HypnoFanfics

Sur le coup de 7 heures, alors que, dans un état second, elle attendait son tour devant le distributeur de café des urgences, la sonnerie de son portable la rappela à la réalité.

« Mars ! Ça bouge. Il a été prévenu par sa femme. Son frère passe à l’hôpital dans la matinée. Dès qu’Ahmed sort, je le prends en filature. De votre côté, tenez vous prêts. On va les coincer ! ».

Il raccrocha avant qu’elle ait pu réclamer la moindre précision. Après avoir vérifié une nouvelle fois où se trouvait Hussein, elle sortit rapidement pour réveiller Carter.

- Debout Luke ! Ahmed est annoncé. Mac Lane est remonté à bloc, je ne sais pas pourquoi. Il a peut-être d’autres infos parce qu’il nous prévoit une arrestation musclée des deux frères. Il faut qu’on fasse quelque chose pour que ça ne tourne pas au vinaigre. Il y a trop de monde aux urgences, pas la peine de créer une panique ! le prévint-elle. Dès que Mac Lane arrive, tâche de le bloquer. Il faut qu’il se calme avant tout. Moi, j’y retourne, on doit impérativement savoir ce qu’Ahmed a de si important à dire à son frère pour que ça ne puisse pas attendre qu’il rentre chez lui.

Elle alla se chercher une planque discrète. Il lui fallait ne manquer aucun de ceux qui pénétraient dans le service tout en gardant un œil sur les déplacements d’Hussein. Après y avoir réfléchi, elle se posa sur un siège à l’entrée de la salle d’attente et, faisant mine de lire un magazine, se mit à épier tous les mouvements autour d’elle.

Deux heures plus tard, elle patientait toujours et toujours pas d’Ahmed en vue. L’attente commençait à lui peser. Elle appela Carter :

- Du nouveau de ton côté ?...

Comme elle prononçait ces mots, Ahmed fit son apparition aux urgences. Avant de raccrocher, elle mit une nouvelle fois Luke en garde :

- Il est là ! Surtout attendez que je sorte avant d’entreprendre quoi que ce soit. J’espère ne pas en avoir pour longtemps.

Elle se leva et, l’air de rien, suivit Ahmed jusqu’au comptoir des entrées. Ce dernier demanda à parler à Hussein. Dès que les deux frères tombèrent dans les bras l’un de l’autre, elle se rapprocha discrètement pour ne rien manquer de leur conversation.

Une chose qu’elle n’avait pas prévue la contraria « Veronica ! Ne pas y avoir pensé, là tu es vraiment fatiguée », ils s’exprimaient dans leur langue maternelle et ça, c’était pas top pour elle.

Un bon moment plus tard les deux frères discutaient toujours. Dépitée de n’avoir pu saisir le moindre mot, elle s’apprêtait à rejoindre Carter et Mac Lane lorsque ce dernier fit une entrée remarquée, son arme à la main.

Aussitôt un vent de folie gagna l’assistance. Les gens couraient dans tous les sens en hurlant. Certains se jetaient à terre pour se camoufler derrière tout et n’importe quoi, d’autres essayaient de s’enfuir le plus vite possible.

Surpris, les deux frères se retournèrent. Hussein, tétanisé, n’esquissa pas un geste. Ahmed lui, remarquant que l’homme en arme venait à sa rencontre un méchant rictus sur le visage, paniqua et tournant la tête dans tous les sens à la recherche d’une issue de secours, détala à toutes jambes.

Veronica le prit en chasse, aussitôt suivie par un Mac Lane plutôt excité. À l’instant où elle se jetait sur Ahmed pour le stopper dans son élan, une détonation retentit. Elle ressentit comme un choc auquel elle ne prêta pas attention.

Quand Ahmed s’effondra lourdement sur le sol, l’entraînant dans sa chute, elle eut un léger moment d’absence avant de se reprendre et de regarder le corps gisant là. Une énorme tache de sang maculait son vêtement. La balle l’avait cueilli dans le dos ne lui laissant aucune chance.

Elle se retournait vers Mac Lane, une lueur d’incompréhension dans le regard, quand Hussein se précipita sur son frère. Il tenta tout pour le sauver, mais peine perdue, le tir avait été ravageur. Dès qu’il le comprit, il poussa un hurlement désespéré. Ses collègues le prirent en charge et l’éloignèrent du corps.

Veronica de son côté, reprenant ses esprits, s’apprêtait à déballer à Mac Lane tout ce qu’elle pensait de lui lorsque Carter, arrivé derrière eux, lui fit remarquer qu’elle saignait. Étonnée, elle regarda sa main dégoulinante, se tata le bras et fit une grimace lorsqu’elle effleura l’endroit où le projectile l’avait touchée.

- Bravo Mac Lane ! Plus besoin d’entraînement au stand de tir. Coup double avec une seule balle. Certificat d’aptitude obtenu haut la main ! Tu grimpes d’un niveau dans ton tableau d’avancement. Je te vote les félicitations du jury, abruti inconscient ! lança-t-elle rageuse à un Mac Lane qui ne semblait pas perturbé outre mesure.

Carter, pour la calmer et lui éviter d’en rajouter, la prit par l’épaule et la conduisit en salle de soins.

- Laisse tomber Veronica ! Il s’expliquera avec son ami Robert et, je peux bien te l’avouer, c’est pas gagné pour lui. Moi qui croyais l’avoir calmé, mauvaise pioche…

- Voilà ! C’est bénin. Ce sera cicatrisé dans quelques jours  lui dit le médecin en finissant de la panser. Il lui prescrivit un léger analgésique et la laissa filer.

Avant de regagner l’agence, elle passa rapidement chez elle pour se changer.

Tout l’après-midi, Mac Lane tenta vainement de tirer les vers du nez d’un présumé coupable bien décidé à ne pas coopérer. Lorsqu’il était entré dans la salle d’interrogatoire, Hussein l’avait traité d’assassin puis s’était enfermé dans un silence buté. Mac Lane avait eu beau le menacer de tous les maux de la terre, rien n’y avait fait. Carter, Veronica et Rhys-Davis qui venait de les rejoindre assistaient au massacre derrière une vitre sans tain.

- Il s’y prend mal, il n’obtiendra jamais rien d’Hussein de cette façon déclara le directeur. Changeons notre fusil d’épaule ! Je le fais sortir. Agent Mars, allez-y ! Faites le parler qu’on en finisse !

Mac Lane ne fut pas ravi de devoir laisser sa place à Veronica. Un dossier sous le bras, elle entra dans la salle en tenant deux cafés qu’elle posa sur la table. Elle en fit glisser un à l’homme assis en face d’elle. Hussein, le visage bleui par une barbe naissante, paraissait fatigué et totalement désemparé de se retrouver là. Il ne semblait pas saisir ce que le FBI lui voulait et, surtout, pourquoi cet agent avait tué son jeune frère sans aucune sommation.

- Monsieur Amal commença-t-elle d’une voix calme en ouvrant son dossier… Je vous dis ce que nous savons de votre frère et vous nous aidez à comprendre. Ahmed Amal était ce qu’on peut appeler un grand voyageur. Entré aux Etats-Unis par Miami où il a rencontré un certain Ethan Ward le 23 de ce mois, il était le 26 à New York et dans la nuit du 29 au 30 à Chicago. En remontant le fil de ses déplacements, nous avons pu constater qu’il était passé par Londres, Le Caire et le Soudan.

Hussein l’écoutait complètement ahuri par ce qu’il entendait et, soudain, parut comprendre.

- Oh ! Un terroriste. Vous le preniez pour un terroriste, n’est-ce pas ? C’est de la folie ! Il n’avait rien à se reprocher. S’il voyageait autant c’était pour son travail, il collectait des fonds pour une association d’aide aux réfugiés. Vous pouvez vérifier ce n’est pas un secret. Tous ses déplacements n’avaient qu’un seul but, rencontrer les donateurs. Au Soudan, il travaillait dans un camp de personnes déplacées. Au Caire et à Londres, il devait voir les responsables d’antennes de l’association. Même chose à Miami où la femme de Ward, une amie, récupère les dons. Idem à New York. C’était le garçon le plus honnête qui soit, le plus concerné par la folie humaine, un idéaliste qui voulait sauver le monde. Pourquoi l’avoir assassiné ? Il vous suffisait de lui parler, il n’avait rien à cacher. Ce que vous avez fait est monstrueux ! Comment garder confiance en un pays qui traite les gens comme ça.

En prononçant ces mots, il avait les larmes aux yeux.

- Parlons de Chicago continua-t-elle un peu ébranlée par les paroles d’Hussein mais conservant le même ton posé… Pourquoi était-il si pressé de vous rencontrer ? Pourquoi à l’hôpital alors qu’il était si simple de vous attendre chez vous ?

- Ça c’était Ahmed ! Ne jamais perdre de temps quand quelque chose lui tenait à cœur. Il voulait que je rentre au pays, le gouvernement dont j’étais l’un des opposants étant tombé, je ne risquais plus rien. Nos parents sont vieux, il voulait que je sois près d’eux quand lui était à l’autre bout du monde. Comme vous avez pu le remarquer, il y était souvent. Voilà, c’est tout.

Veronica consulta le dossier posé devant elle, en tira un feuillet et lut à voix haute :

- Un rapport de la filature de votre frère indique que, ce matin, avant de vous rejoindre à l’hôpital, il a fait un grand détour. Il est allé en repérage autour de la mairie et des consulats. Une explication à cette attitude pas très nette ?

- Je ne sais pas ! Il ne connaissait pas bien Chicago, il s’est peut-être perdu et il a tourné en rond. Il a peut-être dit quelque chose à Zora à ce sujet. Moi, je ne sais vraiment pas.

Pendant que Veronica interrogeait Hussein, au fur et à mesure que ses réponses tombaient, Rhys-Davis en réclamait la vérification auprès des services concernés. Peu à peu, il se fit jour qu’il n’avait pas menti, les enquêtes lancées lors de la réunion de Quantico allaient toutes dans le même sens.

Le dernier doute sur l’attitude d’Ahmed fut levé quand la femme d’Hussein, affolée, vint à l’agence réclamer des nouvelles de son mari. Son beau-frère avait été convié à la réception de nouvel an organisée par le consul du Liban, il espérait bien trouver de nouveaux donateurs parmi les nombreux invités. Ne voulant pas se perdre et arriver en retard il lui avait demandé un plan de Chicago et était parti repérer les lieux. Le consulat confirma l’invitation. Définitivement, Ahmed n’était pas un terroriste, il était mort pour rien.

Hussein fut libéré à 20h00. Veronica l’accompagna jusqu’à la réception où son épouse l’attendait. Au moment de sortir, il se retourna vers elle et lui demanda :

- Quand me rendrez-vous le corps de mon frère ? J’ai des dispositions à prendre.

Elle fut incapable de lui répondre.

Lentement, elle regagna le service. En moins de temps qu’il avait fallu pour le dire, à cause de cette paranoïa ambiante au bureau, un innocent était mort, la vie de toute une famille avait été dévastée. Hussein n’aurait plus jamais confiance dans son pays d’accueil, toujours à se demander s’il n’était pas surveillé. Elle, contrairement à Mac Lane, elle s’en voulait de ne pas avoir tout simplement crié « Arrêtez-vous ! FBI ! ».

Épuisée de fatigue, écœurée par ce gâchis, elle rentra chez elle. Rhys-Davis leur avait ordonné d’aller prendre du repos, le débriefing pourrait attendre. Rendez-vous fut fixé à tous pour le 3 à 11h00.

Prenant à peine le temps de se dévêtir, elle se jeta sur son lit, plongeant instantanément dans un sommeil lourd. Oublier…

Des klaxons de voitures, des pétards, des cris de joie la tirèrent de son sommeil. Elle ouvrit un œil, 0h01 au réveil. « Pas une vraiment bonne année qui commence » pensa-t-elle en se retournant dans son lit. Elle tira la couverture sur sa tête et replongea instantanément dans les bras de Morphée.

Quelques heures plus tard dans son sommeil troublé, elle poursuivait Ahmed qui ne l’entendait pas, elle lui criait de s’arrêter, mais aucun son ne franchissait ses lèvres. Elle hurlait de plus belle dans le vide quand cette détonation…

Elle s’éveilla en sursaut, le souffle coupé, ne sachant plus où elle était. Elle s’assit sur son lit, inspira un grand coup, tenta de se calmer. Dès que les battements de son cœur revinrent à la normale, elle se recoucha et, la fatigue aidant, se rendormit aussitôt.

Au bout d’un moment, le cauchemar recommença. Cette fois, elle essayait d’arrêter Mac Lane dans sa course, mais d’un revers de main, il l’écartait violemment de son chemin. Alors qu’elle tentait de se rattraper pour ne pas tomber, ce coup de feu… Elle sursauta de nouveau, en sueur, mal à l’aise.

Chaque fois qu’elle parvenait à se rendormir, son mauvais rêve refaisait surface, chaque fois différent, mais ce bruit… Le même. Encore et toujours. N’y tenant plus, elle se leva épuisée…

Comme une somnambule, elle gagna sa cuisine, brancha la cafetière sans vraiment y penser puis s’enferma dans la salle de bain. Une longue douche brûlante plus tard, son pansement refait, habillée, elle avait plus ou moins retrouvé ses esprits.

Assise près du livre posé sur le canapé, sa tasse à portée de main, elle entreprit de consulter sa boîte mail. « Papa ! Tu as pensé à moi pendant que je cauchemardais » se dit-elle en voyant le nom de l’expéditeur.

Keith lui renouvelait son amour paternel et lui souhaitait tout le bonheur du monde pour cette nouvelle année. Quand elle ouvrit la pièce jointe au mail une photo apparut sur laquelle son père, hilare, lui tendait une coupe de champagne. À son côté, une jolie femme rousse d’une quarantaine d’années lui souriait gentiment en lui adressant un petit signe de la main.

« Alors, c’est elle ta rencontre du campus… Ça me fait plaisir Papa, tu as l’air heureux. Moi aussi je te souhaite tout le bonheur… J’espère pouvoir la rencontrer bientôt… Je t’aime et tu me manques ! ».

Elle cliqua sur envoi.

Elle ouvrit l’autre message qui lui était adressé.

From : [email protected]       To : [email protected]       Date : 2014.01.01 – 0.23 am

Bonne année ma belle !
Chose promise, chose due… J’ai fait jouer mes relations et comme personne ne peut jamais rien me refuser… Hé oui ! moi aussi je sais m’y prendre… J’ai pu t’obtenir une adresse :

Dana Westcliff – aux bons soins de : Orion Publishing Co West Coast Agency
PO Box 11432 – 90902 LOS ANGELES – CA

Oui, je t’entends déjà… Tu ne vas pas aller très loin avec ça ! Mais le FBI c’est toi… Donc, si tu as envie de creuser plus profond…
À mon avis, l’envoi d’une lettre serait préférable, mais à toi de voir… Je t’embrasse.
Ton toujours dévoué serviteur et néanmoins dealer affectionné.
Alex

« Creuser ? Pas la tête à ça. Une lettre ? Pas envie pour l’instant. Je ne veux qu’une chose, que ce bruit qui me vrille le crâne s’arrête… Assez ! ».

Néanmoins, elle se leva, alla récupérer de quoi écrire et, sans vraiment y réfléchir, commença à jeter sur le papier ce qui la tracassait.

Une bonne heure et plusieurs feuillets noircis plus tard, elle posa son stylo. Elle entreprit de relire ce qu’elle avait noté d’instinct. Surprise, elle se rendit compte qu’elle était revenue, minute par minute, sur les évènements de l’hôpital.

Elle s’accusait, par son manque de discernement, d’avoir provoqué la fin d’Ahmed. Elle aurait dû lui parler tout de suite, quitte à le mettre en colère. Si elle l’avait fait ou si elle était sortie pour calmer Mac Lane, rien ne se serait passé. Elle n’évoquait même pas l’attitude de ce dernier, elle se concentrait sur son propre vécu des circonstances de cette mort et finalement, à son grand étonnement, présentait sa démission à Rhys-Davis.

« Alors, c’est pour en arriver là ? Démissionner… Réfléchis bien Veronica ! Tu te sens si coupable que ça ? Ou est-ce seulement la goutte d’eau de trop ?... Oh ! Enorme la goutte et acide, vraiment acide ».

Elle reposa les feuilles, ne sachant plus trop quoi penser. Elle s’empara du livre qu’elle lâcha aussitôt « Non, pas maintenant ! Une introspection par jour, c'est largement suffisant ».

Elle se leva, récupéra son sac et son manteau puis sortit pour tenter de faire le vide dans son esprit surchauffé. « Quoi de mieux pour le jour de l’an qu’une balade dans un Chicago vide et surgelé… ».

Le 3 janvier à 9h00, elle arriva au bureau. Une fois dans l’ascenseur, elle hésita un instant, médita plus avant puis, enfin sûre d’elle, appuya sur le bouton de l’étage Direction.

D’un pas rapide, elle gagna le bureau de Rhys-Davis. Alors qu’elle se dirigeait vers son assistante pour prendre un rendez-vous, ce dernier l’apercevant par la porte entrouverte, lui fit signe d’entrer et de refermer derrière elle.

Pendant qu’elle traversait la pièce à la moquette épaisse, lui, debout derrière son bureau, une interrogation dans le regard, ne la quitta pas des yeux.

- Agent Mars ? Le débrief n’est qu’à 11h00. Deux heures d’avance n’est-ce pas un peu trop tôt ? lui dit-il en lui indiquant le siège face à lui.

Dès qu’ils furent tous les deux installés, Veronica, d’un ton qu’elle voulait ferme mais qui trembla un peu, lui annonça d’une seule traite :

- Monsieur, j’ai bien réfléchi à l’affaire Amal. Au vu de ce qui s’est passé, je crois que je n’ai pas fait mon boulot correctement. Si ç'avait été le cas, il n’y aurait pas eu de mort… Et je vous prie d’accepter ma… ma démission.

Rhys-Davis la regarda étonné et dit :
- Mademoiselle Mars, si quelqu’un n’a pas fait son boulot correctement, vous n’êtes pas en cause, moi si ! Avec cette ambiance délétère qui nous empêche tous de réfléchir sainement, je n’ai pas assez insisté sur notre manque de preuves, auprès des agents et surtout de la hiérarchie. Je n’ai pas su empêcher Aidan de n’en faire qu’à sa tête. Il a tendance à en faire toujours trop, il est tellement obnubilé par sa promotion. J’aurais dû m’en souvenir et ne pas le bombarder responsable de cette opération. Donc, si quelqu’un doit en tirer les conséquences, c’est bien moi !…

Il soupira et, devant l’air ébahi de Veronica, continua :
- …Depuis quelques années, notre direction générale n’est plus très regardante sur les moyens à employer, je le regrette amèrement. J’en ai discuté avec Herbert Graham, il passe l’éponge pour Mac Lane, il est même prêt à le prendre avec lui. Il lui voit un potentiel… Quel genre de potentiel ?... Exécuteur des basses œuvres qui agit sans réfléchir parce ce qu’il a cru recevoir un ordre, quel que soit cet ordre  ?... Je dois avouer que ça me dépasse, nous nous devons de travailler dans la légalité la plus élémentaire.

Veronica, abasourdie par ce qu’elle venait d’entendre, s’apprêtait à lui répondre quand Rhys-Davis ajouta :
- Mademoiselle Mars, je refuse votre démission. J’apprécie vos compétences, nous serions fous de nous passer de quelqu’un comme vous.

Elle n’en crut pas ses oreilles et répondit un peu vertement :
- Monsieur ! Je ne vous ai pas présenté ma démission sur un coup de tête, j’ai vraiment réfléchi. Et que vaut une soi-disant compétence quand ce qu’il faut bien appeler une bavure est balayée d’un revers de main ?... Ça n’augure rien de bon pour la suite…

Rhys-Davis la coupa :
- J’en suis conscient, mais si les bons éléments nous lâchent, dites-moi qui relèvera le niveau ?... Moi ?... Non ! Trop tard, j’ai laissé passer trop de choses sans réagir, maintenant je ne peux plus faire machine arrière. Une personne comme vous ?… Oui ! J’en ai la conviction. Réfléchissez, votre avenir en dépend, je mettrai tout mon poids dans la balance pour vous aider… Et puis, si vous partez, que pourrez-vous bien faire d’autre ?

C’est avec une certaine agressivité qu’elle rétorqua :
- N’ayez aucune inquiétude pour ce qui concerne mon avenir, je suis une grande fille ! Je suis très capable d’ouvrir mon agence de détective privé. Ça, je sais le faire et depuis très longtemps !… Autre possibilité ?... Je sais me servir d’un appareil photo, plutôt bien sans me vanter. Je peux vendre mes clichés aux agences de presse et si, pour devenir journaliste à part entière, je dois reprendre mes études, ça ne me fait pas peur.

En entendant ses dernières paroles, Rhys-Davis s’empressa de saisir la perche qu’à son corps défendant, elle venait de lui tendre. Si ce qu’il s’apprêtait à lui dire pouvait la retenir… Il s’empara d’un dossier posé sur le coin de son bureau, le consulta puis s’adressa à elle :
- Tiens donc !... Reprendre des études ne vous fait pas peur… Et si, au lieu de préparer à vos frais un diplôme de journalisme, vous intégriez une université réputée de la côte Est pour un cursus très pointu de psychologie criminelle pris en charge par le FBI, que diriez-vous ?

- Psychologie criminelle ?... Pourquoi ?... Et pourquoi moi ?... s’étonna-t-elle à voix haute tout en pensant « Non mais qu’est-ce qu’il croit. Me faire miroiter une proposition impossible à refuser pour que j’oublie ma démission. Il me prend pour qui ?... ».

- Nous avons besoin d’excellents profileurs et à la façon dont les choses évoluent, dans l’avenir nous en aurons de plus en plus besoin. J’ai consulté très attentivement votre dossier personnel, vos états de service. Je connais votre façon de fonctionner, de penser et de réagir. C’est ce qui me fait dire qu’à ce poste, vous vous sentiriez comme un poisson dans l’eau.

- Ben voyons !... Le poisson a-t-il le droit de vous dire qu’il trouve l’hameçon un peu gros ? Bizarre hein !... Il s’imagine plutôt en journaliste d’investigations en train de fouiller la vase sous laquelle plein de choses pas très jolies jolies sont planquées. Cette conversation vient d’ailleurs de lui donner une idée… lâcha-t-elle d’un ton acerbe.

- Je ne peux pas vous empêcher de penser ça. Le choix de ce que vous ferez de votre avenir vous appartient dit-il un peu déçu qu’elle n’ait pas sauté sur l’occasion. Mais pour l’instant, je ne vous ai pas entendu prononcer le mot démission. Je vous laisse le temps de la réflexion. Vous avez des congés à prendre… Avec votre blessure et parce qu’on à rien à me refuser en haut lieu… Disons que j’attends votre réponse pour le 7 février. Rendez-vous même lieu, même heure… Et maintenant filez ! La Californie et votre famille vous attendent.

Il se leva et faisant le tour de son bureau, s’approcha d’elle la main tendue. Veronica, se levant à son tour, lui rendit sa poignée de main.
- Merci ! Je vous promets quand même de réfléchir à votre proposition. Oh !... Monsieur, s’il vous plait, j’ai une requête... Hussein Amal voulait savoir quand il pourrait récupérer le corps de son frère… Rien pu lui dire… Je n’ai pas le droit de partir sans lui donner de réponse…

- Mademoiselle sauvez-vous ! Hussein Amal, je m’en charge personnellement.

« Veronica Mars, as-tu un avenir au FBI ?... Oui : réponse 1… Non : réponse 2… pensa-t-elle plutôt désabusée. Comme tu n’es pas du style à te la jouer à pile ou face, pour l’instant, tu vas simplement te dire que la seule chose qui compte, c’est bye bye Chicago ! Mettre une croix dans la case sans te planter, tu as plus d’un mois pour y penser ».

Veronica, encore un peu déstabilisée par l’entretien qu’elle venait d’avoir, rentra chez elle. Avant de faire quoi que ce soit d’autre, elle rédigea un mail à l’adresse de son père.

From : [email protected]         To : [email protected]         Date : 2014.01.03 – 11h35 am

Devine qui vient dîner… Disons le 10 de ce mois… Et qui va rester un bon moment avec toi ? Tu as trouvé ?... Oui, MOI !!! Ta fille unique et néanmoins  préférée. Je vais avoir pas mal de choses à te dire… Étonnant non ?...  Des choses à dire… Tu sens l’ironie ?
Je viens en voiture. Départ de Chicago demain matin, je ferai la route sans me presser, un peu de rock’n’roll tourisme ne peut pas nuire. Je te téléphonerai en chemin pour les détails pratiques. Et comme je te connais, je réponds tout de suite à ta question : Pas de panique… TOUT VA BIEN !
À la semaine prochaine. Je t’aime.
Veronica

Départ imminent… Cette simple pensée lui procurait un sentiment de douce quiétude. Elle ouvrit son frigo et entreprit de jeter les quelques denrées périssables. Une fois satisfaite, elle prépara ses affaires.

« Une bonne chose de faite ! » se dit-elle en balançant deux sacs lourdement chargés sur le canapé. Machinalement, elle se saisit du livre, le jeta dans l’un d’eux et fit glisser le zip.