HypnoFanfics

De 9m², elle passa à 6m².

La liberté rétrécie mon espace vital... On me sort d'une cage où la lumière arrivait par des barreaux pour me mettre dans une pièce où la lumière transperce des carreaux sales.

Du silence, elle passa aux longs discours.

Seule dans ma cellule, je pouvais librement penser et réfléchir à ce que je voulais. Aujourd'hui, dans cette salle d'interrogatoire, on me dit ce qui va se passer, comment ça va se passer et ce que je dois dire. Enfin, surtout ce que je ne dois pas dire.

De l'isolement, elle passa à la foule.

Ils veulent tout savoir. Depuis le début, je dois répéter inlassablement les mêmes choses. Arrangées pour certains, détaillées pour d'autres. De ce fait, ils croient avoir percé ma personnalité et m'atteindre au plus profond avec leurs questions intéressées et superficielles.

Du vide, elle aperçut un solide appui.

Je sens son regard sur moi. Je ressens les sentiments chaleureux qui passent à travers cette pièce froide. Je sais que je n'ai pas le choix, je sais que ce que je récolte, je l'ai mérité, mais une pause, une épaule amicale pour me reposer juste quelques secondes, serait-ce trop demander ?

Oui, moi, l'effrontée de service qui court au devant du danger sans relâche, je demande une pause. Je veux juste laisser se reposer mon cerveau déjà épuisé par mes tourments personnels. Papa, sors-moi de là s'il te plaît. Je n'ai même pas pu m'y préparer...

Et comme s'il l'avait entendue...

Keith : Ca suffit, ça fait 4 fois que vous répétez la même chose, vous allez la rendre folle. Je vais vous demander d'attendre son amie pour poursuivre.

Ils s'éloignèrent sans se taire une minute, continuant à récapituler les faits entre eux comme pour être sûrs de ne pas les oublier. Mais elle, elle n'a pas besoin de ces répétitions, les faits, elle les connaît par coeur, elle les a vécus, elle les a provoqués.

Veronica : Merci... j'avoue que j'étais à deux doigts de regretter Lamb et ses non-arrestations... Au moins, pas de procès à subir et surtout, pas de valse des avocats, procureurs et autres livres humains !

Keith : Je sais que ce n'est pas marrant, mais c'est nécessaire. Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre ce procès ! Tu sais le risque que nous courrons, autant toi que moi, s'ils gagnent ?

Veronica : Je sais, Mars est en danger et le super agent Veronica est chargé d'épauler le vieil agent Keith dans sa quête pour triompher !

Keith : Je suis pas si vieux que ça !

Veronica : Je note que tu n'as pas contesté le fait que j'étais super !

Keith : Mais honey, super est le qualificatif de notre famille. La super famille Mars ! Le super shérif Mars !

Quelqu'un toussota derrière lui.

Sacks : Super shérif Mars ? Mademoiselle Miller vient d'arriver. Je la fais entrer ?

Keith : Oui, merci super adjoint Sacks !

Ce dernier partit en rigolant sous le regard amusé de Veronica.

Veronica : A trop le flatter tu vas y perdre ta place, super papa !

Keith : Il ne tient qu'à toi que je la garde. Vénus, bonjour !

Vénus : Bonjour, Alors si j'ai bien compris, il va falloir tout leur raconter en détail ?

Keith : Tout ce qui concerne l'affaire oui.

Vénus : Veronica, est-ce que ton père est au courant ?

Keith : Honey, tu as encore des secrets pour ton vieux père après tout ça ?

Veronica : Tu l'as dit toi-même tu n'es pas vieux !

Le shérif secoua la tête mi-amusé, mi-blessé que sa fille utilise encore ses vieux stratagèmes pour esquiver ses questions.

Vénus : Shérif, il y a quelque chose que je dois vous dire avant...

Keith : Suis-moi dans mon bureau.

Les vagues et leur odeur iodée faisaient ce qu'elles pouvaient pour effacer ce parfum de promesses qui persistait dans ses narines. Le vent, ramenant les effluves du large, et le soleil brûlant tentaient d'effacer les marques du passé sur son corps.

Alors que les premiers rayons du soleil étaient apparus par delà les collines, il avait réveillé son colocataire à l'aide un verre d'eau et les avait traînés, lui et sa planche, jusqu'à la plage.

Actuellement, après 2h de surf, il était assis sur sa planche alors que son ami ronflait sur le sable. Il repensait à ce qui s'était passé ces dernières semaines, ces dernières années. A l'ampleur que prenaient les évènements à chaque fois, cette ampleur qu'il ne mesurait plus très bien. Il n'était pas certain de saisir l'importance de ce qui se passait à chaque fois et surtout de ce qui se passerait l'après midi même. Ses informations étant souvent de troisième main, relatées par des gens avares en explications, il ne pouvait se fier qu'à ça et son jugement s'en trouvait bancal.

Cet après midi, il irait là-bas et il aurait enfin des réponses.

Avocat : J'appelle mademoiselle Vénus Miller à la barre !

Vénus se leva et partit porter serment. C'était elle qui ouvrait les hostilités. Assise au plus proche de l'action, Veronica l'observait. Elle savait que Vénus passait avant elle, pour qu'on ne fasse que moyennement attention à elle et pour qu'ils puissent se concentrer sur sa propre personne après. Elle tremblait. Ce procès l'angoissait et elle ne pouvait s'empêcher de toucher son collier comme s'il avait le pouvoir de la rassurer.

Elle était entrée en premier dans la salle. Juste après les avocats. Elle restait les yeux fixés en direction de la barre. De temps en temps, elle regardait le juge ou les avocats. Elle s'était risquée à regarder le jury lorsqu'il était entré mais pas un regard vers l'autre partie ni vers ceux qui, non impliqués, assistaient en même temps qu'elle au procès. De temps en temps, elle entendait la porte du fond s'ouvrir et quelqu'un entrait ou sortait. Les minutes défilaient lentement et pourtant quand son tour arriva elle trouva que le temps était passé beaucoup trop vite.

Veronica : Je le jure.

Elle alla s'asseoir et s'autorisa à regarder le public pour la première fois. Il y avait très peu de monde. En les voyant, elle comprit la chaleur qui l'avait envahie juste avant le début de la séance. Ils la rassuraient, ils étaient sa force et son courage.

L'avocat se plaça face à elle.

Avocat : Bien, mademoiselle Mars. Expliquez-nous comment vous avez été kidnappée par Liam Fitzpatrick.

Veronica : Je suis détective privée. Je sais que certains me trouveront trop jeune, pourtant, j'ai eu mon diplôme haut la main. Cette fonction implique que les gens viennent me demander leur aide pour chercher là où ils n'osent chercher et souvent car ils ont peur d'aller voir la police. C'est pour eux une alternative intéressante. Un étudiant m'avait donc demandé de retrouver sa voiture qui avait été volée. Les indices que j'ai trouvés m'ont menée au River Sticks.

Avocat : Le bar appartenant à la famille Fitzpatrick.

Veronica : Oui. C'est dans l'entrepôt qui se situe juste derrière que j'ai trouvé la voiture de mon client.

Avocat : C'est à ce moment-là que Liam Fitzpatrick et Dany Boyd vous ont attrapées, mademoiselle Miller et vous ?

Veronica : Oui.

Avocat : Que faisait-elle avec vous ?

Veronica : Comme elle vous l'a précisé précédemment, mademoiselle Miller est aussi détective, elle m'épaulait pour cette enquête.

Plus tôt dans la matinée, elle avait été surprise d'apprendre que Vénus avait aussi passé son diplôme de détective. Cette jeune fille lui plaisait de plus en plus car au final, elle lui ressemblait.

Les questions continuèrent encore une bonne heure. Elle détailla toutes les fois où elle avait eu à faire aux Fitzpatrick. Certains moments douloureux remontaient mais elle en avait tellement parlé le matin même qu'elle n'y faisait plus attention.

Le jury absorbait ses paroles. Elle voyait l'étonnement, l'incompréhension et l'amusement sur leur visage. Elle les voyait changer d'avis au fur et à mesure qu'elle racontait son expérience. Même les plus septiques d'entre eux semblaient se dérider. Mais rien n'était gagné et quand l'avocat de la défense aborda un sujet sensible, elle se dit que tout était perdu. Elle vit ses amis se crisper, la bouche entrouverte par l'étonnement. Elle vit son père choqué se pencher vers leur avocat pour essayer de comprendre le coup bas.

Avocat de la défense : Objection !!! Ceci n'a rien à voir avec le procès en cours !

Juge : Rejetée. Je veux savoir si c'est vrai. Mademoiselle Mars, veuillez répondre à la question de maître Kellerman, s'il vous plaît.

Veronica : Oui, j'ai bien été violée au lycée par Cassidy Casablancas.

Elle baissa la tête.

Avocat : Ceci vous a-t-il amené à enquêter sur mes clients ?

Elle inspira un grand coup en comprenant où il venait en venir. Petit à petit elle reprenait de la contenance.

Veronica : Pas directement. Je me suis faite violer à une fête de lycéens à laquelle ils ne sont pas venus. Cependant, j'ai été droguée au GHB et leur trafic de drogue a attiré mon attention.

Avocat : Merci, ça sera tout.

Veronica pu retourner à sa place pendant que les avocats intérogeaient Mickael et faisaient leur plaidoirie devant les jurés. Elle sentit une main sur son épaule et tourna la tête pour voir Mac, les yeux remplis de larmes, la regarder comme pour s'excuser. Elle lui prit la main et ne la lâcha plus jusqu'à ce qu'ils sortent du tribunal pendant que les jurés délibéraient.

Ce long procès lancé contre les membres de la mafia Fitzpatrick touchait à sa fin. Ils n'étaient qu'à quelques heures du dénouement mais Veronica n'était pas confiante. Certaines parties pouvaient leur faire défaut : son viol, l'histoire de Kendall, ... Elle espérait quand même que les jurés avaient saisi que ce procès achèverait de réduire à néant les affaires de la mafia irlandaise dans tout les États-Unis après les condamnations qui avaient eu lieu à New York, Seattle, Dallas et San Francisco.

Mac et Vénus rentrèrent sur le campus après le dîner. La soirée avait été tendue et exténuante moralement. Le jury n'avait pas encore délibéré et l'annonce de l'identité du violeur encore inconnue par Mac et Dick avait jeté un froid. Veronica avait du s'expliquer avec eux pendant plusieurs heures.

Arrivées dans la chambre, Mac se coucha immédiatement pour s'endormir quelques minutes plus tard les yeux encore humides des larmes qu'elle avait versées tout au long de la soirée. L'évocation de Cassidy avait rouvert des blessures qui étaient à peine cicatrisées. Wallace avait eu un mal fou à la rassurer. Lui aussi avait souffert du rappel de cette période noire du lycée où plusieurs camarades avaient trouvé la mort.

Vénus quant à elle s'allongea mais ne ferma même pas les yeux. Elle réfléchissait à tous les sentiments qui étaient passés par son esprit pendant la soirée. Elle avait appris beaucoup plus de chacun ce soir que depuis qu'elle était arrivée à Neptune. Depuis, les questions ne cessaient de revenir à elle et elle s'interrogeait sur la nécessité de connaître les réponses. Après tout, sa vie actuelle lui plaisait, pourquoi remuer le passé ?

Pour se changer les idées, elle alluma son ordinateur et se remit à la programmation de son jeu. Elle avait terminé le coeur du logiciel et s'occupait à présent des comportements des personnages lorsque Mac se réveilla en criant.

Vénus se précipita à son chevet pour la calmer.

Mac : J'ai rêvé de Cassidy... Dans la chambre d'hôtel...

Vénus : C'est du passé Mac, ça n'arrivera plus...

Mac : J'avais confiance en lui... Je le trouvais inoffensif...

Vénus : Parfois les gens sont beaucoup plus troublés que l'on ne peut l'imaginer.

Elle lui caressait les cheveux pour l'apaiser mais rien n'y faisait.

Vénus : Tu veux que j'appelle Wallace ?

Mac : Non ! Et si il était comme Cassidy ? Si lui aussi tout à coup il faisait ce genre de choses ?

Vénus : Mac, ne compare pas ce qui n'est pas comparable, Wallace est un ange. Il n'a pas le même passé...

Mac : Mais il a eu des problèmes quand il était petit... Son père est mort... Après il a appris que ce n'était pas son père biologique... Il est même parti un temps de Neptune... Il pourrait péter un câble lui aussi...

Vénus : Calme toi ! Tu es en train de devenir parano là...

Elle se leva et s'éloigna de Mac pendant que cette dernière fixait un point imaginaire, l'air complètement ailleurs.

Mac : Non ça pourrait arriver... Je le sais... Personne n'est inoffensif...

Vénus agacée attrapa la bouteille d'eau qui se trouvait sur le bureau de Mac, l'ouvrit et vida son contenu sur la tête de sa colocataire. Celle-ci mit quelques secondes à comprendre ce qui lui arrivait.

Vénus : Désolée, c'est tout ce que j'ai trouvé... Tu étais en pleine crise d'angoisse et les claques, c'est pas mon truc.

Elle lui fit un sourire d'excuse qui détendit Mac instantanément.

Mac : C'est à moi de m'excuser... Je prends cette histoire un peu trop à coeur... Ca a fait remonter pas mal de choses et j'ai du mal à gérer. Je devrais plus faire confiance à Wallace, tu as raison... Je suis désolée...

Vénus : Je comprends, il n'y a pas de mal !

Mac : Je t'ai réveillée ?

Vénus : Non, j'étais en train de programmer un peu. Je dors tellement mal ces derniers temps que j'optimise le temps perdu. Au lieu de faire des cauchemars, mon cerveau réfléchit un peu plus utilement.

Mac : Ca s'est toujours pas calmé ?

Vénus : Je croyais... Mais non...

Mac : Tu bosses sur quoi ?

Vénus : Un jeu où l'utilisateur se crée son propre personnage et le fait évoluer dans un univers qui ressemble au monde réel. Il y aura aussi des personnages 100% gérés par l'ordinateur. Je suis en train de réfléchir à l'intelligence artificielle de ces personnages qui devront réagir d'eux-mêmes comme toi et moi.

Mac : Comme balancer un seau d'eau sur un autre ?

Vénus : Par exemple ! J'essaye de monter un système d'auto-apprentissage. Plus les utilisateurs joueront, plus ils apprendront des réactions à leurs personnages, plus les persos gérés par l'ordinateur auront un grand panel de réactions et de pensées.

Mac : En gros, un système qui évolue tout seul en analysant les actes et les pensées des joueurs. De la manipulation...

Vénus : Exactement ! Je m'intéresse de plus en plus à la psychologie et aux manipulations du cerveau. Et comme je ne peux pas le faire sur des gens, je crée mon propre jeu pour mettre en application mes connaissances et m'améliorer... On arrive bien à dresser des animaux, c'est de la manipulation. Pourquoi n'arriverait-on pas à dresser des hommes ?

Mac : Tu es sûre que tu n'as pas besoin d'un peu de sommeil ?

Vénus : Rassure-toi, je ne veux manipuler personne, c'est juste des questions que je me pose... Ce jeu me tient à coeur en fait...

Mac : Tu as besoin d'aide ? J'ai une tonne de comportements humains qu'on pourrait intégrer et tenter de contrôler ! Manger des cookies de manière compulsive, avoir peur de faire confiance aux autres, ... Nous avons plein de spécimens rares autour de nous !

Vénus acquiesça et elles se mirent toutes les deux au travail remplaçant leur difficulté à dormir par une frénésie créatrice.

Episode 12 : The return of the king

La fumée s'élevait lentement dans la pièce. Ce petit filet grisâtre disséminait l'arôme puissant de la boisson chaude dans l'air.

Machinalement, elle porta la tasse à sa bouche La première gorgée lui fit sortir une grimace.

Alicia : J'y suis peut être allée fort sur les doses...

Seconde gorgée, le fluide passait beaucoup mieux et s'insinuait lentement dans l'organisme.

Une à une, chaque cellule de son corps s'éveillait.

Pour parfaire son état, elle alla se glisser sous le jet d'eau brûlante de sa douche.

Tout en se préparant, elle repensait au coup de fil qu'elle avait reçu la veille au soir. Alors qu'elle voudrait être au tribunal au cas où les jurés rendraient leur verdict, elle était convoquée pour un entretien visiblement urgent.

Elle se resservit une nouvelle tasse et l'avala en vitesse tout en attrapant sa veste et ses clefs.

Au volant de sa voiture, son regard se promenait. A chaque feu, elle se surprenait à envier ces personnes assises à ces terrasses surpeuplées, bavardant joyeusement ou lisant le journal tout en sirotant leur première boisson de la journée.

Elle se gara et entra dans l'important bâtiment qu'elle arpentait chaque jour encore et encore. Chaque jour, sauf ces derniers temps où elle s'était permise de s'absenter pour se rendre au procès Fitzpatrick pour lui, pour elle, pour eux.

Elle prit le temps de se servir une tasse de remontant, elle sentait qu'elle en aurait besoin.

La secrétaire lui fit signe d'attendre puis l'invita à entrer dans la salle de réunion.

Une salle gigantesque avec, en son centre, une immense table qui pouvait accueillir une trentaine de personnes. L'ambiance était sombre, limite lugubre. On aurait pu s'attendre à ce qu'un film soit soudainement projeté, on entendrait presque le bruit du projecteur mécanique. Dans sa tête c'était d'autres images qui défilaient. Un frisson lui parcourut le dos lorsque ses yeux se posèrent sur la plante proche de l'entrée.

CW : Merci de vous être déplacée madame Fennel, asseyez-vous.

Alicia : C'est normal, que puis-je faire pour vous monsieur Wiedman ?

CW : Je ne vais pas passer par quatre chemins, vous avez été souvent absente ces derniers jours.

Alicia : J'étais au tribunal pour assister au procès des Fitzpatrick si c'est ce que vous voulez savoir.

CW : Je n'ai reçu aucune demande de congés de votre part.

Alicia : Je suis surprise, j'ai pourtant rempli les formulaires que j'ai confiés à ma secrétaire et elle m'a confirmé qu'ils avaient été acceptés.

CW : C'est pourtant elle qui nous a prévenus de votre absence.

Alicia : Je vous assure, je ne comprends pas. On devrait aller la voir...

CW : Nous lui avons déjà parlé et étant donné les circonstances, nous ne pouvons pas vous garder.

Alicia : Mais comment ça ? Je suis sûre que ce n'est qu'un malentendu ! Vous ne pouvez pas me licencier pour ça !

CW : Oh si je le peux et je l'ai fait. Vous devez nous rendre votre badge et sortir du bâtiment à présent.

Alicia : Je veux voir ma secrétaire !

CW : Ce n'est plus votre secrétaire, vous ne faites plus partie de nos effectifs et ce, dès à présent. Voulez-vous que j'appelle la sécurité pour vous escorter ?

Alicia tourna les talons rageusement et se dirigea vers la sortie en jetant un bref coup d'oeil au couloir qui menait à son bureau, son ancien bureau.

Elle regardait le sol défiler lentement sous ses pieds en repensant à ce qu'il venait de se passer. Cette scène qu'elle avait déjà vécue au tout début de l'amitié entre son fils et Veronica.

Elle était pourtant certaine d'avoir rempli ces fichus papiers et de les avoir donnés à sa secrétaire. Elle revoyait la scène en boucle dans sa tête. Pour elle, tout cela n'était qu'un malentendu.

Perdu dans ses pensées, elle percuta quelqu'un et reconnu la voix féminine qui était en train de jurer. Le gobelet qui gisait par terre témoignait du choc autant que la tache brune qui ornait le tailleur mauve de la jeune femme.

Alicia : Excusez moi... Claudia ? Justement, je voulais vous parler !
Claudia : Je n'ai pas le temps...
Alicia : Mais attendez...
Agent : Madame Fennel, je vais vous demander de nous suivre.

L'agent de la sécurité qui intervint ne semblait pas plaisanter. Au fond du couloir, Clarence Wiedman lui fit un signe de la tête alors que sa secrétaire, Claudia, passa derrière lui sans un regard pour Alicia.

Entourée par deux agents de sécurité, Alicia sortit du bâtiment des logiciels Kane.

A l'intérieur, Clarence composa un numéro sur son portable.

CW : Allo ? C'est fait !

Le gobelet acheté au Starbuck du coin en main, elle s'avança dans l'allée jusqu'au premier rang. Comme chaque jour, elle était venue espérer un verdict. Son père, anxieux, était déjà là, dans le box de l'accusation. Il parlait avec Cliff.

Veronica : Alors, du nouveau ?

Keith : Visiblement, le juge veut nous dire quelque chose. Peut-être que les jurés ont fini de délibérer...

Veronica : Il n'est pas trop tôt, je commençais à m'impatienter, le Petit Poney va bientôt pouvoir ouvrir ses portes !

Keith : Le quoi ?

Veronica : Etant donné que le River Sticks va se retrouver sans propriétaire pendant un bout de temps, je pensais me lancer dans l'exploitation d'un nouveau lieu de débauche. « Le Petit Poney » comme nom, c'est pas mal, non ? J'aime bien moi...

Cliff : Toujours le mot pour rire Veronica !

Veronica : C'est dans mes gênes, je suis destinée à être drôle !

Keith sourit et secouant légèrement la tête.

Veronica : Alicia n'est pas là ?

Keith : Elle devait se rendre au siège des logiciels Kane, Clarence voulait la voir.

Veronica se retourna vers Wallace, déjà assis, et lui sourit. C'est à ce moment, qu'on annonça l'arrivée du juge et des jurés.

Ils ne sont pas 9 normalement ?

Le juge s'assit et tout le monde fit de même. Son visage était grave. Les jurés, eux, avaient l'air effrayés.

Keith et Cliff s'interrogèrent du regard.

L'ambiance était lourde, la tension palpable. Tout le monde redoutait ce qui allait se dire.

Veronica serra sa boisson un peu plus fort dans ses mains jusqu'à faire plier le carton. Wallace qui était à ses côtés, le remarqua et posa sa main sur la sienne pour l'apaiser. Elle avait peur que le drame du procès d'Aaron ne se reproduise, il ne pouvait que la comprendre.

Du côté des accusés, les mines étaient sereines ce qui était d'autant plus effrayant.

Le juge classait ses papiers, il cherchait visiblement ses mots.

Juge : Je vous ai réunis aujourd'hui suite au décès de monsieur Hargman qui était l'un des jurés de ce procès. D'après les autorités compétentes, sa mort est un meurtre maquillé en suicide. Il semblerait qu'il existe encore des connexions non dévoilées dans le réseau irlandais que nous jugeons. C'est pourquoi si l'accusation le souhaite, je vais leur laisser un délai supplémentaire pour voir si la mort de ce juré est en relation avec ce procès.

Cliff : Nous vous en serions reconnaissant votre honneur.

Juge : Bien. Vous avez une semaine pour m'apporter les premiers éléments. En attendant, les prévenus seront maintenus en détention sans autre visite que celle de leur avocat et les jurés seront placés sous le programme de protection. Je vous remercie de votre attention.

Veronica était sous le choc. Un juré tué, un report de procès, la partie s'annonçait rude. Le sourire de Liam s'était effacé lors de l'annonce du report du jugement.

Encore abasourdie, elle regarda Wallace s'éloigner pour téléphoner à sa mère qui venait d'essayer de le joindre. Elle ne put s'empêcher de regarder les deux hommes au fond de la salle, elle les voyait de plus en plus souvent. L'un d'eux décrocha son téléphone et raccrocha presque aussitôt. Une impression de déjà-vu la saisit alors.

Elle n'eut pas le temps de se poser de questions que Wallace revint vers elle l'air contrarié.

Wallace : Ma mère vient de se faire virer. Il paraîtrait qu'elle n'a pas déclaré ses congés ces derniers jours alors qu'elle les a donnés à sa secrétaire... Il faut que j'aille la voir.

Comme si ce geste allait la réveiller d'un mauvais rêve, Veronica but le peu de café qu'il lui restait et se lança à la poursuite de son ami.

Veronica : Wallace, attends-moi !

Elle l'avait suivi en courant et l'avait rattrapé avant qu'il ne démarre. D'un regard, il avait essayé de l'en dissuader, d'un geste, elle lui avait fait comprendre que son souhait ne se réaliserait pas. Le silence avait pris place avec eux dans la voiture roulant à présent à vive allure vers son objectif.

Wallace semblait bouillir de l'intérieur, les mains crispées sur le volant, les sourcils froncés. De son côté, Veronica l'observait. Elle comprendrait qu'il soit déçu, triste ou désemparé par l'annonce du renvoi de sa mère, mais elle ne comprenait pas la colère qu'il y avait dans ses yeux.

Elle secoua la tête comme pour chasser les milliers de possibilités qui valsaient dans son esprit. Puis elle se concentra sur la route. Il ne voulait pas parler, elle n'était pas du genre à commencer la conversation. Enfin pas toujours...

Une idée traversa son esprit et elle commença à faire ce qui énervait au plus au point Wallace : s'occuper de ses enquêtes alors qu'elle savait qu'il n'allait pas bien. Elle sortit une liasse de papiers de son sac et se mit à les parcourir. Sans vraiment y porter attention, juste pour le faire réagir. Elle survolait les notes qu'elle avait prises sur l'affaire de Vénus et Logan.

Rêves...

Déclaration à l'état civil...

Miller... Echolls...

Ses notes répertoriaient aussi tout ce qui lui était arrivé depuis le début de l'enquête, elle ne croyait pas aux coïncidences et ne laissait jamais passer un indice.

Garde à vue...

2 hommes, services secrets ?

Procès des Fitzpatrick...

Elle y ajouta le renvoi d'Alicia et resta à regarder ces derniers mots en tapotant la feuille avec son stylo. Elle sentait Wallace s'énerver de plus en plus et le voyait lutter contre lui-même.

Ils étaient presque arrivés lorsqu'une phrase claqua dans l'air comme un fouet. Directe et blessante.

Wallace : Est-ce que c'est ta faute ?

Veronica : Quoi ?

Wallace stoppa brusquement le véhicule et se retourna vers son amie en accrochant son regard pour être sûr de bien se faire comprendre et d'obtenir la vérité.

Wallace : As-tu quelque chose à voir avec le renvoi de ma mère ?

Veronica resta bouche bée devant les accusations de son ami.

Mac était restée au tribunal. Les évènements allaient trop vite pour elle.

Elle avait tout suivi comme elle aurait regardé un feuilleton à la télévision. Les scènes s'étaient succédées et elle était à présent dans une sorte de suspense comme à la fin d'un épisode.

Agacée de devoir attendre la suite, elle repassait en boucle les évènements dans sa tête pour trouver des éléments lui permettant de construire la fin de l'histoire avant qu'elle n'arrive.

Le verdict du procès était reporté. Malgré toute la mafia irlandaise sous les verrous, il leur restait visiblement des alliés à l'extérieur. Mais au lieu de les sortir de là à l'aide d'un non lieu, ces alliés avaient retardé leur chute. Car elle en était convaincue, ils ne s'en sortiraient pas. Keith, en redevenant shérif avait su redonner à la population de la ville la confiance en la justice qu'elle avait perdue avec Don Lamb.

Le renvoi d'Alicia l'inquiétait un peu plus. C'était une femme exemplaire qui, malgré les ressentiments qu'elle avait envers ses supérieurs, fournissait toujours un travail exemplaire. Mère de deux enfants qu'elle élevait seule, elle se devait d'avoir cette rigueur qui lui avait permis son poste chez les logiciels Kane. Qu'avait-elle pu faire pour se faire renvoyer sans avertissement et sans préavis ?

Mac tourna la tête et posa son regard sur Logan. Il n'avait pas bougé depuis le discours du juge. Il était encore assis sur ce banc froid sans âme. Aucune lueur ne vivait dans son regard, il avait l'air ailleurs. Elle l'avait bien vu, tout à l'heure, à l'annonce du report du verdict. Il avait voulu rassurer Veronica mais Wallace avait été plus rapide à prendre sa main. Elle avait vu son hésitation, il avait levé sa main, jeté un coup d'oeil à la petite blonde puis renoncé en secouant la tête et baissant le regard sur le sol grisâtre. Veronica était sortie de cellule le matin même, elle n'avait eu le temps de voir personne à part son père et les avocats, cependant Mac doutait que cela justifie l'absence de contact entre les deux. Elle avait vu Veronica partir sans un regard pour lui, elle avait remarqué qu'à part un bonjour timide, aucune autre communication n'était passée.

Un peu plus loin, sur le même banc, elle vit Vénus. La jeune fille observait Logan, ses réactions, son visage et ses mains. Elle semblait apprendre à le connaître juste en le regardant, comme si ses expressions et ses mimiques pouvaient trahir ses pensées. Mac savait que Logan était beaucoup plus complexe que l'image qu'il donnait de lui mais elle savait aussi qu'il y avait un lien entre eux deux qu'il fallait découvrir. C'était ce que semblait faire Vénus, le regarder jusqu'à se souvenir. Mac sourit discrètement en pensant que Veronica n'aurait pas du tout aimé ce regard.

Son attention fut attirée par des éclats de voix au fond de la salle. Une nouvelle scène se jouait devant ses yeux et elle prit soin de l'enregistrer dans un coin de son esprit, sachant que Veronica serait friande de ce genre d'informations. Keith parlait avec deux hommes qu'elle ne connaissait pas et leur discussion paraissait animée. Elle ne les avait jamais vus, cependant Keith semblait être plus ou moins familier avec eux.

Un rapide coup d'oeil à sa droite lui permit de voir le même étonnement sur le visage de Logan. Vénus quant à elle fronçait les sourcils comme si cette scène lui évoquait quelque chose...

Le visage encore marqué par l'étonnement, Veronica ne croyait pas ce qu'elle venait d'entendre. Elle s'y reprit à plusieurs fois avant de prononcer ses premiers mots.

Veronica : Alors c'est comme ça ? Un drame arrive et c'est forcément moi qui l'ai déclenché ?

Wallace : Avoue que tu es familière aux « drames » comme tu dis. Ca ne serait pas la première fois que quelqu'un subit par ta faute !

Premier coup ! Elle encaissa.

Veronica : C'est comme ça que tu vois les choses ? Tu crois que je le fais exprès pour faire du mal autour de moi ?

Walace : Si ce n'est pas le cas, quel intérêt aurais-tu à remuer toutes les choses les plus sombres de Neptune ? A part ta soif de vengeance coûte que coûte et ton masochisme aigu, je ne voix pas...

Deuxième coup ! Elle grimaça.

Veronica : Que tu m'en veuilles parce qu'une fois ta mère a été virée à cause de moi, je le comprends, même si tu l'as dis toi même, tu savais que ce n'était pas une simple plante. Mais que tu commences à me reprocher tous les malheurs du monde car elle se fait virer à nouveau et que je n'y suis pour rien cette fois... Non... Je ne comprends pas... J'étais en prison jusqu'à ce matin !

Wallace : Comme si ça te dérangeait à toi d'accuser sans cesse les gens à tort. J'en parlerai à Echolls, ça le fera rire, j'en suis sûr.

Troisième coup. Veronica était KO.

Elle ne répondit pas et rangea rageusement les feuilles qu'elle avait sorties dans son sac. Elle lança un dernier regard rempli de déception et d'amertume, puis sortit de la voiture et continua son chemin à pied.

Wallace laissa tomber sa tête sur le volant. Il était fatigué de tout ça, fatigué d'une vie qui contenait trop de rebondissements. Il voulait une pause, loin des enquêtes, loin du danger. Juste une vie paisible se rapprochant un peu plus de la normalité que l'on décrivait dans les livres.

Assise sur la plage, elle passait inlassablement sa main dans le sable, le faisant couler entre ses doigts. Son esprit était vide, elle ne pensait à rien. Ou plutôt, elle avait tellement de choses en tête que son cerveau ne savait à quoi donner la priorité. Un peu comme lorsque des millions de couleurs se mélangent ensemble très rapidement, on obtient une absence de couleur, du blanc. Ses millions de pensées formaient aussi ce blanc. Seule son humeur sombre lui rappelait toutes ces choses.

Elle aurait pu s'endormir ici si elle n'était pas en train de broyer du noir, son cerveau globalisant la teinte de ses pensées pour ne lui faire ressortir que ce seul sentiment.

Le soleil chutait à l'horizon, inondant de coloris son champ de vision.

Il parait que le secret du bonheur, c'est de voir la vie en couleur. Alors pourquoi, à mes yeux, ont-elles toutes la même teinte, pourquoi mon cœur est plus triste que jamais...? Qu'est-ce qu'il s'est passé V... Quand est-ce que tout a dérapé ?

Pour la énième fois depuis la mort de Lilly, elle se posa cette question. Non, pas depuis la mort de Lilly, depuis son viol, cette nuit où sa vie a changé. D'enfant, elle est devenue femme sans le vouloir, sans même s'en souvenir... De l'innocence, elle a goûté aux pires atrocités de la vie.

Qu'y a-t-il de pire qu'un viol ? La mort ? Non, car après la mort, il n'y a rien. Après un viol, il reste le souvenir. Ce moment de vulnérabilité extrême où notre intimité est mise à nue, vandalisée, dévastée, ... Cet instant où l'on s'aperçoit de toute la bêtise, la folie et la violence de ce monde concentrées en une personne. Cette douleur physique de l'instant, et la douleur morale qui restera à jamais. Toutes ces choses naturelles que l'on devra réapprendre à faire. A commencer par la confiance !

Oui, c'est là que tout a dérapé. C'est là qu'elle a perdu confiance en le genre humain. La mort de Lilly avait affaibli son innocence. Les mois qui l'ont suivie l'ont fait douter. Mais cette nuit là sonna le glas de tout sentiment positif envers l'être humain. Elle s'était raccrochée au seul pilier qui la maintiendrait hors de l'eau, elle ne lui avait rien dit mais grâce à lui, elle avait gardé la tête à l'air libre. Grâce à lui, elle avait trouvé de quoi serait composée sa vie : la vengeance.

Vengeance était son maître mot. Elle rendait coup pour coup. Une pique pour une pique, un sentiment pour un sentiment, une trahison pour une trahison. C'est sur cette base-là que s'était construite sa relation avec Logan. Des piques, des sentiments et des trahisons. Elle avait pris soin de lui rendre à chaque fois la monnaie de sa pièce mais avec les intérêts, ses sentiments faussant sa vision des choses.

Plus le ciel noircissait, plus ses idées devenaient claires. Elle continuait à évacuer tout ce qu'elle avait accumulé pendant ces années. Sa nuit en prison n'avait débroussaillé qu'une petite partie de la jungle de son passé. Elle comprit alors que les étapes qu'elle aurait à franchir dès à présent étaient nécessaires pour arriver à tenir ses résolutions.

Ce que tu donnes, tu le revois tôt ou tard ma vieille, il est temps de donner des sentiments au lieu de toujours vouloir les prendre et de le reprocher à ce qui ne veulent pas tout donner.

Elle se releva et regarda autour d'elle. Depuis combien de temps était-elle ici ? Une heure ? Plusieurs ? Une journée ? Elle avait perdu la notion de temps.

De là où elle était, elle voyait la voiture de Wallace qui n'avait pas bougé. Il était probablement avec sa mère. La voiture de Keith était garée juste derrière. Elle sourit à l'idée de les savoir tous les trois ensemble. Ces derniers temps, son père et Alicia s'étaient considérablement rapprochés.

Elle sortit un bout de papier de son sac et y griffonna quelques mots puis alla le déposer sur la voiture de son ami. Elle s'apprêta à partir lorsqu'une voix l'interpella.

... : Veronica !

Elle se retourna et sourit faiblement.

Veronica : Mme Fennel, j'ai appris, je suis désolée... Je...

Alicia : Ne t'excuse pas, tu n'y es pour rien. Tu veux bien rentrer un instant ?

Confuse, elle baissa la tête.

Veronica : Je doute que Wallace ait envie de me voir ce soir.

... : Tu te trompes !

Elle ne comprenait pas son enthousiasme.

Wallace : En tant que frère et sœur, c'est normal qu'on se chamaille, ce n'est pas pour ça que je ne t'aime plus petite sœur !

Elle tenta un nouveau sourire qui se transforma en grimace.

Veronica : Je ne suis pas petite !!! Et qui plus est, c'est moi la grande sœur, je suis plus vieille !!!

Wallace : D'accord, mais dans la chambre, je prendrai le lit du haut !!!

Veronica : Attends, c'est quoi cette histoire de lit ?

Wallace : Entre, on va te raconter.

Il passa un bras autour de ses épaules et lui murmura à l'oreille : « Il y a des mots que j'aimerais effacer, tu crois qu'il existe un moyen d'effacer une partie de ta mémoire ? »

Pour toute réponse, elle lui sourit.

Alicia quant à elle, récupéra le mot laissé sur la voiture et le parcourut par curiosité avant de le glisser dans sa poche. Elle ne manquerait pas de le donner à son fils la prochaine fois qu'il rentrerait à la maison énervé comme aujourd'hui. Les mots résonnaient dans sa tête comme l'évidence de la relation de son fils avec cette petite tête brûlée.

« Tu viens de faire griller ma cervelle de marshmallows... Je suis peut être entêtée mais grâce à toi j'ai compris certaines choses. Merci ! »