin, son comportement, son attitude. Elle partageait ses doutes, ses craintes, ses peurs, ses angoisses mais aussi ses joies, son bonheur, sa bonne humeur, ses rires, ses sourires.

Elle respectait sa pudeur, sa candeur, sa droiture, sa loyauté, sa fidélité, l’amour qu’il portait pour la druidesse, sa grandeur d'âme, son altruisme.

Elle avait accepté son éloignement, le peu de temps passé avec lui, le partager avec le prince Arthur, ces moments de chasse auprès du prince de Camelot durant de longues journées.

Elle supportait toutes ses incertitudes, ses longues journées sans l’apercevoir, l’entendre, sans pouvoir se confier à personne de ses tourments qui la tiraillaient depuis de longues semaines.

Alors, elle endurait silencieusement, courageusement cette situation tout simplement parce qu’elle aimait irrémédiablement Merlin.

L’amour était la première raison de sa présence à Camelot. Il l’avait transpercé, laissant son empreinte dans son âme. Claire veillait à ce que son amour ne détourne Merlin de son destin. Cependant, à l’heure actuelle, Claire devait se satisfaire de son amitié.

La deuxième raison était une promesse faite à Freya et dont elle guettait le moment venu de pouvoir agir. La jeune fille se rappela alors des paroles de la druidesse :

« Un jour, il aura encore besoin de toi. Il faudra faire preuve de courage et de détermination. »

La druidesse lui avait déjà confié une mission et elle avait réussi. Non sans mal. Elle en avait éprouvé de la fierté. Pour la première de sa vie, elle s’était sentie utile. On avait eu besoin d’elle et elle avait répondu sans la moindre hésitation. Et la finalité de cette aventure lui avait apporté l’estime de Freya et l’amour sincère du sorcier.

Chaque semaine écoulée dans cette cité, elle vivait dans l’appréhension que le jour fatidique prédit par Freya n’arrive, un jour. Le plus tard possible, supplia-t-elle en touchant de nouveau le pendentif. Le destin se montrait cruel envers elle mais c’était le prix à payer pour demeurer près de lui. Claire était prête à tous les sacrifices qu'on lui imposerait. Je surmonterai n’importe quelle épreuve pour lui, pensa-t-elle.

 

Arrivée chez elle, Claire étendit son linge sur un long fil suspendu d’une extrémité d’un poteau à l’autre. A l’aide de son tablier, la jeune fille essuya son front en sueur. Elle contempla son travail d’un air ravi. Elle se baissa pour prendre le panier en osier devenu léger et rentra chez elle.

 

                                                                               *******

D’une démarche sure, Claire évolua dans la rue de la cité bondée de monde. C’était le jour du marché et malgré la foule et les clameurs cacophoniques de la populace, la jeune fille aperçut Gwen qui examinait les pommes qu’elle mit ensuite dans son panier en osier et paya le marchand en le remerciant. Comme à l’accoutumée, les premiers clients affluèrent sur les étalages longeant la rue principale. Des fruits et légumes, des tissus, de la laine, des pots, des ustensiles. Certains d’entre d’eux achetaient leur provisions, d’autres continuaient leur journée de labeur.

L’odeur des épices sur les étalages chatouillait les narines de la jeune fille. A chaque fois qu’elle y passait, elle humait leurs effluves en fermant ses yeux en imaginant le chemin parcouru pour venir sur les étalages de ce marchand d’épices. Mais ce rêve se brisa au son tonitruant du marteau sur le métal que le forgeron martelait à plusieurs reprises. Briseur de rêves, rouspéta-t-elle intérieurement.

Alors, Claire s’engagea vers la venelle où Gwen lui adressa un signe de la main. Arrivée à sa hauteur, Claire proposa son aide pour transporter ce large panier rempli de victuailles que Gwen accepta avec joie. Elles empoignèrent chacune une anse et remontèrent le chemin qui débouchait vers l’unique rue de la cité.

Elles accédèrent au château par une porte en forme d’arc. Elle ouvrait sur une cour immense où s’érigeait une statue de chevalier sur sa monture. A chaque fois, cet endroit ravivait un souvenir agréable à Claire. C’était sous la galerie qu’elle avait rencontré Merlin pour la deuxième fois. Tant de choses s’étaient passées en l’espace de quelques semaines. Un sourire naissant flotta sur ses lèvres.

Soudain, les sabots des chevaux résonnèrent sur le pavé de la cour d’honneur, obligeant la jeune fille à revenir à la réalité. Elle admira les cavaliers qui descendaient deleurs montures, essoufflées, encore émerveillée et impressionnée d’être si près des chevaliers de Camelot. Les défenseurs du royaume. A son arrivée, les villageois lui avaient rapporté les évènements funestes qui s’étaient abattus sur Camelot. Qui mieux que Gwen pour la renseigner au sujet de cette mystérieuse Morgane, l’ancienne pupille du roi ?

Gwen suggéra de poser le panier chargé de fruits et légumes sur le muret qui longeait les galeries. Elles se dégourdirent les bras en les secouant. Gwen adressa un sourire aux chevaliers de Camelot.

  • Pourquoi Morgane éprouve-t-elle tant d’aversion envers le prince ? N’était-elle pas son amie d’enfance ? demanda Claire en suivant des yeux les chevaliers qui montaient les escaliers du palais.

     

  • Pour le trône, dit Gwen, attristée.

     

  • Je croyais que l’accession au trône appartenait aux personnes issues de sang royal ? , s’étonna son amie.

Gwen lui expliqua succinctement comment lorsque l’armée de Cenred menée par Morgause et Morgane avait envahi Camelot, prenant possession des lieux et le trône. Et les circonstances où Arthur avait appris accidentellement son lien de parenté avec la traitresse de Morgane et qu’elle était la cause de l’état de la santé actuelle du roi Uther.

  • Que s’est-il passé pour qu’elle veuille à ce point un trône qui est destiné à Arthur ?, questionna Claire, déconcertée.

     

  • Je l’ignore. Si seulement, tu l’avais pu la connaitre ! Elle personnalisait la bonté, la générosité mais la magie a changé Morgane en un être vil, emplis de haine .La magie a altéré ses bons sentiments et l’a détournée de ses amis, affirma Gwen, en soupirant

     

  • La magie se plie aux exigences de son propriétaire. C’est la façon de l’utiliser qui rend la magie bonne ou mauvaise et non le contraire, expliqua Claire d’un ton assuré. Je pense que ton amie Morgane n’a pas su s’entourer de bons conseillers en la matière, se rattrapa –t-elle en constatant le regard inquiet de son amie.

     

  • La magie m’effraie car elle n’apporte rien de bon aux gens qui la possèdent, conclut Gwen.

L’arrivée impromptue de Sir Lancelot coupa court à la conversation. Il fit un bref signe de tête en guise de salut, s’enquit aussitôt de leur journée puis leur demanda si elles avaient aperçu Merlin. Claire secoua la tête en signe de négation tandis que Gwen l’informa avoir croisé le jeune homme, il y a peu de temps, se dirigeant vers les écuries.

Sir Lancelot afficha un demi-sourire à Claire, remercia Gwen puis il partit comme il était venu. Un instant, Gwen suivit, d’un regard lointain, le chevalier puis elle tourna la tête à la chevelure bouclée vers Claire qui haussait les épaules.

  • Arthur accapare tellement Merlin que c’est à peine s’il lui laisse le temps de voir ses amis. S’il n’était pas un prince, je lui dirais ma façon de penser, répondit Claire, agacée.

  • Arthur est très attaché à Merlin, confia Gwen.

  • Quand je vois Merlin se plier en deux pour lui, j’oublierais presque tes sentiments envers ce noble prince ! , insista-t-elle sur les deux derniersmots.

  • Une chance pour toi que tu ne l’aies pas connu avant l’arrivée de Merlin à Camelot ! Il était…. 

  • Laissez-moi deviner : arrogant, prétentieux, condescendant, sûr de lui, imbu de lui-même et...

Gwen finit par éclater de rire et supplia son amie de cesser de donner ces adjectifs très peu reluisants à son pauvre Arthur.

  •  C’était vrai avant mais aujourd’hui, il a changé. Merlin a su tirer le meilleur de lui-même. C’est un homme respectueux. Il est parfois maladroit pour montrer ses sentiments, lui dit- elle, rêveuse.

Il fallut à Claire peu de temps pour deviner les sentiments profonds qui animaient le cœur de Gwen pour le prince Arthur. Gwen avait raison. Elle se montrait injuste envers lui. Si un prince s’était épris d’une jeune servante, bravant les protocoles de la Cour Royale et affichant ses sentiments pour elle à tout Camelot, cela ne pouvait être qu'un homme au cœur généreux et sensible.

  • Est-ce Arthur qui s’est déclaré le premier ? lui demanda-t- elle, à brule-pourpoint.

Gwen la fixa droit dans les yeux. Puis elle ébaucha un sourire. Décidément, sa nouvelle amie était directe et spontanée dans ses questions. Il faudra bien qu’elle s’habitude à ce trait de caractère. A bien y réfléchir, Gwen préférait ce comportement franc à la tergiversation, à l’hypocrisie, aux sous-entendu, à la duplicité comme l'avait été Morgane.

Malgré l’affliction d’Arthur envers son père, et qu’elle partageait, Gwen se sentait heureuse. Elle voyait en Claire une amie en qui elle pouvait faire de nouveau confiance. Elle était si spontanée, serviable, souriante et le plus important, elle était attentive. Gwen était ravie de cette qualité car maintenant, outre Merlin qui était un homme, elle avait quelqu’un à qui se confier.

Au fur et à mesure qu’elle apprenait à la connaître, Gwen partageait ses confidences, ses peurs, ses doutes. Après la trahison de Morgane, elle avait eu peur de redonner son amitié. Elle avait constaté aussi que sa langue se déliait en sa présence. Claire lui inspirait une totale confiance.

Gwen lui répondit sans hésitation et honnêtement :

  • C’est venu progressivement. C’était des regards, des sourires, des gestes, des mots. Et puis un jour, il m’a embrassé. Peut-être a-t-il vu un geste encourageant de ma part. C’est venu naturellement. Un jour, j’étais prête à le voir épouser une princesse d’un autre royaume. Jamais, je n’ai eu la prétention d’attirer ses faveurs. Je réalise à peine que moi, une simple servante ait gagné le cœur d’un prince, se confessa-t-elle, songeuse.

  • L’amour est un trésor inestimable, Gwen. Quand il se présente, il faut le saisir sans poser de questions. Un jour, Arthur sera couronné roi. Tu apporteras la stabilité dans le cœur d’Arthur. Ne laisse jamais personne penser le contraire !, proclama son amie, les mains sur ses hanches.

    Emue aux larmes, Gwen esquissa un sourire.

  • Puisqu’on est dans les confidences, articula-t-elle, d’une voix émotionnée. Je crois qu’un certain jeune homme commence à éprouver de l’attachement pour toi.

    En empoignant l’une des anses du panier, Claire rougit d’embarras en devinant de qui elle voulait parler.

  • Je connais très bien Merlin, continua Gwen en se saisissant de l’autre anse du panier en osier. Je ne l’ai jamais vu aussi heureux, même Arthur s’en est rendu compte. Il est mon ami mais tu es ma confidente comme je suis la tienne.

    A propos d’Arthur, Claire avait la conviction que son altesse ne l’appréciait pas. Chaque fois qu’ils se croisaient, il lui lançait un regard sombre. Impressionnée par sa prestance, elle avait néanmoins soutenu son regard. Apparemment, il voyait d’un mauvais d’œil l’influence pourtant bénéfique qu’elle avait sur son serviteur.

    Elles marchèrent tranquillement entre les croisements des couloirs du palais. Claire jeta un regard en biais à son amie.

    Malgré l’amitié que Merlin portait à Gwen, cette dernière ignorait son secret.

    Gwen : sa confidente. La vie était bien ironique. A cause de son don particulier, son grand-père et elle avaient vécu en reclus. Comme elle aurait souhaité avoir une amie avec qui partager ses joies et ses peines.

    En l'espace de quelques semaines, Claire s’était rapprochée de la jeune servante. Cette nouvelle amitié lui avait permis de constater combien cela lui avait manqué durant sa prime jeunesse empreinte de solitude.

    Sa confidente ! Comme elle aurait bien envie de partager les tourments qui l’assaillaient depuis le décès de son grand-père. Lui avouer que chaque jour, elle était au supplice de voir l’homme qu’elle aimait se vouer à servir le prince de Camelot qui le traitait comme un vulgaire esclave. Chaque fois qu’il sortait à cheval avec Arthur, elle tremblait de peur, se demandant si le jour fatidique annonçait par Freya était arrivé. Qu’elle angoissait dans l’attente du jour où Merlin aurait de nouveau besoin d’elle !

    Et elle ne se s’était jamais sentie, aussi seule de toute sa vie. Claire s’arrêta et de sa main libre, elle saisit l’avant- bras de son amie.

  • Ton amitié me touche, Gwen. Tu es ma première et véritable amie, ajouta Claire en reprenant la marche.

Troublée et touchée à la fois, Gwen ne put que sourire à cet aveu venu du cœur. Elle pressentit qu’elle n’aurait pas de réponse sur les sentiments que Claire ressentait pour Merlin.

Durant le trajet, les deux jeunes femmes demeurèrent silencieuses. Chacune dans leurs pensées. Elles descendirent les escaliers en colimaçon qui débouchaient dans les cuisines.

A leur entrée, elles entendirent le cuisinier vociférer des ordres à ses aides qui coupaient des légumes, plumaient les volailles. Un jeune marmiton tournait une grande tige sur laquelle cuisait la viande. Gwen compatissait pour ce pauvre jeune garçon qui devait rester à côté de l’âtre qui dégageait une chaleur insupportable, surtout en cette saison.

  • J’ai failli oublier. Gaius te demande d’aller le voir dès que tu auras un moment, se rappela-t-elle soudain.

    Claire la remercia et remonta les marches de l’escalier pour se diriger lentement vers le laboratoire du médecin.


crystal14  (03.01.2014 à 12:39)

 

Gwen passa devant un four en forme de coupole qui était aménagé dans le coin de la cheminée. L’odeur du pain se mélangeait à la transpiration du personnel qui évoluait dans la grande cuisine. Une grande table occupait tout le milieu de la grande salle. Dessus, Gwen vit des aides préparer le repas. Et c’est avec un plateau chargé de fruits frais, de pain et de fromage que Gwen se dirigea vers les appartements du roi Uther où elle espérait que celui-ciserait enclin à accepter de s’alimenter.

La jeune servante toqua sur la porte en bois. Évidemment, aucune réponse ne lui parvint, alors elle poussa la lourde porte et entra. La jeune servante posa directement son regard vers la fenêtre, où elle trouva le roi Uther, assis sur son fauteuil. Elle soupira et s’avança.

Caché par la colonne près du lit, elle remarqua la présence d’Arthur. Le jeune prince l’enveloppa de son regard bleu. Elle sourit car elle y lut de la reconnaissance. La jeune servantedéposa le plateau sur la table basse, versa de l’eau fraîche dans la coupe qu’elle tendit à son roi. Sans un regard,il la prit et but quelques gorgées.

  •  Je suis venu voir comment il allait, murmura-t-il avec tristesse.

Depuis qu’il régentait le royaume, de lourdes responsabilités lui pesaient sur les épaules. Il devait se montrer à la hauteur de l’espérance de son peuple. En effet, son père ne semblait pas désirer sortir de sa léthargie où il s’était enfermé depuis qu’il avait assisté impuissant au couronnement de sa fille : Morgane. Il refusait catégoriquement la trahison de sa fille qui s’était alliée avec l’un de ses ennemis : Morgause. Si seulement, lui, Arthur avait été plus clairvoyant, peut-être aurait-il pu éviter ces événements tragiques.

Heureusement, Agravain, son oncle, était présent pour l’épauler. Il était de bon conseil. Il devait s’avouer qu’il se reposait sur lui pour certaines décisions où il ne maîtrisait pas encore le sujet. Néanmoins, il ne perdait pas de vue que lui seul avait le dernier mot à chaque conseil.

Après avoir libéré son père emprisonné dans les cachots, sous le choc, le regard éperdu et après avoir reconquis le royaume, il avait ordonné à ses chevaliers de Camelot de patrouiller dans tout le royaume, voire au-delà à la recherche de Morgane et de Morgause. La cité et ses environs avaient été fouillés sans aucun résultat.

A chacune de leur sortie, ils revenaient bredouilles et éreintés. Et malgré toutes les épreuves de ces mois derniers, ses chevaliers qu'il avait lui-même adoubés, continuaient sans relâche leur recherche. C’était la première action qu’il avait prise sans avoir à consulter qui que ce soit. En ce jour historique, Merlin et Gwen avaient été à ses côtés. Inexplicablement, il s’était senti presque invincible auprès d’eux.

Sans rien dire, Gwen serra la main d’Arthur. Par ce simple geste, le prince retrouva tout son courage pour surmonter cette situation. Il déposa un doux baiser sur le front de Guenièvre et quitta les appartements de son père.


crystal14  (03.01.2014 à 13:14)

 

                                                              CHAPITRE 4

 

Au seuil de l’écurie, Sir lancelot balaya du regard la surface de l’étable où les chevaux étaient côte à côte, leurs licolsattachés à la rampe en bois. Au fond, il aperçut une main qui caressait l’encolure de l’un d’eux et entendit une voix rouspétait :

  • Merlin fais ci ! Merlin fais ça ! (Il caressa machinalement l’encolure du cheval). Quand je pense tout ce que je suis capable de faire….enfin, tu sais, quoi ! (Merlin plongea son regard doux dans l’œil du cheval.l’animal secoua imperceptiblement sa tête).Si la magie n’était pas interdite, je me ferais un plaisir de lui bâillonner sa bouche à ce noble crétin ! déclara-il en marmonnant pour lui-même.

A la voix douce de Merlin, le cheval d’Arthur pointa ses oreilles en avant, l’air attentif.

  • Et toi ? Qu’en penses-tu ? Cela te ferait plaisir de ne plus l’entendre ? soupira-t-il en appuyant sa tête sur le flanc de l’animal.

Le cheval hennit à la question de son interlocuteur. Le jeune sorcier éclata de rire.

  • Incroyable ! Je fais la conversation à …

  • ….un cheval ! acheva une voix moqueuse derrière lui tandis que Merlin virevolta au son de la voix qu’il reconnut sans mal. Es-tu en manque d’amis pour converser avec un cheval ? ajouta Sir Lancelot, d’un doux sourire aux lèvres.

  • Ils sont tous occupés à chercher Dame Morgane à travers le royaume, expliqua le jeune sorcier en lui tournant le dos.

L’animal s’agita légèrement en pointant ses oreilles en arrière. Le jeune sorcier le calma en lui tapotant son arrière-train et commença à mettre de la paille fraiche pour que les chevaux puissent grignoter. L’épaule adossée à l’entrée de l’écurie, Sir Lancelot observa son jeune ami s’affairer auprès des chevaux.

Que d’événements imprévus avaient abouti à cette issue glorieuse quand Lancelot s’était laissé embringuer dans l’histoire de Merlin pour faire de lui un chevalier de Camelot. Le plan de Merlin s’était soldé par un échec cuisant malgré l’action héroïque dont il avait fait preuve lors de l’affrontement contre le Griffon. Toutefois, il n’oubliait pas que c’était grâce à la magie de son ami qu’il avait réussi cet exploit.

Le chevalier lui était si reconnaissant de l’avoir épaulé, aidé dans son désir d’être chevalier de Camelot. D’avoir donné son amitié sans condition, d’avoir eu foi en lui, de lui avoir attribué le mérite de la mort de la créature ailée alors que c’était lui, Merlin, qui l’avait guidé, ensorcelant la lance par un sortilège. Jamais il ne dévoilerait son secret. Bien au contraire, il était fier et honoré d’avoir un ami tel que lui.

Cette nuit-là, il avait acquis le respect d’Arthur et le mépris de son père, le roi Uther. Et c’était avec le cœur lourd chargé de regret qu’il avait quitté Camelot, laissant derrière lui, la femme dont il était épris: Guenièvre.

Durant son long voyage initiatique où il espérait apprendre le maniement de l’épée, il pensait sans cesse à elle. Son sourire, son regard, sa chevelure brune et bouclée. Il suffisait qu’il évoque son doux visage pour que son moral, sa hargne, son courage, et l’espoir l'inspirent à vouloir s’en sortir.

Un jour, dans le château de Hengist, elle avait été là. Dans ce lieu infâme où pullulaient des hommes bestiaux et où le code de la chevalerie leur était étranger. Plus précisément dans la cage où elle avait assisté à un combat à mort dont il avait épargné son adversaire. Elle était si belle et si terrifiée aussi.

«  Vous êtes ce qu’il y a de meilleur dans ce monde. Tant que je vivrais, mes sentiments envers vous ne faibliront jamais… »

Ces paroles avaient insufflé à son cœur un regain d’énergie et une volonté d’agir. Sans le savoir, elle lui avait redonné un nouveau sens à sa vie.

Elle l’avait aimé mais c’était il y a des siècles !

Il avait subodoré sans peine les sentiments d’Arthur envers Gwen. Il avait ressenti la gêne, le trouble s’installer entre le prince et la servante. Ce dernier était venu à son secours, bravant l’interdiction de son père. Merlin lui avait confirmé ses soupçons. Le cœur déchiré, il avait disparu pour ne pas s’immiscer entre lui et Gwen. Pour elle, il avait choisi. Par lâcheté ou parce qu’il s’était déprécié face à Arthur et de tout ce qu’il représentait, il s’était détourné d’elle, volontairement mais avec une pointe de regret.

Lancelot avait dérivé comme une âme en peine jusqu’au jour où le royaume de son rival avait étéenvahi par l’armée de Cenred, il avait répondu à l’appel de Merlin sans hésiter, entrainant sur son sillage, Perceval.

Dans le château des anciens rois, il avait vu Arthur embrasser Gwen. Cette fois, il n’y avait plus de doute. Il l’avait perdue à tout jamais. Arthur valait mille fois mieux que lui. C’était le prince héritier de Camelot. Il ne devait en aucun cas les blâmer. La décision venait de lui. A lui, de subir les conséquences de ses actes.

Si elle lui avait ordonné de mourir pour lui, il aurait obéi car Arthur lui avait enseigné les valeurs de la chevalerie, combattre avec honneur pour la justice, la liberté. Sans être noble de naissance, il avait été adoubé par Arthur aux heures sombres du royaume. Il avait foi en lui et en ce monde qu’il allait bâtir avec Merlin. Et il désirait avant toute chosele bonheur de Gwen.

Toutefois, il espérait afficher un visage impassible lorsqu’il entrevoyait Gwen au détour d’un couloir du château ou la croisait dans une des ruelles de la cité basse. Dorénavant, il lui était interdit d’épancher son cœur.

Certes, sa vie était devenue meilleure. Il avait conscience qu’il avait mérité l’amitié des autres chevaliers, qu’il avait désormais un titre de noblesse mais en contrepartie, il avait perdu à jamais l’amour de la femme qu’il n’avait pas cessé et ne cesserait d’aimer.

Grace à Merlin, tout ce qui lui était important se trouvait ici, à Camelot.

  • Un coup de main ! proposa le chevalier en s’approchant du jeune sorcier.

  • D’autres taches plus intéressantes t’attendent maintenant que tu es chevalier de Camelot! dit-il en éparpillant la paille sur le sol avec la fourche.

  • Je ne te remercierai jamais assez pour cela ! Ce que je suis aujourd’hui, je te le dois, Merlin ! répondit-il, d’une voix reconnaissante.

Mal à l’aise, Merlin rectifia le tir car il ne cherchait aucun remerciement, ni reconnaissance pour cet acte qu’il jugeait juste et mérité.

  • Nous avons démontré qu’il ne suffisait pas d’être noble pour être un valeureux chevalier ! Arthur a rectifié cette injustice. Sir Lancelot ! Cela te va comme un gant !affirma le jeune homme dont le visage s’épanouissait de fierté.

  • Veux-tu de mon aide ou faut-il que je te menace de dévoiler ton secret ? intimida Sir Lancelot en posant sa main sur l’épaule frêle de son jeune ami.

  • Euh, comment ne pas céder à l’odieux chantage. Dire que je te croyais être mon ami ! lança-t-il en lui montrant la brouette remplie de crottin de cheval.

  • C’est le succès qui m’étourdit la tête ! Dans la classe « ami », voilà ce pauvre cheval relégué dans la catégorie « animal » !, plaisanta le chevalier de Camelot en saisissant les bras de la brouette.

Les lèvres du jeune sorcier se fendirent en un large sourire où des ridules se formaient au coin de ses yeux. Avec la fourche, Merlin étala la paille sur le sol de l’écurie. Quand il eut terminé, il donna de l’avoine aux chevaux.

En observant Merlin, Sir Lancelot comprit malgré lui qu’il ne connaissait pas vraiment son jeune ami. Merlin s’arrangeait toujours pour que l’on aperçoive comme un être maladroit, idiot, faible, couard alors qu’il valait mieux que tous les chevaliers du royaume. Il prit conscience que le secret si pesant de Merlin l’obligeait à se comporter de cette manière, se condamnant ainsi volontairement dans une éternelle solitude.

Tous ses amis avaient une confiance aveugle en lui et lui, tout ce qu’il était capable de faire était de les trahir un peu plus chaque jour pour se protéger. Depuis des années, il travestissait la vérité, mensonge après mensonge. Et pourquoi ? Simplement pour préserver son secret. Un secret que peu de personnes connaissaient. Lancelot admirait la force de caractère qui émanait de son ami. Il était également honoré de la confiance que le jeune sorcier lui témoignait.

 

                                                                      Chapitre 5

 

Le royaume des Pendragon s’étendait à perte de vue. A ses frontières se trouvait, au Nord, le royaume de Mercy. A l’Ouest, celui de Carléon et à l’Est, le successeur de Cenred. Le château de Camelot, situé sur les hauteurs d’une colline, était entouré par une vaste forêt. Et c’était dans cette sombre et profonde forêt, bien à l’abri des regards indiscrets que la cabane de Morgane se fondait dans cette nature protectrice.

La lumière crépusculaire commençait à plonger la forêt dans la pénombre. Le vent ne soufflait nullement à travers les feuilles des grands arbres pour ne pas attirer l’attention de cette silhouette qui avançait d’un pas décidé vers le petit chemin. La houppelande balayait les feuilles mortes qui recouvraient le sentier. Le capuchon dissimulait son visage. Elle dévala la pente avec une certaine légèreté et assurance. Enfin, elle arriva à destination. Elle ne prit pas la peine de vérifier si on l’avait suivi.

A l’intérieur, malgré l’exiguïté du logis de fortune, des étagères étaient alignées contre le mur où étaient rangés des bocaux et diverses choses qui semblaient lui être utiles. Une petite table où elle prenait son repas. Un rocher en forme de puits se trouvait au centre de la cabane. Il était utilisé en guise de table où des bougies étaient disséminées par-ci, par-là. Les flammes vacillaient au gré du courant d’air qui se glissait entre les interstices des murs en pierre. Des racines parsemées de feuilles ornaient la façade rocheuse de la cabane. La lumière du jour se glissait entre la petite fenêtre qui se situait au-dessus du lit et l’ouverture rectangulaire qui se trouvait au plafond recouvert de branches. A défaut de voir la lumière du jour, des bougies éclairaient l’habitat, projetant leur reflet vacillant sur les murs humides recouverts de lichen.

Le regard triste de Morgane s’arrêta sur un lit de fortune près du mur au-dessus de la petite lucarne. Un corps était allongé dont une longue chevelure blonde dépassait de la couverture qui la recouvrait. Le rythme de la respiration indiquait que la personne dormait profondément.

Depuis qu’elle avait appris sa filiation avec le roi Uther, Morgane s’était sentie trahie, abusée, manipulée. Durant toutes ces années, cet homme, qu’elle avait aimé, chéri, l’avait outrageusement trompée. Il l’avait presque reniée, à sa façon. Sa première intention avait été de le tuer pour se venger mais Morgause l’en avait dissuadé, lui affirmant qu’elle pouvait, en tant que la fille du roi Uther, prétendre au trône. Que le temps n’allait pas tarder à leur sourire. Morgane lui avait promis d’attendre mais la tentation fut la plus forte.

Morgause, sa sœur, ignorait tout de son entreprise. Elle voulait lui prouver combien elle avait été très attentive à tous ses enseignements. Elle ferait tout pour cette sœur blessée qu’elle connaissait à peine mais dont les liens du sangs’étaient consolidés au cours de ces derniers mois. Sa sœur serait si fière d’elle si elle parvenait là où les autres avaient échoué.

Conquérir Camelot !

La voix de Merlin lui affirmant que tout était terminé alimentait la haine qui bouillonnait en elle.

Elle s’avança vers la cheminée, prit une buche qui était entreposée dans un panier et raviva le feu par la magie. La jeune sorcière tendit ses mains pour les réchauffer en contemplant fascinée, ces flammes vacillantes. Le printemps touchait presque à sa fin et pourtant la fraicheur persistait à rester dans ces lieux. Entre averse et soleil, l’humidité se maintenait à demeurer dans ces lieux, emplissantl’atmosphère d’un relent de terre mouillée mêlé au bois et feuilles de la végétation. Si elle grelottait déjà en ce début de l’été, Morgane pouvait aisément s’imaginer que l’hiver allait être impitoyable et rude dans cette cabane sauf si son plan était couronné de succès. Elle se devait de réussir pour sa sœur, Morgause. Cette dernière ne résisterait pas à la rudesse de l’hiver avec son état de santé actuel.

Un bruit léger tira Morgane de ses pensées moroses. Aux aguets, elle tendit l’oreille en se redressant lentement. Les traits, autrefois si délicats de son visage, se durcirent et ses yeux verts soulignés d’un trait noir accentuèrent son regard menaçant. Un frôlement se fit entendre, suivi d’un coup à la porte en bois. La tête de Morgane se tourna vers sa sœur qui n’avait pas bougé puis d’un pas lent, elle se dirigea vers l’entrée. Elle ouvrit lentement la porte. Morgane s’effaça pour laisser le passage au visiteur inattendu. Sans mot dire, la jeune sorcière l’étreignit chaleureusement et l’invita à s’asseoir. Il enleva son capuchon et de beaux cheveux noirs et courts apparurent.

  • Qui aurait cru qu’un jour, je vous retrouverai dans un tel endroit sombre et humide, Morgane ?  dit-il, d’une voix dépitée.

  •  C’est ce que l’on récolte quand on tente de prendre Camelot avec des alliés incompétents ! répondit-elle en détournant son regard attristé sur la forme étendue sur le lit.

    L’enfant qu’elle avait connu jadis avait laissé la place à un très beau jeune homme. Morgane l’observa en train d’inspecter l’endroit avec une certaine mélancolie. Tant années s’étaient écoulées depuis leur dernière rencontre. Ils avaient tous deux changé. Grace à la télépathie, le druide avait senti sa détresse et l’avait retrouvée dans un endroit insalubre.

    Ensemble, ils avaient concocté un plan pour renversé le prince Arthur. Elle lui avait raconté comment elle s’était acharnée à éliminer Arthur mais à chaque fois, tous ses plans avaient misérablement échoué. La solution était tout simplement maitriser ou éliminer son serviteur. Car sans lui, Arthur sera comme un enfant sans défense.

    Ce Merlin parvenait à contrarier ses projets juste parce qu’il connaissait sa véritable nature. Pourtant, il n’avait divulgué son secret à Arthur et pour cause, elle était sa sœur. Jamais, Arthur n’aurait entendu la vérité, surtout proférée par un domestique. Le lien qui unissait Merlin à son frère était un mystère qu’elle ne désirait pas approfondir. Pour le moment, du moins.

    Pour avoir cohabité si près de l’usurpateur du trône de Camelot, Morgane avait constaté que chaque fois qu’Arthur réussissait à s’en sortir, Merlin n’était pas loin de lui. À chaque fois, tous ses plans avaient misérablement échoué. L’idée qu’un jour, Arthur puisse être roi de Camelot, l’incommodait au plus haut point. La prémonition où Morgane avait vu le couronnement de Guenièvre faisant d’elle la reine de Camelot lui donnait la nausée. En éliminant Arthur, ce futur qui la hantait tant, n’existerait pas.Lui maîtrisé, Camelot serait à ses pieds.

    Elle s’était évertuée à attaquer Camelot de front et de l’intérieur sans grand succès. C’était comme si cette forteresse était inexpugnable. Pourtant, elle était presque parvenue à ce que tous les sujets du royaume lui portent allégeance. Seuls les chevaliers étaient restés fidèles au roi Uther et à son fils : le prince Arthur. Malgré la domination en nombre, toutes ses actions s’étaient soldées par un échec. Même la magie noire n’avait réussi à infléchir cette cité.

    Le point faible d’Arthur était la confiance qu’il plaçait sur ses proches. Il était d’une crédulité pitoyable ! Il ne se doutait même pas que son oncle était de son côté. Nul ne savait qu’il conspirait contre Arthur, contre Camelot.

    Agravain pourrait s’avérer un atout précieux dans un avenir proche.Morgane se félicita de cette alliance providentielle. Cette fois-ci, le succès était au bout du chemin.

  • L’as –tu rencontré ? demanda Morgane.

    L’adolescent esquissa un léger sourire et finit par s’asseoir sur le banc. Morgane le fixa intensément, comme si elle cherchait à lire dans ses pensées. Mordred sortit de sa poche, la petite fiole qui scellerait leur destin. Les flammes crépitaient, meublant le silence oppressant dans la cabane sombre et humide.

  • Sans Merlin, Arthur n’est plus. Je ferai en sorte que votre destin, Morgane, devienne réalité, promit le jeune druide en posant la fiole sur la table.

  • On se tient au plan que l’on s’est fixé. Il faut agir avec prudence, avertit-elle.

  • Merlin est le caillou qui se trouve dans mon soulier. Lui maîtrisé, Camelot sera à vos pieds.

Perplexe, Morgane se demanda pourquoi Mordred se préoccupait tant à vouloir à s’en prendre à Merlin ? Certes, ce valet était loyal à son frère comme un chien à son maître, et Merlin pouvait se montrer gênant, parfois mais pas dangereux. Non, c’était un ami déloyal, un traitre.

Jamais, elle n’oublierait qu’il avait essayé de l’empoisonner. Les lèvres peintes en noir de Morgane ébauchèrent un semblant de sourire.

Maintenant, Merlin, ça vient de commencer ! , se dit-elle, intérieurement.


crystal14  (10.01.2014 à 07:14)

                                                                  Chapitre 6 :

 

Le lendemain, en fin de matinée, Merlin entrebâilla la porte et passa prudemment sa tête brune, inspectant méticuleusement la chambre d’Arthur. N’apercevant rien de suspect, il s’avança d’un pas tout confiant. Le jeune valet plaqua ses mains sur sa chevelure devant l’incroyable désordre. Il soupira devant l’ampleur du travail. Pour sûr, Arthur n’avait pas apprécié sa plaisanterie d’hier soir. L’humour n’était pas son fort. Rien que d’y penser, le visage du jeune sorcier rayonna.

Comme chaque soir, Merlin devait impérativement lui préparer son lit, vérifié que tout était en ordre avant d’aller lui-même se coucher. Arthur s’était glissé dans ses draps lorsqu’il s’était aperçu que son ami dissimulait quelque chose sous sa chemise.

  • Oh ! J’allais complétement oublier, lui avait dit Merlin en déroulant la corde autour de sa taille.

  • Que…Qu’as-tu l’intention de faire avec ça ? T’entrainer à sauter à la corde ? avait demandé le prince, goguenard.

    Assis au bord de son lit, Arthur avait contemplé le jeune serviteur s’empêtrer avec la corde. Ce spectacle avait déclenché une hilarité chez l’héritier. Vexé, Merlin avait réussi tant bien que mal à s’extraire de l’enchevêtrement de cette corde.

  • Sérieusement, Merlin. Que vas-tu faire avec cette corde ?, l’avait-il regardé avant de pouffer, Te pendre ? avait-il supposé, contenant à peine son hilarité.

  • Pas du tout. C’est pour vous ! avait répliqué le jeune sorcier, sereinement.

  • Pour moi ?! Et pourquoi donc, je te prie ? avait-il hoqueté, déconcerté.

  • Chaque jour, je range votre chambre et chaque matin, je la retrouve dans un désordre innommable. Et je connais maintenant la raison. Vous êtes somnambule ! Vous savez que vous pouvez compter sur moi pour trouver un remède face à cette fâcheuse maladie.

    Durant l’explication de Merlin, Arthur était resté coi, suivant de son regard éberlué son traitre d’ami en train de nouer la corde sur l’une des colonnes de son lit.

  • En vous attachant, je retrouverai votre chambre impeccablement propre et bien rangée, avait poursuivi le serviteur en contournant le lit pour continuer l’opération sur l’autre colonne.

    Merlin avait jeté un regard dans sa direction. Le tableau était magnifique. Arthur, les bras croisés sur son torse, son visage fermé et son regard assombri lui avait indiqué que le jeu devait s’achever. Dommage, Merlin aurait bien eu envie de l’attacher véritablement. Que ne ferait-il pas pour ne pas ranger cette chambre ?

  • Pas de corde ? , avait-il deviné en faisant la moue.

    Arthur avait secoué la tête blonde tandis que Merlin s’ingéniait à dénouer la corde.

  • C’était pour votre sécurité. Un jour, enfin une nuit, vous allez vous blesser. Et vous penserez que votre humble serviteur avait la solution à votre problème, avait-il expliqué en se dirigeant vers la porte, la corde à la main.

  • Merlin. (Ce dernier s’était retourné sur ses gardes) Bonne nuit et à demain ! lui avait-il lancé avec un demi-sourire.

    Ce matin, Merlin comprit pourquoi il n’avait pas lancé un objet quelconque sur lui ou aboyé sur lui. Le prince s’était vengé lâchement. Il avait sorti les vêtements de l’armoire et les avait disséminés un peu partout dans la chambre. Les draps du lit trainaient sur le sol, au coin. Un tapis de cendres était entassé sous la table. Tout ce qu’il se trouvait sur son bureau avait atterri sur le plancher. L’eau de la cruche s’était répandue sur la table dont une partie du liquide avait formé une flaque sur le sol.

    Le jeune homme ferma un instant les yeux pour effacer ce lieu cauchemardesque. Quand il les rouvrit rien n’avait disparu ! Hélas !

    Je vais vraiment le tuer ! pensa le jeune valet, découragé.

    En dépit de ce grand fouillis, Merlin se dépêcha de mettre de l’ordre dans la chambre d’Arthur avant que ce dernier ne surgisse en beuglant si par malheur il n’avait pas encore terminé sa tâche ménagère. Il semblerait qu’aujourd’hui, Arthur se soit ingénié à ne lui laisser aucun répit de la journée.

    Au bout de quelques minutes, il observa la pièce encore parsemée divers choses. Jamais, il n’aurait le temps d’achever son travail. Une idée lui traversa la tête mais la petite voix de Gaius lui résonna dans sa tête. Ne t’avise surtout pas….! Tout en souriant, le jeune sorcier se ravisa et rassembla le surplus de linge et d’assiettes sales et les fourra sous le lit. Demain, il les enlèverait. De toute manière, ce crétin n'y verrait que du feu.

  • Que fais-tu sous le lit ? demanda une voix, au loin.

    Merlin reconnut sans peine le propriétaire cette voix. Il posa son menton sur ses mains à plat sur le plancher poussiéreux. Il ferma les yeux en réalisant ce qui aurait pu arriver si Arthur l'avait vu se servir de sa magie. Lorsqu’il les rouvrit, le jeune sorcier distingua les bottes du prince qui approchait de son lit. Il les examina et constata en son for intérieur qu’elles avaient besoin d’être cirées. La tête brune du jeune sorcier se redressa et se cogna sur le sommier. Pas si crétin que ça, finalement ! Tant pis pour moi ! pensa Merlin en se relevant et se massant le cuir chevelu.

  • Je nettoie votre chambre et le sol avait besoin d’être nettoyé, répliqua-t-il sans se démonter.

  • Et tu fais office de serpillière ! J’ignorais que tu avais un sens inné de la propreté, Merlin !

    D’un air malicieux, le jeune sorcier jeta un coup d’œil circulaire autour de lui. Très satisfait, il croisa le regard courroucé de son ami royal.

  • Je vous croyais à l’entrainement avec vos chevaliers ! dit-il, pour changer de sujet.

     

  • Je l’ai décalé en milieu de l’après-midi. Je ne voulais pas que tu rates un tel moment.

     

  • Oh ! je suis flatté de l’attention que vous m’accordez, mon seigneur ! Mon pauvre cœur ne résistera pas à tant de bonté de votre part ! ironisa le jeune valet en se frottant les mains sur son pantalon.

     

  • Avant que ton cœur ne défaille …. de bonheur, dépêche-toi d’enlever ce que tu as caché sous mon lit ! Et rejoins-moi sur le terrain, je t’ai réservé un exercice mémorable, ajouta-t-il en pressant légèrement son épaule avec un large sourire.

Sur ces dernières paroles, Arthur quitta ses appartements.

  • Je pourrais employer mon temps libre à faire autre chose si vous ne passiez pas votre temps à laisser trainer vos affaires n’importe tout ! souligna l’assistant de Gaius.

    La mâchoire d’Arthur se crispa à ces paroles.

  • Cesse de geindre comme une fillette !

  • Je vais finir par mourir d’épuisement !, marmonna –t-il sous sa barbe sans se douter, un seul instant, que ses paroles avaient affecté le cœur du jeune prince  héritier.

  • Ne me donne pas cette fausse joie, Merlin ! , répliqua son ami sur un ton faussement joyeux.

Si seulement les rôles étaient inversés ! Arthur ! Effectuer ses corvées ! Merlin eut un petit rire moqueur. Son ami ne tiendrait pas une heure ! Non, il exagérait disons …cinq minutes ! Qu’est-ce qu’il ne donnerait pas pour une heure de tranquillité!

  • Tu es déjà en retard ! entendit-il crier Arthur dans le couloir.

    Soufflant, le jeune valet rejoignit Arthur pour une série d’entrainement auquelle il aurait bien aimé échapper. Incontestablement, il allait passer un sale quart d’heure.

                                                                                *****

    De gros nuages sombres se profilèrent à l’horizon, cachant partiellement le soleil. Brièvement, l’absence de l’astre rafraichit l’atmosphère du royaume. Cependant le changement climatique n'empêcha nullement Arthur de tournoyer son épée au-devant de lui, prêt à attaquer son adversaire. Sur le terrain d’entrainement, les chevaliers de Camelot observèrent avec une sincère compassion la cible mobile portant une armure qu’Arthur s’apprêtait à combattre énergiquement.

    Après quelques coups bien placés, celui-ci tomba rudement sur le sol herbeux. Le bruit métallique que provoqua l’armure sous le poids humain finit par avoir raison de l’impatience d’Arthur.

  •  Quand tu auras fini de te reposer. On pourrait peut-être reprendre ! 

Sous le casque, Merlin maugréa. Il aurait voulu ôter ce casque et tout cet attirail tant il étouffait à l’intérieur. Qu’est- ce qu’il ne fallait pas faire pour accomplir son destin !

Depuis des semaines, Arthur n’avait de cesse de s’entrainer. Pour ce dernier, il était capital de se préparer à la prochaine confrontation avec Morgane. Quand, je pense que j’ai la possibilité d’y mettre un terme par un simple mot magique, ironisa le jeune sorcier intérieurement. Pour l’heure, sa gorge était en feu.

  • Vous n’avez pas soif après cette activité physique, sire ?, se hasarda-t-il de dire.

  • Merlin, (Arthur pointa le bout de son épée sur le casque de Merlin) il faut que tu comprennes pour le cas où ta mémoire te ferait défaut - à condition que tu possèdes un cerveau - qu’il faut que je me tienne prêt lorsque Morgane décidera de reprendre les hostilités. Et ce n’est pas en m’abreuvant de cidre ou d’hydromel comme tu sais si bien le faire avec Sir Gauvain que je pourrais l’affronter, finit-il de dire en reprenant sa place.

En entendant son nom, le chevalier afficha un large sourire puis il se saisit de sa gourde, avalant une gorgée d’eau bien fraiche tandis qu’Arthur attendit patiemment que son serviteur se stabilise sur ses pieds. Etouffant l’envie irrépressible de boire, Merlin tenta de se relever mais le poids de l’armure rendait la chose difficile.

  •  Merlin, tu pourrais faire un effort et t’abstenir de tomber à chaque fois que je t’assène de mon épée. (Merlin réussit à se relever) Bon, cette fois, essaye de tenir un peu plus longtemps. Je commence à peine à …m’échauffer ! 

Arthur s’écarta en souriant, satisfait de son jeu de mot associé avec le temps chaud en cette fin de printemps mais reconnut que Merlin avait raison. Il avait soif ! Le prince de Camelot leva les yeux vers l’astre du jour qui déclinait dans ce ciel chargé de nuage gris. Arthur jeta un coup d’œil envieux vers Sir Gauvain qui portait le goulot à sa bouche.

A peine son épée toucha l’armure de Merlin que celui-ci s’écroula lourdement sur le sol avec un fracas assourdissant. Arthur écarta ses bras en signe de désespoir.

  •  Tu es vraiment le serviteur… 

  •  …..le plus idiot des cinq royaumes. Je le sais, dit-il en tentant mais en vain de se relever.  Ce n’est pas ce que vous disiez il y a quelques mois autour de la Table ronde, marmonna-t-il.

Arthur feignit de n’avoir rien entendu. En son for intérieur, il riait de voir Merlin s’empêtrer dans son armure. Quand il serait roi, il pourrait l’engager comme bouffon, pensa-t-il en souriant sous cape. L’image de Merlin portant le bonnet avec des breloques tintant à chaque fois qu’il tomberait faillit le faire éclater de rire. Son humeur s’assombrit aussitôt. Merlin serait-il encore présent quand il deviendrait roi de Camelot ? L’héritier au trône se retourna vers Merlin toujours allongé sur le sol en train de se débattre avec son attirail.

  • Quand tu auras fini de t’amuser, n’oublie d’aller récupérer mon cheval ! ordonna-t-il en fourrant son épée dans son fourreau.

     

  • Amuser est un euphémisme ! Comme si se faire taper dessus était un amusement !, lança-t-il, ironique. Sire, attendez-moi ! s’écria-t-il d’un coup en remarquant Arthur s’éloigner.

Ce dernier revint sur ses pas, s’approchant du pantin en ferraille et s’accroupit, relevant la visière du casque et capta le regard médusé de Merlin.

  • Merlin, il y a certaines choses que je dois faire seul, tu comprends ? expliqua-t-il, à voix basse afin que Gauvain trop proche d’eux ne l’entende.

     

  • Vous ne savez rien faire tout seul alors, c’est quoi cette chose ? répliqua le jeune serviteur sur le même ton.

     

  • On ne peut pas dire que tu brilles par ton intelligence. C’est un endroit où tu ne peux pas m’accompagner. C’est assez lumineux pour toi, Merlin ?

Il y eut quelques secondes de silence où Arthur appuya son regard ironique sur son abruti laquais et saisissant le message, la bouche de Merlin forma un rond. D’un geste autoritaire, le prince de Camelot rabaissa la visière avant qu’il ne prononce un seul mot puis fit demi-tour en direction de la cour d’honneur du château.

  • Et n’oublie pas d’aller récupérer mon cheval chez le maréchal-ferrant ! Demain, nous irons à la chasse, s’écria-t-il avec de disparaitre derrière les remparts du château.

  • Qu’est-ce qu’il s’imagine, que j’irai chercher son cheval chez le boulanger ou chez le fleuriste ?, pesta silencieusement Merlin quand il sentit une pression sur son avant-bras, l’aidant à se remettre sur ses pieds.

    Il enleva le casque avec soulagement. Sir Gauvain maintint son jeune ami et pointa son menton vers Arthur.

  • Notre ami est infatigable. Son envie naturelle t’aura évité un traitement … privilégié, se moqua Sir Gauvain en lui faisant un clin d’œil.

Apparemment, il n’avait pas perdu une miette de la conversation tenue à voix basse. Les deux hommes se fixèrent, une lueur amusée dans leur regard. Ils éclatèrent de rire. Sir Gauvain l’aida à retirer l’armure et Merlin le remercia.

  • Je t‘invite à la Taverne !, lui proposa-t-il en déposant l’armure au sol puis lui tendant la gourde. Le jeune homme apprécia le passage de ce liquide frais descendre dans son gosier.

     

  • Déjà qu’Arthur pense que j’y passe tout mon temps libre alors non merci ! 

     

  • Très bien, je vais devoir demander à Elyan ou à Perceval de m’y accompagner puisque mon seul ami me laisse tomber ! 

Le jeune serviteur lui lança un regard de reproche tandis que Sir Gauvain saisit l’objet ovoïde qu’il approcha à ses lèvres et but quelques gorgées de cette eau insipide. Rien ne vaut l’hydromel ! se dit-il en grimaçant.

  • Je plaisante, Merlin !

    Sir Gauvain donna une tape sur l’épaule de son jeune ami puis entoura de son bras le cou pour lui ébouriffer les cheveux. Ce dernier sourit et se soumit volontiers devant ce geste d’amitié. Soudain, le chevalier le renversa et ils se retrouvèrent dos au sol.

    Merlin demeura ainsi perdu dans ses pensées, plongeant son regard vague dans ce ciel nuageux, les bras le long du corps. Il ferma les paupières, laissant ses pensées vagabonder au gré de leur fantaisie.

    Le jeune sorcier se remémora sa brève rencontre nocturne avec la jeune druidesse au lac d’Avalon. Désormais, il pouvait penser à cette dernière avec sérénité sans que son cœur ne se comprime dans sa poitrine. Une paix indicible l’envahit à cette pensée. Le regard bleu dans le vague, le jeune sorcier eut un sourire serein. Il y avait si longtemps qu’il ne s’était pas senti aussi bien.

    « Jamais je ne quitterai ton cœur mais laisse une place pour une autre qui saura te rendre heureux. »

    Le cœur ne pense pas, il ressent, lui avait-il répondu.

    Cependant, cette phrase éveilla en lui une promesse qu’il lui avait faite. Alors que la raison lui proposait le chemin de la prudence, son cœur, lui, l’avait dévié sur un chemin d'une toute autre nature.

    Sans vraiment le vouloir, le doux visage de Claire s’imposa à lui. Au fur et à mesure que le temps passait, Merlin avait été si accaparé par les corvées de Gaius et d’Arthur que Claire s’était, peu à peu, éloignée de lui sans lui adresser le moindre reproche. Elle comprenait, elle savait. La jeune fille avait agi avec une telle discrétion qu’il sentit une vague de chaleur l’envahir, parcourant son échine étendue à même le sol.

    Leur idylle avait été éphémère suite à la mort de son grand-père. Devant la perte d’un être cher, Merlin lui avait prêté une épaule pour pleurer. De ce jour-là, ni l’un ni l’autre n’avaient évoqué ce moment magique. De leur premier baiser au clair de lune.

    D’ailleurs, de quel droit avait –il osé l’embrasser ? Pourquoi ne l’avait-elle pas repoussé ? Pourtant, jamais, il n’avait ressenti une telle émotion l’envahir. Ce soir-là, quand il avait tenu la main de Claire dans la sienne, il avait senti naitre en lui une force palpable qui l’avait rendu si heureux, si puissant, si invulnérable.

    A certains moments, Merlin s’interrogeait souvent sur ce sentiment que l’on nommait : l’amour ? Pouvait-on le substituer à un autre ? Existait-il plusieurs intensités à ce sentiment ? Quelle était cette mystérieuse alchimie qui donnait l’impression d’aimer une personne plus qu’une autre ? Etait-ce le temps, cette notion qui agit sur ce monde, sur les êtres, qui atténue ou permet d’oublier les évènements tragiques ou le ressenti de la douleur qu'asuscité la disparition d’un être aimé ? Jusqu’à l’oubli ? Comment pouvait-on effacer de la mémoire et du cœur une personne chère qu’on avait aimée, même un court instant ?

    Sans vraiment se l’avouer, Merlin se sentait euphorique après l’avoir vue ou lui avoir parlé. Que lui arrivait-il ? Etait-il vraiment amoureux de Claire ? C’était si différent de ce qu’il avait éprouvé pour la druidesse.

    Des semaines durant, Merlin avait veillé à ses moindres gestes, à chacun de ses mots et paroles afin de ne pas l’embarrasser ou de la brusquer, il s’était promis de ne laisser rien transparaitre devant elle. Et s’il se trompait sur les sentiments de la jeune fille ? Sur les siens ? Non, son cœur l’aurait su tout de suite. Pouvait-il se fier à lui ? Et puis, elle avait cette lueur éclatante dans son regard quand elle le voyait. L’amitié ne suscitait pas un tel éclat étincelant dans un regard amical.

    Aujourd’hui, il ne doutait plus de ce qu’il éprouvait pour elle. Ces deux mois écoulés lui avaient permis de retrouver sa lucidité et de découvrir à quel point il tenait à elle. En fait, la conversation qu’il a eue avec Gaius, hier soir, lui avait confirmé ce qu’il savait déjà. Il ignorait comment aborder le sujet avec elle mais le moment venu, il le saurait. Il suffirait jusque de se laisser guider par son cœur.

    Merlin laissa échapper un soupir, se sentant admirablement bien. Cette sérénité fut de courte durée car la voix moqueuse de Sir Gauvain le ramena au présent.

  •  On n’est pas bien, ici, à ne rien faire ?, déclara-t-il, les bras croisés derrière la nuque.

Merlin s’étira et soupira.

  • Parle pour toi ! J’ai encore des corvées à terminer !  grogna-t-il, en se relevant.

Merlin rassembla les pièces de l’armure. Sir Gauvain se leva d’un coup, sourit au jeune sorcier qui s’apprêtait à partir vers l’armurerie.

  •  Quoi !? demanda le jeune homme en sentant le regard appuyé de Gauvain.

  •  Oh rien ! Ton visage est si rayonnant que j’aurai besoin d’une visière pour me protéger les yeux ! le taquina Sir Gauvain. Si tu as des questions à me poser sur la gente féminine. N’hésites pas, je suis ton homme ! ajouta-il, d’un air sous-entendu.

Le jeune sorcier darda son regard bleu sur le chevalier.

Justement, j’ai besoin d’un conseil.

Quand j’ai aperçu Claire, pour la première fois, mon cœur s’est emballé, ma bouche s’est desséchée et mes mots sont restés parfois coincer au fond de ma gorge !

Combien de fois peut-on tomber amoureux dans une vie ? La première fois, c’était si différent !

J’ai eu l’audace de l’embrasser. Je ne sais pas ce qu’il m’a pris.

La mort de son grand-père, nous a éloignés l’un de l’autre mais ces moments passés, ensemble, dans la bibliothèque à l’aider dans ses recherches, nous a, je crois, rapprochés. Je me sens si bien auprès d’elle.

Je ne voudrais pas perdre son amitié si elle refuse mon affection.

Elle se montre si distante par moment.

Et pour ajouter, un fait important : elle voit l’esprit des morts ! Elle m’a aidé à combattre le chagrin et à communiquer avec mon premier amour.

Qu’en penses-tu, Gauvain ? Que suis-je censé faire ?

Et puis, quelle est ta perception de l’amour, toi qui passe ton temps à courir après les jolies filles ? Comment peux-tu me conseiller à ce sujet ?

Tu vois, des questions, j’en ai, mais c’est des réponses que je désire avoir, Gauvain !

Et pour conclure, la menace de Morgane plane au-dessus de Camelot.

C’était ce que Merlin aurait souhaité partagé avec son ami chevalier.

Toutefois, le regard noisette de Gauvain intercepta une lueur, vague, traverser les yeux de son ami. Instinctivement, le chevalier ressentit que son jeune ami était prêt à lui confier ses tracas mais que quelque chose l’avait retenu. N’avait-il pas confiance en lui ? N'était-il pour le jeune homme qu’un ami au moment des combats et aller prêter secours au prince Arthur ?

Non, Merlin n’était pas comme ces hommes vénaux et calculateurs qu’il avait pu croiser durant sa misérable vie ! Depuis sa rencontre avec lui, Gauvain était devenu un chevalier de Camelot. Un homme respectable aux yeux de tous. Sa vie avait pris un autre tournant. Il avait désormais un but, un objectif, celui de protéger et de servir le prince de Camelot : Arthur.

  • Tu ne devais pas aller à la Taverne ? lui rappela-t-il en détournant le regard.

  • Excellente mémoire, Merlin ! A plus tard ! dit-il en ébouriffant la tête brune du jeune homme. Merlin, je suis là, assura-t-il d’une voix grave et sérieuse.

L’air embarrassé, le jeune homme acquiesça en hochant la tête.

Non loin de là, caché par les remparts, Arthur avait observé la scène. Il enviait la relation entre Sir Gauvain et Merlin. Une amitié sans retenue presque fraternelle s’était installée entre eux. Aucune barrière sociale ne venait l'entraver. Non, il se trompait. L’amitié s’était déjà établie entre Merlin et lui, seulement étant le prince de Camelot, il devait se comporter en tant que tel. Il pouvait laisser sous-entendre ou se permettre certains gestes en présence de son serviteur mais uniquement lorsqu’ils étaient seuls. Tous ses chevaliers éprouvaient sincèrement de l’attachement pour son serviteur. Ce dernier répondait toujours présent pour les aider. Arthur était certain que si une souris était attaquée par un chat, Merlin volerait à son secours, supposa-t- il, le sourire aux lèvres.

Ton amitié n’est rien comparée à l’amour de cette fille !, persifla une petite voix à l’intérieur de sa tête. Le visage d’Arthur se durcit.

Et sous un ciel sombre, le prince de Camelot vit Merlin rassembler les épées puis se diriger vers l’armurerie, un large sourire illuminait son visage anguleux en entendant les éclats de rire du chevalier.

 

                                                                    


crystal14  (17.01.2014 à 09:12)

                                                                     CHAPITRE 7

 

Quand le médecinavait pris connaissance du don particulier de Claire, il avait en secret compulsé pratiquement tous ses ouvrages, cherchant des cas similaires. Il avait été interloqué par cette révélation car selon lui aucun mortel ne pouvait distinguer les morts si on n’était pas soi-même dans le passage de la mort. Il était impensable qu’un être humain ait le don sans posséder de la magie. Pour lui, c’était un mystère.

Le médecin avait fait chou blanc jusqu’à ce qu’il découvre ce qu’il cherchait. Un livre très ancien tombé dans l’oubli quelque part dans ces étagères, pourtant bien ordonnées, traitait dans un court passage du sujet qui avait suscité son intérêt.

Assis confortablement sur la chaise, Gaius parcourait un gros ouvrage. Le visage fermé, ses doigts tournèrent, une par une, les pages épaisses.

Absorbé par sa lecture, Gaius n’entendit pas les coups légers sur la porte.

La porte en bois s’entrouvrit lentement pour laisser le passage à Claire. La jeune fille inspecta la pièce principale et découvrit le médecin de la cour, occupé. Elle toussota afin de signaler sa présence.

-                     Entre donc, Claire ! répondit-il en plaquant sa main sur la page du livre qu’il était en train de consulter.

-                     Gwen m’a dit que vous vous désirez me parler, Gaius.

Le médecin de la Cour lui fit signe de le rejoindre. Les sourcils fins de la jeune fille s’arquèrent puis se froncèrent quand elle s’avança vers le bureau où livres, bougies, feuilles de papiers, l’encrier et la loupe qui permettait au vieil homme de lire les petits caractères de certains livres s’étalaient sur sa surface. Gaius l’invita à s’asseoir à ses côtés.

Le médecin prit une bonne inspiration. Le cœur de la jeune fille battait à la chamade.

-                     Pourquoi ai-je l’impression que je ne vais pas aimer ce que vous allez me dire ? déclara t-elle, en évitant de regarder le livre.

-                     Parce ce que je crois avoir deviné d’où provient ton don !, annonça le vieil homme, sans tergiverser.

-                     Quoi ? , s’exclama-t-elle stupéfaite et heureuse en même temps.

Claire baissa la tête brune et riva ses yeux sur le livre qui contenait la vérité sur son don.

Elle, non plus, n’était pas restée inactive.

A la bibliothèque à l’insu du bibliothécaire et avec l’aide de Merlin, Claire pensait glaner ainsi quelques renseignements sur des personnes qui, comme elle, avait le don d’entrevoir les fantômes. Pour le moment, ses recherches s’étaient avérées infructueuses, cependant la jeune fille ne se décourageait pas.

L’autre jour, elle s’était hasardée à en parler au bibliothécaire. Celui-ci lui avait rétorqué sans ménagement et sur un ton bourru : à moins d’être morts, il ne voyait pas comment les rencontrer. Et quelle idée saugrenue de lui poser une telle question !  S’était-il exclamé sous sa barbe. Claire n’avait pas insisté, surtout que Camelot ne tolérait pas les personnes avec des dons particuliers.

Dans un silence religieux, Gaius lui montra la page concernée. Claire déglutit lentement en frissonnant malgré l’atmosphère ambiante qui régnait dans la pièce. Au-dessus d’eux, la luminosité du jour s’amenuisa, assombrissant la pièce. La jeune fille plissa le front. Elle allait enfin savoir l’origine de ce don si particulier. Claire avait attendu ce moment ardemment mais aujourd’hui elle redoutait de qu’elle allait découvrir. Lentement, Gaius poussa le livre devant elle observant sa réaction.

Soudain, les yeux de Claire imprimèrent sans comprendre l’intitulé du livre. Intriguée, elle laissa glisser ses doigts dont les extrémités devenaient froides, sur la page quand une phrase retint son attention. Elle parcourut les quelques lignes du chapitre et referma brusquement le livre, le souffle coupé.

Abasourdi, l’esprit de la jeune fille naviguait entre rêve et réalité. Plus rien ne semblait existait autour d’elle. Elle ne parvenait pas à donner un nom aux sentiments si contradictoires qui l’envahissaient. Un instant, elle ferma les yeux et le texte qu’elle venait à peine de lire, lui apparut comme si chaque lettre, chaque mot, chaque phrase qui constituait ce texte, étaient imprimés aux fers rouge dans son cerveau.

Le peuple des Sidhes : une race immortelle d’Avalon.

-                      Le peuple des Sidhes sont des maitres de l’enchantement. Des êtres de l’ombre ou de lumière à la fois fascinants et inquiétants. Nul mortel n’en a encore jamais vu jusqu’à ce que la faucheuse l'accompagne aux portes de leur royaume. Les Sidhes se manifestent pour accueillir l’esprit du mortel. On dit que les Sidhes peuvent se rendre invisibles ou intervenir dans les actions des hommes. Ce sont des êtres ailés au corps bleuâtre. Ils sont si véloces que nul œil humain n’arrive à les voir.

Si aucun humain ne pouvait les voir comment était –il possible que l’on sache tant de chose sur ces créatures magiques ? Qui était l’auteur, d’ailleurs ? Un sorcier ? Un druide ? Avait-il utilisé ses pouvoirs pour les voir ? Avait-il survécu à la mort ? Si c’était le cas où était ce…..Hélas, le temps avait fait des ravages sur la couverture du livre. Le nom était effacé, disparu, effacé.

Claire n’aurait su dire depuis combien de temps elle était restée immobile. Refusant catégoriquement ces faits écrits trouvés dans cet ouvrage. C’était un mensonge. Seuls les gens qui étaient à la frontière de la mort pouvaient se vanter de les avoir aperçus.

Le regard lointain, l’esprit tourmenté par l’incertitude d’une vérité qui l’effrayait, Claire sursauta, poussant un petit cri lorsque Gaius posa sa main ridée sur la sienne.

-                     Veux-tu qu’on arrête ?, demanda Gaius, d’une voix rauque.

Incapable de prononcer un mot, Claire secoua la tête sans le regarder.

-                     Ton père appartenait au peuple …des Sidhes. Je présume qu’il était attiré par les êtres humains. A séduit ta mère soit par un sortilège ou par enchantement, continua le médecin. Et tu es le fruit de leur union. C’est un fait très rare néanmoins mais possible. Tu es une personne unique, Claire. Car seuls les sorciers prononçant les incantations à cet effet peuvent appeler les esprits du monde des morts. Le sang de Sidhes coule dans tes veines. Voilà pourquoi tu aperçois les fantômes ! affirma le médecin.

Pour ne pas l’effrayer, Gaius garda pour lui que les Sidhes était un peuple belliqueux et cruel. Qu’ils avaient mis l’une des leur dans le corps d'Elena afin de gouverner le royaume. Il se souvenait de la nuit où Merlin avait tué l’un des Sidhes pour déloger un changelin qui avait possédé la princesse Elena. D’après la description du jeune sorcier, c’était des petits êtres ailés à la peau bleuâtre. Claire était tellement éloignée de cette description physique. Comment était- ce possible ? 

Une boule étreignit la gorge de la jeune fille, luttant contre la frénésie de ses sentiments. Elle étouffa un hurlement, désirant effacer de sa mémoire de tout ce que Gaius avait découvert sur son don.

-                     Comment pouvez-vous être certain de ce que vous avancez ?, souleva-t-elle péniblement se maudissant de son ignorance.

Gaius pointa son doigt sur un dessin. Claire fronça les sourcils et examina la page.

C’était un bijou.

Un pendentif exactement. Machinalement, sa main effleura sa poitrine, saisissant le pendentif orné de pierre bleue opaque. Elle examina le dessin et le compara avec l’original. Aucun doute n’était possible ! C’était la copie conforme du pendentif qu’elle maintenait encore entre ses doigts engourdis et froids. Les yeux embués, Claire ne saisit pas le sens du texte.

Elle secoua la tête et jeta un regard interrogateur à cet homme dont la révélation lui était pénible. Les mots semblaient se déformer dans son cerveau traitant ces informations, leur signification et leur implication sans vraiment en saisir le sens.

-                     Bien que leur loi stipule l’interdiction formelle de s’unir ou de s’ingérer dans la vie des mortels, il est tout de même écrit que lorsque ces créatures ont des enfants illégitimes avec les créatures mortelles dépourvues de magie, le Sidhes se doit de veiller à sa progéniture. Si cet enfant hérite du don, en occurrence pour toi, c’est de voir les esprits des morts, un bijou lui sera destiné afin de le préserver des spectres errants.

Le dessin du bijou et les paroles du médecin de la cour se bousculaient dans sa tête. Nerveusement, Claire tritura le collier maudit. Dire qu’elle croyait le tenir de sa mère. Maintenant que Gaius lui avait lu quel pouvoir posséder ce pendentif, Claire réalisa qu’aucunfantôme n’était venu la hanter depuis qu’elle était en possession de ce mystérieux collier. Brusquement, elle saisit l’importance de cette découverte quand un doute lui traversa l’esprit. Est-ce que son grand-père connaissait l’origine de son don ? Si c’était le cas, alors pourquoi ne lui en avoir rien dit ? Pourquoi avoir attendu ce moment funeste pour lui léguer ce bijou ? Pourquoi lui avoir caché ? Pourquoi lui aurait-il menti durant toutes ces années ? Ces misérables potions n’avaient eu aucun effet et pour cause. Elle était un …..

Un long frisson glacial parcourut son dos.

Soudain, elle écarquilla les yeux. C’était comme si un brouillard s’était volatilisé devant elle. Le lac d’Avalon, Freya, Merlin et l’endroit même où elle et son grand-père se trouvaient ce jour-là, n’étaient pas dû à un hasard. Elle en était certaine. Son grand-père connaissait la vérité, c’était si évident maintenant ! Voilà pourquoi il lui avait légué ce collier ! C’était ce qu’il lui permettait de se protéger des spectres. Alors, pourquoi avoir attendu tant d’années pour le lui donner ? se demanda-t-elle sans cesse.

Elle leva les yeux et son regard indéfinissable croisa celui de Gaius. La jeune fille vit les lèvres, du mentor de Merlin, remuer mais les mots se perdirent à mi-chemin entre elle et lui.

Suffoquant, la jeune fille se leva en plaquant sa main sur la poitrine. La vérité lui éclata en pleine figure. Elle regrettait que Gaius ait atteint le but de ses recherches. La jeune fille ne savait plus qui elle était. D’où elle venait. Elle avait perdu tous ses repères. Claire n’appartenait pas plus à ce monde qu’elle n'appartenait à l’autre qui lui était étranger. Gaius avait tort. Un monstre sommeillait en elle, attendant surement un élément déclencheur qui ferait d’elle une manipulatrice, une simulatrice, une séductrice comme son père l’avait été pour sa mère.

Haletante, Claire saisit toute la portée de son héritage. La jeune fille sentit une envie irrépressible de vomir. Un froid intense enveloppa son corps tremblant. Soudain, elle jeta un regard horrifié dans la direction de la chambre de Merlin. Il allait la haïr, la détester peut-être même la rejeter. Claire plaqua ses mains sur son visage baigné de larmes.

Tout d’un coup, tout devenait limpide. Claire commençait à suffoquer dans cette pièce qu’elle jugeait maintenant exiguë. Elle voulut s’enfuir mais ses jambes refusèrent de bouger. Elle fut prise de vertiges. Tout vacillait autour d’elle avant que l’obscurité l’engloutisse dans ses entrailles.


crystal14  (24.01.2014 à 07:38)

                                                          Chapitre 8

 

Merlin détestait la chasse, contrairement à Arthur qui s’exaltait devant le gibier à abattre. Toute la matinée, ils avaient été à l’affut du moindre craquement de branches, à guetter un éventuel animal caché dans les buissons ou des terriers. A pas de loup, ils avaient traversé une partie de la forêt à la recherche d’éventuelles proies. Patiemment, Merlin avait bravé l’humeur massacrante d’Arthur   pour revenir finalement bredouilles, au grand désarroi pour l’un et à la grande satisfaction pour l’autre.

Sur le retour, le cheval de Merlin trotta tranquillement au côté de celui d’Arthur. Le paysage défilait sur leur passage. Le jeune sorcier percevait, entre les arbres, le soleil qui parfois se cachait derrière les nuages poussés par un vent du nord. Le corps du jeunesorcier sautillait au rythme de sa monture. S’il n’avait tenu qu’à lui, le jeune magicien aurait poussé son cheval au galop pour rejoindre Claire.

La veille, Gaius lui avait raconté dans les moindres détails ce qui s’était passé. Claire avait perdu connaissance suite à la découverte de l’origine de son don. Le médecin de la Cour lui avait administré un calmant pour l’apaiser tandis que Merlin avait veillé sur elle une partie de la nuit. Elle, sur son lit, lui, à même le sol.

Claire une Sidhe !

Les traits de son visage ovale exprimaient tant de bonté, de chaleur, de spontanéité que le jeune magicien avait dû mal à croire et à imaginer qu’elle appartenait à ce peuple avide de pouvoirs et belliqueux. Merlin avait eu l’occasion d’en faire les frais à deux reprises.

Rien dans l’attitude de la jeune fille n’éveillait une appartenance avec les Sidhes. Claire avait hérité de l’apparence humaine de sa mère. Mais son caractère et son comportement étaient à l’opposé de ce peuple. Elle était la douceur même, altruiste, avenante.

Merlin n’avait pas compris pourquoi le grand-père de Claire était venu à Camelot au risque d’exposer la vie de sa petite-fille. Son don aurait pu la conduire au bucher ! Le jeune homme avait frémi à cette pensée. Car même si Uther était dans l’impossibilité de prendre des décisions, Arthur, lui en revanche n’aurait pas hésité à la condamner. Le prince demeurait réticent et réfractaire sur tout ce qui touchait de loin ou de près à la magie.

Au milieu de la nuit, une douce chaleur l’avait inondé, apaisante. Il en avait ressenti un bien-être. Quelle était cette douce lumière qui s’était étendue autour de lui ? Dans cette lueur intense et réconfortante, il s’était abandonné totalement. Une voix féminine l’avait appelé, l’avait attiré vers cette frontière impalpable du monde des rêves au monde réel. Il avait perçu tant d’angoisse, de désespoir mais aussi de …. l’amour !

Cette sensation de bien-être demeurait encore en lui lorsqu’il avait ouvert lentement les yeux. La seule pensée qui avait dominé son esprit était : comment retrouver cette plénitude ? Un court instant, il avait cru reconnaitre cette voix .Tendant la tête, Merlin avait jeté un coup d’œil vers sa jeune amie endormie. Au même moment, son regard avait accroché une lueur étrange sous le lit, qui l’avait, apparemment, réveillé.

Cela n’avait pas été un rêve !

Alors, Merlin avait saisi un objet oblong, enveloppé d’un tissu qu'il avait ôté. C’était le bâton de Sophia dont une lueur bleuté avait palpité à son extrémité. Puis, il s’était redressé pour constater que le pendentif émettait également la même lueur. Elles s’étaient s’intensifiées puis avaient baissé de luminosité pour reprendre de plus belle. D’une même pulsion, les deux lueurs s’étaient mises au diapason.

Soudain, il avait tressailli en entendant un son mélodieux au creux de son oreille. Cela n’avait duré que quelques secondes. Le jeune sorcier avait alterné son regard intrigué, entre le pendentif, le bâton et Claire.

Le point commun : le peuple des Sidhes.

Quand il avait voulu toucher le pendentif, les lueurs s’étaient éteintes subitement.

Merlin avait passé la nuit à réfléchir, assis sur le tabouret en veillant sur la jeune fille.

Ce matin, Merlin avait passé sous silence cet incident à Gaius. Il lui fallait du temps pour réfléchir. Et la chasse ne l’avait guère aidé.

Au passage des deux cavaliers, une vingtaine d’oiseaux prirent leur envol, laissant indifférent le jeune serviteur. Le visage, impénétrable. Le regard perdu dans le lointain. Merlin n’entendait ni ne voyait ce qui l’entourait, percevant à peine son cheval s’ébrouer d’impatience car inconsciemment, il tirait sur les rênes, indiquant à sa monture de ralentir.

Toutes à ses pensées, Merlin n’entendit pas Arthur lui adresser la parole. Irrité, le blond lui donna un coup de poing  à l’épaule.

-                     Eh, ça fait mal ! , protesta le jeune sorcier.

-                     Je suis ravi de t’entendre. Je croyais que tu boudais ! 

-                     Ma voix vous manque-t-elle à ce point, Sire ?

-                     Je me demandais simplement pourquoi ce silence alors que d’habitude tu n’arrêtes pas de piailler ! 

Le brunjeta un regard furtif à son prince, une lueur amusée dans ses yeux bleus.

-                      Justement, je pensais vous êtes agréable en gardant ma bouche close mais si vous souhaitez, on peut parler du temps, du travail que vous allez me donner à faire en arrivant, les avancées sur les travaux du château, de la pluie qui arrive, la préparation du prochain tournoi, le menu de ce soir, la santé de vos chiens, de vos…… 

A n’en pas douter, Merlin lui mentait. Soucieux, le prince prêta une oreille distraite aux flots de paroles que débitait son serviteur. Comment aborder le sujet qui préoccupait ses pensées ? De quoi avait-il peur ?  

-                     Merlin ? 

-                     Oui, sire. 

-                      Tais-toi ! 

-                     Mais vous disiez à l’inst….. 

Oui, je sais. Ne m’écoute pas. Je voudrais tant te parler, en ami, de cette fille qui occupe tes pensées comme tu l’as fait avec moi pour Gwen. Seulement, je crains d’être désagréable, d’être moqueur. J’ai peur de ce que tu vas me dire. Si elle te le demandait, me quitterais-tu pour vivre ailleurs qu’à Camelot ? Je suis sincèrement heureux pour toi, n’en doute pas ! Mais depuis quelques temps, tes pensées sont dirigées vers elle. Tu n’es plus avec moi. Tu es là sans vraiment l’être. Si tu pouvais lire dans mes pensées, tu y verrais du désordre. Des questions auxquelles je ne souhaite pas de réponses se bousculent dans ma tête. Je redoute le jour où…. Oh et puis ! Que m’importe après tout ! Tu es libre ! Je me moque de tes états d’âmes. Je suis un prince. J’ai des affaires bien plus importantes qui attirent mon attention, pensait Arthur sur le moment.

-                     La ferme !  lança le prince plus pour lui-même que pour son serviteur.

Agacé, Arthur accéléra l’allure de sa monture, s’éloignant un peu de Merlin. Ce dernier haussa ses épaules et marmonna :

-                      Quand je me tais, il veut que je parle et quand je parle, il veut que je me taise. Franchement, il faut savoir !  

Durant le trajet du retour, Arthur ne desserra pas les dents, et ce, malgré les nombreuses tentatives du jeune brun à reprendre la conversation. En pensant que son ami royal se préoccupait de l’avenir de son royaume, Merlin finit par respecter le silence imposé par le blond.

A la vue du château, les cavaliers poussèrent leur cheval au galop, passèrent sur le pont-levis et se dirigèrent vers la cour d’honneur du palais. Merlin descendit de sa monture, s’emparant des rênes des chevaux pour les emmener dans l’écurie afin d’être pansés et nourris.

Plus tard, Merlin gravit les escaliers et fila tout droit vers les appartements du prince Arthur.

Sous le regard observateur de l’héritier du trône, son serviteur rangea les chemises propres et repassées dans l’armoire.

-                     Ca y est. Tu as fini ?,   lui demanda le jeune prince en claquant des mains.

Etonné, Merlin suspendit un instant son rangement. Il leva la tête et l’inspecta du regard. Heureux de constater qu’Arthur était, enfin, sorti de son mutisme, le jeune sorcier sourit.

-                     Non, pourquoi ?

Le prince soupira .

-                     Outre ta médiocrité à la chasse, tu te montres, maintenant, d’une extrême lenteur. Et contrairement à toi, j’ai du travail qui m’attend, se plaignit Arthur en l’accompagnant jusqu’à la porte.

-                     Vous me donnez du temps libre?, s’exclama le jeune sorcier, le visage radieux.

-                     L’espoir fait rêver ! répliqua Arthur en poussant son serviteur vers la sortie. Vaque à tes occupations habituelles ! ordonna son ami royal en lui claquant la porte au nez.

Hébété, Merlin se trouva dans le couloir les chemises sur les bras. Un instant, il crut à une plaisanterie. Comme si lui, Merlin, pouvait l’empêcher de faire son devoir, pensa-t-il, en levant les yeux au ciel alors que la porte se rouvrit sur Arthur.

-                     Tu as raison, Merlin. Quelques heures sans toi me permettront d’avancer dans mes papiers, ajouta-t-il en lui prenant les chemises.

-                     Mais….

-                     Quoi ? Tu refuses !? s’étonna faussement le prince à Arthur en haussant ses larges épaules. Comme tu voudras ! Inutile de te rappeler ce que tu dois faire ?

Le jeune sorcier n’eut pas l’occasion de répondre qu’Arthur lui lança un large sourire éclatant avant de refermer la porte en bois. Bouche bée, Merlin pointa son doigt vers la porte fermée.

                                                                       *********

Merlin attendit la tombée de la nuit pour pénétrer dans la bibliothèque. Après avoir jeté un coup d’œil vers le bureau vide de Georges de Monmouth, le jeune sorcier s’engagea dans le long couloir, mal éclairé, vérifiant chaque rayonnage.

Il commença à douter lorsqu’il perçut une lueur orangée qui lui indiquait la présence de la jeune fille. Effectivement, Merlin la trouva, assisse, à l’angle du mur, les bras tenant ses genoux pliés. Son regard semblait être hypnotisé par la flamme de la bougie. Elle sursauta, poussant un petit cri. Elle releva la tête vers le jeune sorcier et plaqua sa main sur la poitrine.

-                     Désolé ! Je ne voulais pas te faire peur, s’excusa-t-il en s’asseyant auprès d’elle.

Merlin se rembrunit lorsqu’elle s’écarta légèrement de lui. Claire enfouit sa main sous son tablier et en sortit le livre maudit. Merlin reconnut le livre de Gaius. Elle fixa longuement ce volume, ensuite elle effleura du bout des doigts le rebord du livre. Elle parcourut les pages, laissant glisser ses yeux jusqu’au chapitre qui l’avait bouleversée, la veille : Le peuple des Sidhes : une race immortelle d’Avalon. C’était le lieu où elle avait rencontré le fantôme de Freya.

Merlin respecta son silence attendant patiemment ses questions.

La veille, quand Gaius lui avait dévoilé ses origines, la nouvelle l’avait ébranlée. Elle avait passé la nuit dans la chambre de Merlin. Elle était reconnaissante au jeune sorcier d’avoir veillé sur elle toute la nuit. La jeune fille avait dû rassurer son amie, Gwen, venu s’assurer sur son état de santé.

Seule, elle eut tout le temps de réfléchir de ce qu’il lui arrivait pendant que Merlin était parti chasser avec le prince Arthur.

Le choc passé, elle était disposée à discuter. Claire était heureuse que ce soit avec son ami, le sorcier. Qui mieux que lui pouvait la comprendre ?

-                     Que sais-tu des Sidhes ?, lui demanda-t-elle en lui passant le livre de Gaius.

Merlin survola les lignes du paragraphe qui concernait le sujet. Son regard océan capta celui de la jeune fille qui le fixait. Il lui sourit et répondit sans détour.

-                     Je sais ce que Gaius m’en a appris. Que c’est un peuple de fées qui vit au lac d’Avalon. Ils demeurent invisibles aux humains jusqu’à ce qu’ils soient aux portes de la mort. C’est un passage obligatoire avant la mort. J’ignore tout de leur sujet et de leurs coutumes, reprit le jeune sorcier. Et tu as hérité ce don très particulier grâce à ton père. C’est ce qui fait de toi un être unique. Gaius dit que les sorciers ont besoin d’incantations pour faire apparaitre un fantôme, continua-t-il,guettant sa réaction. Pour toi, c’est eux qui viennent vers toi.

Sans sourciller, la jeune fille l’écouta attentivement sans l’interrompre, manipulant le collier. Pourquoi avoir attendu ce moment funeste pour lui léguer ce bijou ? Si ce collier avait appartenu à sa défunte mère, pourquoi lui avoir caché ? Un doute lui traversa son esprit. Son grand-père connaissait-il l’origine de son don ? Si c’était le cas, alors pourquoi ne lui en avoir rien dit ? Surtout, pourquoi étaient-ils venus à Camelot ?

Claire posa sa main sur l’avant-bras de Merlin et s’adossa sur le rayonnage de livres. Elle fixa le plafond sans vraiment le voir. Claire avait un aspect humain mais un monstre invisible sommeillait en elle, ne cessait de penser la jeune fille. Freya connaissait-elle sa véritable origine ? Si oui, pourquoi ne lui avoir rien dit ? Avait-elle seulement le droit ?

-                     Je suis …un monstre, affirma-t-elle, la gorge nouée.

-                     Non, je t’interdis de penser ça, tu m’entends ? réprimanda le jeune sorcier, d’une voix douce avec une pointe de fermeté. Aucun don n’est dû au hasard. Qu’il soit né de magie ou pas.

Le soutien de Merlin lui fit le plus grand bien. Il n’avait aucun préjugé à son égard, comme si son ami semblait trouver cette situation tout à fait normale. Elle, qui avait craint une seconde le contraire, se sentit apaisée. Les larmes aux yeux, la jeune fille sonda son regard d’un bleu profond et n’y décela aucun dégout ou d’horreur mais plutôt de la douceur et…

Surmontant l’émoi qu’elle éveillait en lui, le jeune sorcier s’approcha d’elle, tendant la main vers son visage, effaçant une larme qui glissait sur sa joue.

-                     C’est la première que fois que je rencontre une Sidhes aussi jolie, souffla le jeune sorcier.

-                     Il est facile d’imaginer l’aspect physique d’une créature que l’on n’a jamais vue, dit-elle à voix basse.

Merlin lui sourit se gardant de lui révéler qu’il avait eu l’occasion de les apercevoir. Il n’était pas nécessaire de l’inquiéter inutilement.

Quand la tête brune de Claire se laissa aller sur son épaule, Merlin déglutit, écoutant son cœur s’emballer à ce contact. Il n’osa plus bouger de peur qu’elle retire sa tête. Merlin trouva inopportun de lui parler de ce qu’il avait sur le cœur. Il jugea préférable de lui laisser le temps d’assimiler cette nouvelle.

Soudain, un bruit résonna dans la bibliothèque. Merlin et son amie se consultèrent du regard. Claire se leva d’un bond, aussitôt imité par Merlin. Tandis que la jeune fille enjambait la pile de livres et soufflait sur la bougie, Merlin passa sa tête pour vérifier si le couloir était libre. Les rayons de lune traversèrent les lucarnes, déchirant la pénombre qui couvrait le couloir. Un toussotement leur parvint, résonnant dans la vaste bibliothèque.

-                     Il va falloir trouver une bonne explication pour justifier notre présence tardive dans ce lieu, murmura Claire à l’oreille du jeune sorcier.

Le souffle de Claire provoqua un long frisson dans le dos de Merlin. La main de la jeune fille appuyée sur son épaule, il tourna la tête dans sa direction. Dans la pénombre, il distingua le contour de son visage ovale, si proche du sien qu’il pouvait….

Troublé, Merlin bénit l’obscurité.

-                     Un tour de magie ? , lui proposa-t-il, à voix basse.

Claire n’eut pas le temps de lui répondre qu’il lui saisit la main et la traina derrière lui. Sur la pointe des pieds, ils avancèrent silencieusement. Geoffrey de Monmouth consultait des parchemins quand Merlin prononça une formule magique. Soudain, la tête du pauvre homme s’écroula sur la table parmi ses parchemins. Fixant le vieil homme, Merlin et Claire passèrent devant lui d’un pas rapide puis ils coururent jusqu’à la cour d’honneur.

Tenant toujours la main de Claire, Merlin pouffait. Le rire du jeune sorcier était communicatif. Essoufflée par la course, Claire s’assura que personne ne pouvait les entendre.

-                     Très utile d’avoir un ami sorcier pour se sortir de l’impasse, murmura la jeune fille.

-                     Ravie de te rendre service, jeune demoiselle, répondit le jeune magicien en s’inclinant devant elle.

Dans la cour d’honneur, baignée par la clarté de la lune, le jeune sorcier suivit le regard de la jeune fille, s’arrêtant sur leurs mains jointes,puis s’approchant de lui lentement, elle plongea son regard émeraude dansle sien. Le cœur battant la chamade, il retint son souffle quand elle vint se blottir dans ses bras, sa tête se posant sur son torse. A ce contact, une onde de chaleur se diffusa dans tout son corps. Leurs mains toujours unies, le jeune sorcier laissa la jeune fille les ramener sur son cœur, affolé. Il pouvait sentir son souffle sur ses doigts. Merlin tenta de contrôler sa respiration mais les battements de son cœur tambourinaient furieusement dans sa poitrine, l’obligeant à ouvrir sa bouche pour inhaler de l’air. Surpris par cet élan, Merlin hésita un bref instant, entendant presque la voix de Gaius lui conseiller :

Quand, il est donné à l’un des sorciers la chance de rencontrer l’âme sœur, il se doit de la saisir. Trouver une partenaire qui partage son secret est une chose qui se produit rarement une deuxième fois. Ne rejette pas ce que la vie te donne par peur de souffrir. Dans l’adversité, la douleur tout comme la félicité, nous font avancer. C’est parfois injuste mais ainsi va la vie !

Alors, Merlin plaqua sa joue sur la tête de la jeune fille et l’étreignit avec une extrême douceur. Il ferma les yeux, sentant l’effluve de rose qui émanait de sa chevelure. Instinctivement, le jeune sorcier serra délicatement la main de Claire qui répondit à la pression de ses doigts. L’espace d’un instant, une paix indicible l’envahit. C’était comme s’il se chargeait en énergie. C’était magique !

-                     Ne crains-tu pas que mon côté Sidhes? , murmura -t- elle, tourmentée malgré elle.

De sa main libre, le jeune homme emprisonna le menton de sa bien-aimée. Il plongea son regard dans le sien envahit de doute. Les lèvres de Claire s’entrouvrirent légèrement quand la tete brune de  Merlin se pencha vers elle.

Soudain, un claquement sec d’une fenêtre rompit le charme, provoquant la séparation des deux jeunes gens. Encore étourdis par leur étreinte, Merlin et Claire s’efforcèrent de reprendre une contenance habituelle. A contrecœur, Merlin lâcha la main de la jeune fille qui recula d’un pas.

L’instant d’après, ils se quittèrent à regret. L’un se dirigeant vers les appartements du prince de Camelot et l’autre chez elle. Le regard du magicien s’attacha sur la silhouette élancée de son amie jusqu’à ce qu’elle disparaisse vers la ville basse.

Le cœur gonflait de joie, il souriait.

                                                                                


crystal14  (31.01.2014 à 09:38)

Ne manque pas...

Rejoins l'équipe HypnoCheck pour vérifier les informations des épisodes de la citadelle.
L'équipe HypnoCheck recrute ! | En savoir plus

L'équipe HypnoDiff, chargée de la saisie des synopsis et des news diffusions, recrute.
L'équipe HypnoDiff recrute ! | Plus d'infos

Le nouveau numéro d'HypnoMag est disponible !
HypnoMag | Lire le nouveau numéro !

Alternative Awards : À vos nominés
Alternative Awards | On compte sur vous !

Activité récente
Dernières audiences
Logo de la chaîne TF1

Les bracelets rouges (2017), S05E04
Lundi 22 avril à 22:15
2.44m / 15.2% (Part)

Logo de la chaîne TF1

Les bracelets rouges (2017), S05E03
Lundi 22 avril à 21:10
2.75m / 13.5% (Part)

Logo de la chaîne France 2

Death In Paradise, S13E05
Lundi 22 avril à 21:10
3.89m / 19.2% (Part)

Logo de la chaîne France 2

Un si grand Soleil, S06E156
Lundi 22 avril à 20:45
3.53m / 16.4% (Part)

Logo de la chaîne TF1

Demain nous appartient, S07E170
Lundi 22 avril à 19:15
2.47m / 15.2% (Part)

Logo de la chaîne France 3

Hudson & Rex, S05E12
Dimanche 21 avril à 23:15
0.92m / 11.5% (Part)

Logo de la chaîne France 3

Hudson & Rex, S05E11
Dimanche 21 avril à 22:30
1.46m / 10.6% (Part)

Logo de la chaîne France 3

Hudson & Rex, S05E10
Dimanche 21 avril à 21:50
2.10m / 11.6% (Part)

Toutes les audiences

Actualités
ITV offre une quatorzième et dernière saison à sa dramatique Vera

ITV offre une quatorzième et dernière saison à sa dramatique Vera
Après quatorze années de bons et loyaux services, Vera s'apprête à quitter les écrans anglais. La...

Au programme de ce mardi

Au programme de ce mardi
Les options sont diverses à l'horaire de ce mardi 23 avril.  Du côté des diffuseurs anglophones, il...

Au programme de ce lundi

Au programme de ce lundi
Ce lundi 22 avril débute une nouvelle semaine riche en rebondissements sur les écrans, des deux...

Fin de parcours pour CSI : Vegas et So Help Me Todd annulées par la CBS

Fin de parcours pour CSI : Vegas et So Help Me Todd annulées par la CBS
Cela flottait dans l'air depuis quelques jours, la sentence est tombée comme un couperet : CSI :...

Au programme de ce week-end

Au programme de ce week-end
Enfin, c'est la fin de semaine! La passerez-vous devant vos écrans? Si oui, il y a des options...

HypnoRooms

Supersympa, 16.04.2024 à 14:31

Bonjour à tous ! Nouveau survivor sur le quartier Person of Interest ayant pour thème l'équipe de Washington (saison 5) de la Machine.

choup37, 18.04.2024 à 08:49

5 participants prennent part actuellement à la chasse aux gobelins sur doctor who, y aura-t-il un sixième?

chrismaz66, 18.04.2024 à 11:04

Choup tu as 3 joueurs de plus que moi!! Kaamelott est en animation, 3 jeux, venez tenter le coup, c'est gratis! Bonne journée ^^

choup37, 19.04.2024 à 19:45

Maintenant j'en ai plus que deux, je joue aussi sur kaa

Viens chatter !

Newsletter

Les nouveautés des séries et de notre site une fois par mois dans ta boîte mail ?

Inscris-toi maintenant

Sondage