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Un Capitaine à bout de souffle

Série : Torchwood
Création : 15.05.2010 à 10h32
Auteur : chrismaz66 
Statut : Terminée

« Fin de la trilogie sur Jack. Début : fin de l'épisode "dernier souffle" » chrismaz66 

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CHAPITRE ONE

(merci à ma bêta Evalye, et à mes pom pom girls Rhéa et Arian. Attention, fic à ne pas mettre entre toutes les mains juvéniles).

 

Jack remit la fiole vide dans le coffre sécurisé de l’Institut et alla terminer de ranger son bureau. Ianto venait de quitter la salle des coffres, l’air maussade et Jack supposa qu’il était rentré chez lui. Le jeune homme semblait affecté par cette nouvelle mission plus qu’il ne voulait le montrer mais Jack savait. Ils venaient de sauver un seul enfant, grâce au caméscope du jeune projectionniste de l’Electro, et ce n’était pas assez. Ce n’était jamais assez. Trop de victimes innocentes. Trop peu de vies épargnées.

Un seul souffle de vie restitué après tant d’efforts cumulés. La déception le gagnait comme elle gagnait les autres membres de l’équipe. Mais le maximum avait été tenté. Ianto n’avait rien à se reprocher, aucune raison de culpabiliser.

Jack entendit des pas dans le Hub central. Il regarda à travers la vitre et aperçut Ianto qui s’installait devant un ordinateur. Mais que faisait-il encore à cette heure tardive? Tous les autres étaient rentrés chez eux depuis longtemps et Jack se croyait seul dans le bâtiment. Il observa Ianto quelques secondes. Le dos voûté, il pianotait sur le clavier avec nervosité. Jack descendit le rejoindre. S’il voulait parler, Jack l’écouterait volontiers. Depuis quelques mois, leur relation était au beau fixe. Ils avaient réussi à se retrouver, à se rendre indispensable l’un pour l’autre. Autant dans le travail que sur le plan personnel. Un véritable Eden où le jeune homme aimait s’attarder avec son amant. Son compagnon. Son alter ego. Car Jack était tout cela et même un peu plus. Ianto ne voyait plus que lui. Il ne respirait qu’une seule odeur, qu’une seule et unique présence. Celle de Jack. Et sans se l’avouer, Jack vivait le même sentiment de plénitude. La même obsession de l’autre. Nuit et jour. Et jour après jour. Ils s’aimaient, tout simplement.

Ianto l’entendit arriver.. Il se redressa et se tourna vers lui, les mains posées sur les genoux, le regard perdu.

- Tu sais que tu ne seras pas payé pour les heures supplémentaires…dit Jack en lui massant les épaules.

Ianto releva la tête en arrière et colla son dos contre son amant. Celui-ci baissa la tête pour déposer un baiser sur son front. Ianto soupira.

- Tu cherches quoi sur google?

- Aucune importance…Jack?

- Oui?

- Tu ne trouves pas terrible, frustrant, le fait de ne pas avoir pu sauver plus d’une personne? Lui demanda-t-il d’une voix lasse.

Jack prit le visage de Ianto entre ses mains, et se baissa pour lui parler à l’oreille.

- Si. Mais nous avons fait tout notre possible. Cela ne sert à rien de culpabiliser. Un proverbe juif dit « quand tu sauves un être humain, tu sauves l’humanité entière ».

Jack commença à tripoter les boutons de sa chemise, laissant glisser ses mains un peu plus bas que la décence ne le permettait.

- Non, Jack. Je n’ai pas envie. J’aimerais que tu me parles de cette période de ta vie. Celle où tu voyageais avec cette troupe itinérante.

Jack se redressa, surpris.

- Pourquoi? Que veux-tu savoir?

- Tout. Comment tu vivais à l’époque. Les gens que tu as fréquentés. Ce que tu as découvert à propos des voyageurs de la nuit.

Jack soupira fortement et libéra le corps chaud. Il n’avait nullement envie de parler de lui mais Ianto avait besoin de comprendre pour se sentir moins inutile.

- D’accord. Tu viens?

Jack prit sa main dans la sienne et tous deux s’installèrent sur le sofa. Ianto passa les bras autour de sa taille, et posa la tête sur son épaule. Tel un enfant à qui on promet une histoire avant de se coucher. Il attendit. Jack fouilla dans ses souvenirs et , caressant le bras de son amant, il se mit à raconter une infime bribe de sa vie. Mais il racontait de plus en plus souvent des bribes infimes de sa vie, et mises bout à bout, celles-ci commençaient à remplir une vie ordinaire d’un homme peu ordinaire. Ianto commençait à en savoir bien plus que quiconque sur le mystérieux chef de Torchwood. Jack distillait plus souvent ça et là des anecdotes sur ses vies passées. Á Ianto. Exclusivement.

- C’est loin dans mes souvenirs, tu sais. Tout ce dont je me rappelle avec précision, c’étaient les galères, les difficultés qu’on avait à glaner quelques malheureux badauds autour de notre scène d’infortune. On vivait chichement. Du moins le reste de la troupe vivait chichement. J’étais en infiltration. Je jouais un double rôle.

- Une seconde nature chez toi, soupira Ianto.

Jack sourit.

- C’est vrai. Mais j’étais le clou du spectacle peu révolutionnaire qui se jouait soir après soir, à travers toute la région.

- Rien a changé depuis. Tu es toujours le clou du spectacle.

Jack releva le menton de Ianto, toujours souriant.

- Tu trouves?

Le jeune homme ne répondit pas.

- Tu as raison. Je suis une curiosité pour tout le monde.

- Ce n’est pas ce que je voulais dire, protesta Ianto en se redressant pour le fixer, avec amour.

- Tu veux dire que je suis le spectacle à la mode, encore aujourd’hui?

- Arrête de faire le paon. Continue ton histoire.

Ianto reposa sa tête sur son épaule.

- Soit. Mais toujours est-il que j’étais la curiosité du moment. Je me faisais sauter la cervelle par balle chaque soir et m’effondrais sur la scène branlante avant de me relever frais comme un gardon sous les yeux ébahis de l’assistance.

- L’homme qui ne pouvait pas mourir. Oui je sais.

- Non, Ianto. L’homme qui ressuscitait. C’est bien plus romanesque!

Jack sentit sans le voir le sourire de Ianto.

- Les balles étaient réelles. Mes morts aussi. C’était bien plus spectaculaire, s’emballait le Capitaine.

- Abrège, tu veux bien. Raconte.

- La misère. Le froid. La fatigue. Nos trois compagnes. Mais aussi les soirs de beuveries. Les rencontres instructives. Les nuits d’orgie…

Jack fit une pause. Ianto aurait du réagir à ce détail. Pas du tout!

- Les nuits où pour se réchauffer on se vautrait tous dans la luxure la plus dépravée. Sans savoir qui on contentait, qui nous réchauffait…

- Tu es lourd, Jack.

Jack fut satisfait. Il se mit à rire tandis que Ianto abandonnait ses bras pour s’avachir contre le sofa.

- Quoi? Je te raconte ce dont je me souviens. Qu’est-ce que tu veux savoir au juste? Rouspéta l’immortel, qui ressentait déjà le manque de l’autre contre lui.

- Je veux savoir quelle genre de vie avaient ces saltimbanques. Pas avec qui tu baisais.

- Tu n’es pas intéressé par mes prouesses sexuelles? Je suis déçu…

Ianto lui jeta un regard noir.

- Je connais tes prouesses. Celles que tu exécutes au boulot comme celles que tu improvises au lit.

- Que j’improvise? Non, je suis outré d ‘entendre ça.

Jack minaudait encore et encore. Il voulait que Ianto lui parle et non l’inverse. Le jeune homme devait se confier à lui, il en avait tellement plus besoin que lui. Jack s’échina à trouver comment l’amener à lui parler mais il n’y parvenait pas. Un silence s’ensuivit. Une pause que Jack apprécia. Les mots sont parfois vains.

- Tu as déjà été…Tu sais si tu as été père? Fit Ianto, hésitant.

Jack comprit. L’ enfant sauvé des griffes des voyageurs de la nuit. Tout lui revint comme une évidence à présent. Ianto avait été bouleversé par cette mission sauvetage. Douloureusement impuissant face aux autres victimes de cette soirée. Et visiblement soulagé, ému aux larmes, par le retour à la vie de ce pauvre chérubin désormais orphelin et seul au monde. La fibre émotionnelle du jeune homme venait de vivre une pénible défaite. Jack s’empara à nouveau des épaules de Ianto et l’invita à reprendre sa place au creux de son épaule attentive et rassurante.

- J’ai dû l’être de nombreuses fois, Ianto. Tu me connais. Généreux dans l’action. Impulsif et endurant. Lui murmura-t-il, très sérieusement. Mais…je n’ai jamais rencontré un seul spécimen de ma progéniture. Je ne suis pas du genre à m’attarder jusqu’au petit déjeuner au lit, ou ailleurs. Ianto?

- Mmm?

- Pourquoi cette question?

Ianto leva les yeux vers lui, l’air vague.

- Je ne sais pas trop. Je voulais savoir. Est-ce que tu aurais aimé connaître l’un d’eux?

Jack inspira profondément. Il ne savait pas quoi répondre. Il ne s’était que trop rarement posé la question lui-même.

- Je suppose que oui. Si ça se trouve, tu es l’un d’eux?

Jack repartait dans la badinerie. Cette conversation prenait une teneur un peu trop sérieuse pour lui. Et vue l’heure tardive, il ne se sentait pas très « métaphysique » pour cela.

- Je connais mon père. Il ne te ressemble pas du tout. Il est petit, trapu, légèrement rondouillard et presque chauve…dit Ianto, amusé.

- Chauve? Quelle horreur! J’espère que tu tiens plus de ta mère et que tu garderas cette adorable tignasse indéfinissable sur le crâne.

Il lui gratta la nuque.

- Oui je tiens plus de ma mère. Sauf pour son goût en matière d’hommes. Elle est médiocre dans ce domaine.

Ianto loucha vers lui, l’œil malicieux.

- Tandis que tu as des goûts de premier ordre sur ce plan. Perfectionniste jusqu’au bout des ongles! S’amusa Jack.

- J’hésite à te donner un surnom définitif. Entre « Monsieur trompe-la-mort » et « Monsieur le père de la vanité ».

- J’aime te savoir ainsi concentré sur moi. Que dirais-tu de « Monsieur -je-veux-mon-Ianto-pour le meilleur et pour le pire »?

Jack s’étonna lui-même. Il voulut s’empresser d’ajouter « non, c’est pour rire » mais Ianto fut plus rapide.

- Quoi?

- C’est ta faute. Tu m’as parlé de père, de mère, d’enfants. Tout ce qui implique mariage. Mais c’était pour rire, Ianto. Dit-il en s’excusant presque.

- Je refuse le mariage. Regarde celui de Gwen. J‘aime autant pas.

Ianto s’en tirait avec une pirouette que Jack trouva bienvenue. Ils se mirent à rire doucement. Ianto pour masquer son trouble. Jack, quant à lui, pour ne pas faire resurgir dans son esprit ses authentiques mariages en bonne et due forme.

Le Capitaine reprit le récit de ses aventures au sein de la troupe de pseudo artistes et raconta à Ianto comment il avait failli mourir une fois de trop.

- Ce soir-là il faisait vraiment froid et il pleuvait des cordes. J’exécutai mon tir comme d’habitude et tombai raide mort sur la scène. Seulement j’avais mal calculé la distance qui me séparait du bord de la scène. Il pleuvait si fort que je m’étais instinctivement reculé pour rester à l’abri sous la tenture. Je suis tombé en arrière et ma tête a heurté le piquet en fer rouillé qui supportait le toit en bâche. Et lorsque je revenais doucement à la vie, je n’ai pas eu le temps d’inspirer l’air salvateur et la foudre percuta le poteau en fer et m’électrocuta net. Je sombrais à nouveau dans la mort.

- Et alors? Demanda Ianto, captivé.

- Alors , je suis resté raide mort une bonne partie de la nuit. Les clients avaient exigé leur remboursement et la troupe avait fait chou blanc à cause de moi.

- Tu n’y étais pour rien.

- C’est vrai. Mais je leur ai donné ma part de bénéfices de la semaine pour ne pas me faire virer. J’ai vraiment cru que ma « particularité » pouvait disparaître d’un coup. Un coup double porté à ma personne et j’étais bon pour le sommeil éternel.

- C’est vrai qu’après ton face à face avec Abaddon tu as failli y rester, lui rappela Ianto.

Le jeune homme le regarda fixement.

- Et si ça t’arrivait, un jour? Si tu tombais face à plus fort que toi et que tu mourrais?

Jack lui sourit.

- Non. Je sais de source sûre que cela ne peut pas arriver. Je suis une aberration. Mon existence échappe à toutes les lois physiques et temporelles. Tu aimes une illusion. Un illogisme.

Ianto retourna se reposer sur son épaule.

- Pas si illusoire que ça. Demande à Alec ce qu’il en pense de cette illusion.

La voix du jeune amant était faible, sans colère apparente.

- Je croyais que nous en avions terminé avec lui.

- Je le croyais aussi.

- Pourquoi m’en reparles-tu, Ianto?

Jack se sentit nerveux. Mais Ianto renforça son étreinte autour de sa taille.

- Excuse-moi. Je n’aime pas quand tu parles de toi ainsi. Tu n’es pas une curiosité, ni une erreur de la nature. Je n’ai jamais vu des erreurs aussi réussies.

Soulagé, Jack continua le récit de ses pérégrinations.

- Je me souviens aussi d’une jeune femme. Elizabeth. Elle était contorsionniste et sacrément souple. On passait pas mal de temps ensemble. Elle était belle, drôle et très acoquinée avec le jongleur de la troupe. Comment s’appelait-il? Clive, oui c’est bien ça. Clive. On en est venus aux mains lui et moi. Il pensait que je flirtais avec Liz.

- Et c’était le cas? Fit Ianto un peu trop vite.

- Ma foi, oui. Il fallait bien que je m’enracine au milieu de cette bande de pochtrons.

- C’était la seule raison?

- Eh bien, autant joindre l’utile à l’agréable. Cela ne m’engageait à rien de m’amuser un peu avec elle.

- Je m’en doute. Rien ne t’engage jamais à rien. Persifla Ianto.

- Ç a signifie quoi?

- Rien. Continue.

Jack s’énerva.

- Non. Qu’est-ce que tu as voulu dire? Je viens de te demander en mariage et tu persistes à dire que je ne veux pas m’engager?

- Bon, tu as fini de me fatiguer, dit Ianto en se levant. Je rentre me coucher.

Jack resta interdit. Ianto alla chercher son manteau.

- Tu pars?

- Que veux-tu que je fasse d’autre? Lui rétorqua le jeune homme en s’habillant.

- Que tu restes ici, pardi! Tu n’as pas envie de faire un petit jeu?

- Non. Je suis fatigué. Je rentre.

- C’est un comble. On n’est même pas mariés et déjà la routine s’installe dans notre couple!

Ianto sourit malgré lui à la blague. Jack se leva, déçu.

- Bonne nuit. A demain.

Et le Capitaine remonta dans son bureau. Ianto l’observa un instant. Jack n’était pourtant pas en colère contre le jeune homme. Il comprenait que ce dernier ait besoin de calme et de sommeil pour se remettre de ses émotions. Ils auraient tout le temps de « jouer » une autre fois. Bien d’autres fois. Car il fallait être en pleine forme physique pour se lancer dans un tournoi ludique avec le maître de jeux qu’était Jack Harkness. Sinon, c’était moins drôle. Et surtout plus rapide.

Toutefois, Jack constata avec regret qu’il n’avait pas été à la hauteur des attentes de Ianto. Le jeune homme avait quelque chose de précis sur le cœur et Jack ne lui avait pas permis d’en parler. Il s’était lancé dans une histoire à peine divulguée, ponctuée de simples anecdotes sans grand intérêt. Il avait joué la facilité, l’esquive. Peut-être avait-il deviné ce à quoi pensait Ianto et peut-être était-ce là la raison pour laquelle il s’était en quelque sorte préservé en racontant succinctement cette période de sa vie. Il réalisa qu’il ne lui avait même pas parlé des voyageurs de la nuit. Il n’avait même pas évoqué la façon dont ces terribles créatures avaient terrorisé la population d’alors. Semant la panique générale. Responsables de la disparition inexpliquée de tant de victimes. Ianto n’avait pas besoin d’en savoir davantage. Ianto cherchait à savoir ce que lui, Jack, avait réussi ou pas lors de son infiltration. Et il pouvait se l’avouer, il n’avait pas réussi grand chose. Autant oublier cet échec cuisant.

Il était très tard lorsque Jack se prépara pour une bonne mais courte nuit de sommeil. Quelque chose le tracassait sans qu’il ne puisse mettre le doigt dessus. Que voulait savoir Ianto au juste? La vénérable dame âgée qu’ils avaient rencontrée à Providence Park avait dit au jeune homme que les voyageurs de la nuit l’avaient touché. Jack avait bien entendu. Il avait perçu le trouble de Ianto lorsqu’elle avait dit ces mots. Le souvenir de cette visite le fit frissonner. Cette vieille femme les avait percés à jour lui comme Ianto. Sans les connaître. Avait-elle été touchée, elle aussi, par ces démons de l’invisible? Si oui, Jack comprenait pourquoi le jeune homme était si déstabilisé par cette mission. Et pourquoi des doutes profonds le tenaillaient. Jack s’en voulut. Il aurait du retenir Ianto et lui donner les réponses qu’il cherchait.

 

« Demain est un autre jour. ».Jack avait l’éternité pour réparer son oubli.

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chrismaz66  (15.05.2010 à 10:35)

- Pourquoi ne pas lui avoir dit la vérité?

- Je ne veux pas qu’il sache tout de moi. Cela ne le concerne pas.

- Vous me l’avez dite, à moi. Il y a une raison à cet aveu?

Alec avait encore piqué au vif. Il était allongé sur l’herbe fraîche dont la senteur épicée leur chatouillait les narines. Il avait ses bras croisés derrière sa nuque. Jack, assis, près de lui, son manteau soigneusement plié à côté, les coudes sur ses genoux, sembla hésiter un instant.

- Je peux tout vous dire, Alec. Je ne sais pas pourquoi mais je pourrai répondre à toutes vos questions…

- Vraiment?

- Demandez-moi ce que vous voulez. Vous verrez bien, fit Jack, qui sentit une main baladeuse sur le bas de son dos. Leurs regards se croisèrent, la main remonta dans son dos. Le visage fin et hâlé de l’expert se rapprocha. Main et visage finirent leur route commune sur la nuque de Jack. Une caresse et un baiser, aussi chaud l’une que l’autre. Jack baissa la tête pour offrir sa peau aux lèvres d’Alec qui plongea sa main dans ses cheveux. Sa bouche gourmande vint lui taquiner le lobe de l’oreille avant de rejoindre la sienne pour un nouveau baiser parfait. Il planta son regard dans le sien, sourit avec malice et posa sa question.

- Es-ce que vous m’aimez plus que vous n’aimez Ianto?

Jack rit avant même d’avoir entendu le prénom « interdit ». Il s’y attendait. Quelle autre question Alec aurait pu vouloir lui poser? Jack lui avait apporté l’occasion en or sur un plateau tout aussi rutilant.

- Quelle originalité, Alec. Si je m’y attendais !!! Plaisanta-t-il.

Il passa son bras autour de la taille de l’expert, tâtant avec plaisir le soyeux de sa chemise blanche.

- En ce moment, je n’aime que vous.

Alec, agacé, dégagea le bras de Jack et se leva en grognant. Lui aussi s’attendait à une réponse de ce genre. Une réponse sans queue ni tête digne du beau ténébreux qui le rendait fou de désir et fou d’amour.

- C’est une marotte chez vous, Capitaine Harkness. Parler pour ne rien dire. Ou plutôt ne rien dire tout en parlant. Oui, c’est la même chose au final.

Jack sourit, amusé de voir son amant fouler nerveusement l’herbe. Il balançait ses jambes l’une après l’autre comme s’il jouait au ballon. Mais il revint rapidement vers Jack qui s’était également levé, et ramassait son manteau.

- Alors?

- Alors quoi? Demanda Jack en enfilant son pardessus.

Alec secoua la tête, à la fois sérieux et espiègle.

- Répondez-moi, franchement.

- Je vous réponds si vous répondez à ma question.

- Allez-y. Je n’ai rien à cacher.

- Est-ce que vous m’aimez plus que Claire?

Perplexes et sur le qui-vive, les deux hommes se dévisagèrent. Qui allait céder en premier? Certainement pas Jack. Pas plus qu’Alec. Ces deux-là se ressemblaient trop pour se surprendre l’un l’autre.

- Match nul, concéda Alec, qui ramassa sa veste. Mais je reviens à ma question de tout à l’heure. Qu’est-ce qui vous empêche de dire à Ianto que vous avez une fille et un petit-fils?

- Je lui en parlerai un jour. Cela peut attendre.

- Soit. Mais je vous trouve frileux sur ce coup. Avez-vous peur de perdre de vos charmes si vous lui disiez tout ce qu’il demande à savoir de vous? Le mystère entretient la fascination.

Jack commença à marcher vers la sortie du parc où ils étaient venus se reposer, seuls, tranquilles.

- C’est mon mystère qui vous fascine? Je suis fort marri. Je croyais que vous étiez fou de mon corps d’athlète . De mes talents physiques. De …

- Avez-vous fini de vous pavaner?

Ils gloussèrent, et une fois sortis du parc, arpentèrent le bitume du trottoir qui longeait Clyde Street

- Cela dit, je suis certain de ne pas connaître la totalité de vos talents physiques. Dit Alec lorsqu’ils traversèrent la rue qui les menait à leur hôtel. Vous avez encore beaucoup à m’apprendre, non?

Jack, jusque là absent, perdu dans ses pensées, retrouva son habituel don pour la pitrerie.

- Je ne suis pas d’humeur professorale ce matin. J’ai envie d’être votre élève, pour changer.

Le visage déboussolé de l’expert l’enchanta. Sans aucune hésitation, il prit Alec par la main et pressa le pas. Il avait hâte de commencer la leçon de choses.

- Je suis expert en chimie, Jack.

- C’est parfait. Tout n’est que chimie entre nous, non?

Alec courait presque pour atteindre la cadence des pas de Jack. Il avait certes des jambes aussi longues que les siennes mais son allure tenait plus de la promenade que du sprint olympique. Ils entrèrent dans le hall de l’hôtel. Alec était hors d’haleine. Jack à peine essoufflé. La réception était déserte. Jack s’empara de la clé accrochée au panneau et entraîna son amant au deuxième étage. Dans le monde idyllique de Jack, les classes commençaient toujours par une longue récréation peu scolaire. Mais dans le monde idyllique de Jack, les femmes de ménage n’existaient pas. C’est en apercevant deux d’entre elles, occupées à refaire leur lit qu’il revint à la réalité. La salle de classe était momentanément hors service. Alec refoula un rire nerveux, et grimaça de dépit. Seulement l’élève Harkness avait soif d’apprendre, et sa main dans celle de son amant, il entra sans crier gare dans la chambre.

- Mesdemoiselles, je vous dispense de ménage pour la journée. Veuillez libérer immédiatement cette chambre. Nous devons procéder à une inspection fouillée de la pièce.

Les deux auxiliaires, qui n’étaient plus des demoiselles depuis un certain temps, le fixèrent, dubitatives. Leurs regards rivés sur les deux mains enlacées, elles firent preuve d’une grande vivacité d’esprit et quittèrent la pièce sur un sourire de circonstance. Jack leur rendit leur sourire, avec un clin d’œil en bonus, et referma la porte derrière elles. Alec se mit à rire.

- Vous ne manquez pas de souffle ! Je suis connu ici, Jack. Nous sommes dans ma ville, à Glasgow. Je tiens à rester discret.

- Alors faites en sorte que je ne sois plus excité comme un taureau dès que je suis avec vous!

- Je suis sérieux, Jack, protesta Alec, alors que Jack s’approchait de lui en enlevant son manteau.

Alec recula, réellement sérieux.

- Assis, élève Harkness! Fit-il sur un ton péremptoire.

Jack obéit et s’installa sur le bord du lit à moitié refait.

- Professeur McNeil?

- Oui, élève Harkness?

- Quel est votre fantasme le plus fou?

Jack s’allongea carrément sur le lit, calant l’oreiller confortablement sur sa nuque. Alec commença à faire les cents pas devant lui, l’air absorbé, il jouait encore au maître d’école. Un sourire illumina son beau visage.

- J’aime assez l’idée de vous torturer pour vous abandonner avec les stigmates de ma passion sur tout votre corps!

Jack haussa les sourcils. Alec avait le don de le surprendre malgré tout. Il ne faisait pas dans la demi- mesure. Il optait pour la surenchère mais sans jamais perdre en crédibilité. Et encore moins en sincérité. Personne ne lui avait répondu aussi follement.

- Grand Dieu ! Quelle éloquence ! Vous me prenez pour le Christ?

Alec ne put s’empêcher de rire. La comparaison était des plus blasphématoires mais Dieu existait sans doute. Du moins pour lui, sinon comment expliquer le magnifique hasard qui les avait réunis? Alec fouilla du regard la chambre.

- Vous cherchez quoi? Lui demanda Jack, toujours installé à son aise.

- Quelque chose pour vous crucifier ! Lui dit Alec sans sourciller. Ah, j’ai trouvé!

L’expert ouvrit le tiroir de la table de chevet et en sortit un mouchoir, qu’il enfonça dans la bouche de Jack. Ce dernier secoua la tête mais ne retira pas le tissu pour autant.

- Notre bien-aimé Seigneur a souffert en silence. dans la plus totale miséricorde.

Le sourire aux lèvres, Alec chercha dans sa sacoche son téléphone portable. Il recula contre le mur, face à Jack, et le prit en photo. Jack cracha le mouchoir et se redressa.

- A quoi vous jouez, Alec?

- Mais vous avez raison. Où avais-je la tête? Cela ne rime à rien si ce n’est pas fait dans les règles de l’art.

Il défit sa ceinture et attacha solidement le bras de Jack au barreau du lit. Mais Jack était parfait, car il avait deux bras. Il défit la ceinture de l’immortel et emprisonna l’autre bras.

- C’est loin d’être original, vous savez. Vous n’êtes pas le premier à vous prêter à ce jeu-là.

- Oh mais je n’ai pas fini. Veuillez vous taire Harkness!

Et il lui remit le mouchoir dans la bouche.

Sous les yeux ébahis de Jack, Alec sortit de la chambre, laissant la porte grande ouverte et descendit par l’escalier. Jack sentit son cœur battre de plus en plus vite. A quoi devait-il s’attendre de la part de ce serpent incontrôlable ? De longues et angoissantes minutes s’égrainèrent avant que Jack n’entende à nouveau des pas dans l’escalier. Mais ce qui l’entendit ensuite le paralysa de honte. Alec revenait mais il n’était pas seul !

- J’avoue que c’est un peu délicat, mademoiselle. Quel est votre prénom?

Jack entendit la femme lui répondre qu’elle se prénommait Alice, et il décida de fermer les yeux. É viter de regarder, Jack le pouvait, mais échapper à la conversation, autre histoire. Alec le paierait cher.

- Vous voyez, disait Alec en entrant dans la chambre, je l’avais laissé là, sur la table. Et il n’y est plus.

- Euh…oui…euh…balbutiait la jeune Alice.

Maudit Alec McNeil. Il le paierait très cher.

- C’est un porte-clé banal mais j’y tenais beaucoup.

- Euh…oui…euh…je comprends bien, monsieur.

Jack, n’y tenant plus, recracha le mouchoir et hurla en ouvrant des yeux qui auraient trucidé Alec si ses prunelles avaient été des lames.

- Alec Mc Neil ! Détachez-moi immédiatement! Alice, cet homme est fou et dangereux. C’est un Docteur Frankenstein à la petite semaine. Il veut me découper en morceaux pour je ne sais quelle sordide expérience !

La jeune Alice restait plantée sur le seuil de la porte, tétanisée. Alec agita les mains pour lui assurer que tout était normal.

- Non, Jack, fit-il en regardant tour à tour le Capitaine et la réceptionniste. C’est juste votre cœur que je veux prendre. Je vous l’ai déjà dit.

Les deux hommes se toisèrent un court instant avant de pouffer de rire. Puis l’expert qui ne perdrait rien pour attendre se retourna vers Alice.

- Je suis désolé, Alice. C’est une farce que je voulais faire à mon ami. Il n’oubliera pas de sitôt cette petite facétie sans méchanceté. N’est-ce pas? Ajouta-t-il en regardant fixement Jack.

- Alice, auriez-vous un petit foulard à nous prêter pour compléter le tableau? C’est pour me bander les yeux. Demanda Jack, totalement remis de ses émotions.

Ce fut au tour d’Alec de rougir sensiblement.

- Jack !

- Euh…non….hum, je suis désolée , je dois vous laisser.

Alice, livide et cramoisie à la fois, disparut en vitesse dans le couloir. Alec referma la porte. Il s’approcha du lit, l’air satisfait, et libéra Jack.

- Quoi? C’est tout? Se plaignit celui-ci.

- Je ne suis pas friand de ce genre de relations.

Alec s’effondra sur lui et l’embrassa sauvagement

- J’ai d’autres armes pour vous torturer. Et il est hors de question que je vous découpe en morceaux, Jack. Je vous préfère entier, tout à moi.

Jack avait déjà oublié de punir l’effronté pour sa blague puérile, il était venu pour apprendre. Et la leçon pouvait enfin commencer.

¤¤¤¤¤¤¤¤¤

Jack fit basculer Alec sur la gauche et se retrouva en position de force, sur son amant. Alec agrippa ses hanches comme s’il voulait éviter de se noyer dans l’azur de ces yeux qui le dévoraient. Les hanches de Jack étaient sa bouée d’air neuf , sa bouffée de liberté, de totale plénitude. Leurs souffles chauds et saccadés se parlaient sourdement, se remplissaient tour à tour l’un de l’autre. Jack inspirait. Alec soupirait. Ainsi de suite, dans un langage muet mais bavard. Les deux hommes ne bougeaient pas , ils s’admiraient en silence. Ils se gorgeaient de souvenirs à emporter avec eux quand le moment viendrait, inéluctablement. Leurs bouches se frôlaient, mutines, rieuses, séductrices. Leurs cils papillonnaient en même temps. Jack brisa cet instant de grâce. Jack était plus un homme d’action que de contemplation. Ses hormones le ramenèrent à la réalité.

- Alors, professeur McNeil. Quelle est la leçon du jour? Fit-il dans le souffle de l’autre.

- Je ne sais pas trop. La fusion des corps en ébullition? Osa Alec.

- Pas plus originale que votre blague de tout à l’heure…

- Je sais bien mais …vous m’écrasez Jack! Avoua l’expert qui remonta ses mains sur les épaules du Capitaine tout confus.

Jack se renversa sur le côté.

- Je suis désolé, Alec. S’excusa-t-il en riant.

- C’est moi qui suis censé vous torturer, pas l’inverse, lui rappela Alec en réajustant sa chemise froissée. Jack lui sourit. Il s’allongea sur le dos et scruta le plafond, l’air vague.

- Á quoi pensez-vous? Lui demanda Alec.

- Á vous.

- Vraiment?

Alec se colla contre son flanc, passa son bras autour de son torse, et faisant glisser la bretelle, lui murmura.

- Voilà qui est original. D’habitude l’on pense à quelqu’un lorsque ce quelqu’un est ailleurs…

- Justement. J’ai l’impression que vous n’êtes pas là et que j’enrage de vous espérer.

Alec s’accouda sur l’oreiller et le fixa, troublé.

- Vous êtes sérieux? Je ne comprends pas.

Jack passa une main sur la joue douce d’Alec. Il était si bien. Il aimait la douceur, la présence apaisante de l’expert. Son humour caustique et ses manières appuyées. Il ne pensait plus à faire l’amour. Seul comptait le calme et l’alchimie du moment. Alec l’interrogeait de ses yeux verts éclatants et pénétrants. Mais lui non plus ne cherchait pas à s’adonner à l’acte sexuel.

Alec était bien. Serein.

- Je suis bien là, Jack, je vous assure. Et tant que vous voudrez de moi, je serais là. Je reviens.

- Non, non ! Ne partez pas !!!!

Jack cria de toutes ses forces. Il bondit hors du lit, les bras en avant, pour retenir son amant…son amant Ianto. Ianto?

- Je reviens, je te dis. Le café est prêt.

Jack se balança d’avant en arrière le temps de retrouver l’équilibre. Les yeux grand ouverts, il constata alors, avec stupeur, l’absence d’Alec, la présence de Ianto. L’absence du lit. L’ennuyeuse présence du Hub. Jack n’avait fait qu’un drôle de rêve, si vrai, si fort, qu’il lui avait semblé le vivre intensément.

La jeune Alice n’existait donc pas? Pas plus que les deux femmes de ménage. Alec n’avait pas osé l’humilier en public pour l’exciter un peu plus?

Jack secoua la tête et cligna des yeux plusieurs fois avant de se rendre à l’évidence. Sa montre indiquait presque 7h et demi et Ianto s’approchait de lui , un mug dans les mains et un questionnement dans les yeux.

- Tu vas bien, Jack? Lui demanda-t-il en lui offrant son café.

Jack l’examinait presque scientifiquement, comme s’il se trouvait face à un fantôme, une hallucination. Qui des deux hommes, Ianto ou Alec, était véritablement une hallucination? Le second, hélas pour lui.

Jack tourna le dos au jeune homme. Il prétexta une affaire urgente à régler depuis son bureau.

- Je vais bien merci. Et merci pour le café. Quand tu auras fini ton petit déjeuner, je te confie la rédaction du rapport de l’Electro, ok?

Sans attendre de réponse, Jack referma la porte de son bureau.

Non, cela ne pouvait pas être qu’un simple rêve ! Jack avait encore le goût d’Alec dans la bouche. Il frissonnait encore à ses caresses dans son dos. Il riait à la blague de potache que l’expert lui avait concoctée. Non, impossible. Mais que fait Ianto dans mon rêve? Ou plutôt, où est mon rêve? La sonnerie de son portable acheva de le réveiller. Cette visite au pays des voyageurs de la nuit l’avait lui aussi perturbé.

Gwen aurait un peu de retard, la toute jeune mariée prenait ses aises avec les horaires. Jack l’autorisa à s’occuper de ses démarches administratives et lui assura que le travail l’attendrait. Il but son café d’un coup, histoire de remettre ses idées en vrac dans l’ordre. Quel rêve ! Mais quel rêve !

La journée sembla s’éterniser. Rien de très palpitant hormis le souvenir encore vivace de ce rêve qui tournait en boucle dans sa tête. Jack déambulait sans but précis dans tous les coins et recoins du Hub. Il n’avait qu’une hâte. Se coucher et revivre ce rêve, ou n’importe quel rêve qui le rapprocherait d’Alec, ce damné expert en communication extra-sensorielle. Il eut un mal fou à se concentrer sur les rapports en cours. D’autant plus qu’il dut travailler avec Ianto la plupart du temps. Ils avaient mené cette mission en étroite collaboration, il fut logique de la coucher sur papier avec l’aide de son amant.

Le remords, la honte et la confusion ne le quittèrent pas de la journée. Tous ses sens lui firent rudement défaut. Il ne voyait pas Ianto. Ne l’entendait pas. Ne le désirait pas. Il était perdu dans une dimension parallèle. Tout lui sembla si opaque, si peu réel qu’il en vint à se demander si la Faille ne l’avait pas tout bonnement englouti durant son sommeil. Mais il ne se leurrait pas, car si tel avait été le cas, Alec serait encore là, tout près de lui, offert et tentateur. Roublard et trouble-fête. Malheureusement rien ne vint le troubler pendant cette drôle de journée interminable et soporifique.

Même la voix faible et l’expression triste de Ianto ne l’émurent pas outre mesure. Jack se rappela pourtant leur conversation de la veille. Le malaise du jeune homme face à cette menace invisible et croupissante dans quelques vieux rouleaux de pellicules de films, et qui pouvait frapper à nouveau à tout moment. C’était là la dernière préoccupation du chef de Torchwood. Pour la première fois depuis bien longtemps, Jack ne brillait guère par sa présence. Tout glissait sur lui comme l’eau sur les plumes d’un canard. Personne n’osa le questionner malgré cela. Ianto connaissait le Jack des mauvais jours et se gardait bien de l’enquiquiner avec des questions indiscrètes. Le jeune homme ne comprendrait pas de toute manière. Jack lui-même ne comprenait plus rien à ce qu’il lui arrivait.

 

Il se réfugia de nombreuses fois sur le toit du Hub pour inciter le soleil à se coucher plus tôt que prévu. Pour qu’il puisse sans éveiller la curiosité de ses employés les renvoyer tous chez eux et reprendre le fabuleux mirage de l’esprit là où il l’avait laissé. Jack souriait de béatitude face à l’immensité de la ville qui se couchait à ses pieds. Quel pouvoir inutile, ridicule que le sien s’il ne pouvait pas remonter le temps d’une seule nuit? Il méprisait son immortalité. Et il l’aurait volontiers échangé contre un autre don. Celui d‘ubiquité, par exemple. Jack se sentait capable de se partager en deux, voire plus, et ainsi contenter tous ses démons. Aussi longue que sa vie, son besoin d’amour était infini, intarissable, exigeant.

Son corps exigeait celui d’Alec, sans relâche. Son esprit s’acharnait à sombrer de nouveau dans un autre songe troublant.

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FIN DU CHAPITRE 1


chrismaz66  (15.05.2010 à 10:37)

CHAPITRE TWO

Merci aux mêmes et aux lecteurs(trices).

Jack était souvent en proie à des rêves puissants, souvent en corrélation directe avec les évènements peu ordinaires de leurs missions. S’il ne montrait que bien rarement ses émotions, ses angoisses, ou ses doutes pendant leurs investigations et sur le terrain, il lui arrivait très souvent d’accuser le coup pendant les rares nuits où il dormait du sommeil du juste.

L’une de ces missions l’avait particulièrement mis mal à l’aise : celle qui avait soulevé le coeur de chacun d’eux par son atrocité et son abjection : celles des cannibales humains. Ianto avait manqué de se faire saigner tel un goret sous les yeux horrifiés de ses amis. Gwen avait cherché à comprendre l’intolérable. A défaut de cela, elle et Owen s’étaient rapprochés naturellement, perdus l’un comme l’autre. Déroutés, sonnés, pétrifiés. Mais à l’issue de cette ingérence forcée dans l’âme la plus sombre de l’humanité, Jack n’avait rien tenté pour ressouder son équipe fortement ébranlée. Il était passé le plus naturellement du monde à la mission suivante. Durant de longues semaines après ce voyage en enfer, Ianto n’avait plus été le même. Il ne parlait presque plus, le visage désespérément hermétique. Aucune blague à double tranchant. Son café aussi avait perdu de sa saveur. Cependant Jack, impuissant ou simplement blasé, n’avait pas pris le temps de le réconforter. Il avait éludé toute allusion à ce sujet. Il ne sentait pas la force de panser leurs plaies. Et les rêves qu’il avait fait à cette époque n’avaient rien à voir avec sa détresse. Il s’envolait dans des mondes oniriques peuplés de folles créatures à contenter sexuellement. Des enquêtes loufoques qui les menaient lui et son équipe de zombis dans des champs de verdure où la luxure et le plaisir des corps régnaient en maîtres. Jack n’était guère surpris de se prélasser contre des corps en demande la plupart du temps. C’était sa façon de se déraciner. Son exutoire favori.

Durant ces orgies imaginaires, Jack ne voyait aucun visage avec précision. Et il ne s’étonnait pas de ne jamais y avoir entrevu celui de Ianto. Son absence le rassurait. Cela attestait de l’efficacité probante de ces évasions mentales et vitales à son équilibre psychologique. Rien de ce qu’il vivait au sein de Torchwood ne pouvait brouiller son désir inconscient de fuite, de libération.

Pourtant les cannibales le répugnaient. Et il n’oublierait jamais leurs visages tordus par la folie la plus noire. Lui seul avait échappé à leur emprise. Jack les avait tous vaincus. Il avait sauvé toute son équipe. Personne dans ce village de malédiction n’avait pu mettre la main sur lui.

- Cela me surprend. De votre équipe, vous êtes de loin, de très loin, le seul que j’aurais envie de manger. Et ce à toutes les sauces, plaisanta Alec. Votre chair est si ferme. Vos lèvres si fondantes. Votre peau si parfumée. Un véritable régal royal.

Jack sourit. Il ne se lasserait jamais d’entendre parler de lui aussi divinement. Il en perdrait presque le sens des réalités.

- Ils ne savent pas ce qu’ils ont perdu!

Jack se redressa sur le sofa.

- Vous êtes incroyable. Dit-il, sincèrement choqué. Je vous raconte la plus sordide, la plus diabolique histoire que mes agents aient eu à subir et vous ne pensez qu’à la gaudriole !

Alec, assis à côté de lui, passa sa jambe droite par-dessus les cuisses de Jack et se rapprocha pour lui caresser les cheveux de sa main droite.

- C’est que je travaille aussi pour Torchwood. Cette histoire est écoeurante, je vous l’accorde. Mais elle ne m’émeut pas particulièrement. En revanche je suis tout émoustillé à l’idée de vous imaginer en train de vous faire manger tout cru.

Alec l’embrassa amoureusement. Jack répondit à son baiser. L’expert lui mordit la lèvre inférieure avec la rage d’un fauve. Au point de le faire saigner. Jack le regarda, déconcerté. Alec lécha le sang qui coulait sur son menton. Et il lui mordit le menton.

- Hey, votre séance de torture a commencé ou je ne m’y connais pas? S’énerva Jack en se touchant le menton qui visiblement ne saignait pas.

Alec rit pour toute réponse et continua ses assauts de prédateur affamé, de vampire assoiffé. Il lui mordit l’oreille, puis le cou. Non sans sauvagerie. Chaque attaque était excitante et douloureuse. Mais Jack n’était pas douillet. Lorsque le serpent transformé en lion descendit pour lui mordre l’épaule, Jack eut une légère appréhension dont il fit part à son amant déluré.

- J’ose espérer que vous n’allez pas utiliser vos canines sur la totalité de mon corps, avoua-t-il en respirant de plus en plus fort. Je connais une partie de mon corps qui ne supportera pas un tel traitement.

Alec releva la tête, un sourire perfide aux lèvres, et ignora la requête.

- Je suis sérieux, Alec. Insista le Capitaine, qui se laissait tout de même dévorer sans la moindre résistance.

- Ne vous inquiétez pas, Jack, fit la voix étouffée de l’expert. Alec était déjà arrivé à ses mamelons durcis par le plaisir qui montait en lui.

- Je réserve un autre …traitement à cette partie de votre anatomie.

- Quel genre de traitement? Demanda Jack un peu effrayé malgré tout par les manières très cavalières de cet assaillant expérimenté. Aie!

Les tétons venaient de subir le même sort. Très, très douloureux!

- Alec!

- Oui?

- Vous me faites mal, vraiment.

- J’espère bien.

Jack le repoussa en le tenant par les épaules. Il l’obligea à relever la tête.

- Qu’est-ce qui vous prend?

- Je veux juste vous faire comprendre que le cannibalisme peut avoir du bon, chuchota Alec, sans sourire.

Jack dut l’empêcher de retourner à son plan de dévastation sur son corps endolori en le maintenant fermement éloigné de lui.

- Alors, imaginez une glace au lieu d‘un croque-monsieur !(dommage que le jeu de mot ne marche pas en anglais; ah note de l‘auteur))

La métaphore eut l’air de plaire à l’expert. Ses yeux rieurs considérèrent la proposition alléchante.

- Une glace dites-vous? Pêché de gourmandise. Vous serez puni pour cela!

Exaspéré, Jack soupira. Il n’arriverait à rien contre ce serpent. Contre ce lion. Jack eut l’impression qu’il allait faire l’amour à un zoo! Secouant la tête, il lâcha les épaules et se prépara à souffrir en silence, comme notre vénéré Seigneur. Mais ce fut sans compter la voracité de l’homme. Jack gémit de douleur…de plaisir? Dès qu’il sentit la bouche avide s’occuper de la partie sensible de son anatomie précédemment évoquée. Alec parcourait son membre lentement, trop lentement à son goût. D’une tape légère sur sa tête, Jack l’enjoignit à accélérer mais Alec n’était pas pressé. Il quitta son entrejambe pour ses lèvres. Jack était à la merci du bon vouloir de ce satané dévergondé.

Le baiser consommé, Jack implora d’une voix cassée.

- C’est quand vous voulez. Je n’ai pas que ça à faire. Les glaces fondent sous la chaleur et il se trouve que vous me donnez vraiment très chaud.

- J’adore nos conversations, Jack. Mais vous avez raison. J’ai besoin de me désaltérer au plus vite.

Et l’expert abrégea le supplice du Capitaine. Tendrement mais avec grand soif.

Jack n’eut rien à faire, si ce n’est savourer le plaisir intense que le gourmet adepte des sucreries lui procura sans complexe.

Alec revint sur ses lèvres pour mêler son odeur virile à celle de sa langue humide. Puis il s’installa à califourchon sur Jack, ses bras autour de sa nuque. Et il s’immobilisa, ses yeux dans les siens.

- Et quelle est la suite du menu? S’enquit Jack qui fit glisser ses grandes mains sur les reins de l’homme.

- Vous aimez les glaces, Jack?

Le rire du Capitaine résonna dans toute la base Torchwood.

- J’avoue que je n’en suis pas fanatique, commença-t-il avant de se rétracter sous le regard de reproche de l’expert.

- Soit. Mais je vous préviens, lui murmura-t-il à l’oreille. Ce que je préfère dans les glaces américaines, c’est le cornet de gaufre…

Le visage de l’autre se crispa. Alec n’était pas le dernier à admirer les magnifiques dents blanches, et longues, du Capitaine. Jack les dévoilait assez souvent pour se fendre de sourires capables de charmer le plus vil des serpents. Mais, bizarrement, à cet instant, Alec les voyait plus comme une armée de soldats immaculés et rompus à toutes les batailles. Et si le Capitaine aimait croquer les gaufres, l’expert s’inquiéta pour son intégrité physique. Jack riait encore, enchanté de piéger son amant à son propre jeu. Lui volant la vedette avec éclat et sournoiserie.

- C’est que je risque de perdre bien plus que mon amour propre si je vous laissais faire.

- Alors quoi? Vous me remettez à la diète? Fit Jack, boudeur.

Alec sourit et retira sa jambe pour s’asseoir correctement, sagement. Toujours rieur, Jack contourna de sa main la hanche d’Alec pour venir caresser le membre, qui venait de l’échapper belle. Embrassant son amant, et le caressant de ses doigts agiles, il lui donna en retour le même plaisir qu’il venait de vivre. Il se préservait ainsi de tout risque de diabète élevé. Alec se libéra dans sa main, qu‘il saisit pour la frotter sur son pantalon. Hygiène en toute occasion. Sans perdre une seule seconde il fit partager son extase à Jack en l’embrassant à nouveau.

Les deux amants avaient goûté au même repas sensuel et recommandé par les normes de santé publique qui ne concernaient que les amoureux. Une communauté des bienheureux à laquelle Jack et Alec McNeil appartenaient totalement, et pour toujours. C’était leur secret adorable. Leur seule liberté.


chrismaz66  (16.05.2010 à 13:38)

Jack se surprit lui-même. Il n’avait pas pour habitude de se contenter de si peu alors que tout les autorisait à approfondir leur échange. Alors que rien ni personne ne viendrait les déranger avant longtemps. Mais d’avoir lu le plaisir dans le regard de l’autre lui avait suffi comme s’il venait de terminer le plus long des marathons sexuels. Il était comblé, et las.

Alec se leva pour aller se nettoyer dans la kitchenette du Hub. Il revint avec un torchon qu’il tendit à Jack.

- Je devrais retourner à mon hôtel, lui dit-il en enfilant sa chemise.

Jack le regarda, un peu dérouté.

- Pourquoi me regardez-vous avec ces yeux-là, Jack?

- Parce que je n’en ai pas d’autres, plaisanta Jack, mais il ne souriait pas. Sa réplique était pourtant spirituelle. Alec l’apprécia à sa juste valeur d’ailleurs. Il rit de bon cœur. Puis finissant de se rhabiller, il fouilla dans sa poche à la recherche de son portable, qu’il consulta en silence, toujours sous le regard vague de son amant.

- Des messages urgents? lui demanda celui-ci en se levant.

Concentré sur la lecture de ses messages, Alec ne répondit pas. Il secoua simplement la tête.

- Alec? Fit Jack en se rapprochant, le torchon dans les mains.

- Oui Jack?

- Je suis désolé d’avoir renversé la tasse. Pardon, s’excusa-t-il en jetant le torchon sur son épaule.

- Tu me dis « pardon » maintenant? Qu’est-ce qui te prend? Et rends-moi ce torchon, tu veux?

Jack écarquilla les yeux et se dandina à nouveau de gauche à droite. Il était en train de s’excuser auprès de …Ianto. Toujours Ianto!

- Quoi?

- Tu as l’air bizarre, Jack. Tu vas bien?

Ianto lui faisait face, soucieux.

- C’est assez urgent, oui. Il faut que tu les rappelles au plus vite! Lui conseillait Ianto qui repartit servir les cafés.

Jack ne comprenait rien à rien de ce que baragouinait le jeune homme.

- Quoi? Répéta-t-il, intrigué.

- Le message de ce matin, c’est urgent. Tu dois les rappeler maintenant ! Articula Ianto depuis le coin cuisine, comme s’il s’adressait à un enfant qui n’avait rien compris à la leçon du cours élémentaire.

Jack mit un certain temps à émerger. Encore un de ces foutus rêves? Ou bien était-il en train de perdre la raison? Une foison d’images vint danser devant ses yeux, toutes aussi persistantes qu’irréelles. Sans donner l’impression d’être à côté de la plaque, Jack réussit tant bien que mal à récolter les informations qui manquaient à la compréhension du message en question. Il devait immédiatement prendre contact avec le ministère pour une histoire de précaution sanitaire. Quand il eut enfin tous les éléments en main, Jack s’isola dans son bureau. C’est à peine s’il avait remarqué la robe échancrée que Tosh arborait, elle qui d’habitude dissimulait autant ses charmes féminins que ses sentiments intimes avec virtuosité.

Une fois seul, Jack soupira fortement. Il se perdait littéralement dans les méandres de son esprit tortueux. Mais que lui arrivait-il? Un instant plus tôt il était dans les bras d’Alec, en paix avec ses sens et ses désirs assouvis. L’instant d’après voilà qu’il s’excusait d’une maladresse dont il n’avait pas le moindre souvenir. Il ne dormait pas cependant. Ce fut bien la seule chose dont il était convaincu. Il ne dormait pas. Il ne pouvait donc pas, en toute logique, être en plein rêve érotique. Alors que se passait-il? Tout allait pour le mieux entre lui et son équipe. Entre lui et Torchwood. Tout allait à merveille entre lui et un Ianto désormais décomplexé et faussement ingénu, pour le plus grand plaisir du Capitaine. Alors quoi?

Il n’eut pas le temps de s’interroger au-delà. Tosh vint cogner à la porte pour lui parler du fluide qu’il avait récupéré quelques jours auparavant, avant la mission des voyageurs de la nuit. La brillante scientifique avait terminé d’analyser la substance qui dégoulinait depuis dieu savait quand dans une cave à vin de la banlieue est.

- Rien de folichon, Jack. Aucune propriété curative ni bénéfique pour la santé des humains. Je pencherais pour une sorte de sperme alien…

- Quoi? S’exclama Jack, fort intéressé.

Tosh sourit timidement.

- Oui. Tu as bien entendu. C’est bourré de spermatozoï des, enfin quelque chose de similaire à la semence masculine. Des aliens sont venus procréer ici et nous ont laissé la preuve de leurs ébats!

Jack ouvrait des yeux de plus en plus grands à mesure que Tosh expliquait l’inimaginable. Il conclut son exposé d’un rire bien gras.

- C’est la meilleure ! Et tu crois qu’on peut cloner leur espèce à partir de …leur machin? Demanda-t-il très sérieusement.

- Tu délires, Jack ! Dois-je te rappeler qu’il est indispensable d’avoir un ovule à féconder, même en matière d’aliens? La moitié de la population est féminine, tu sais, ici comme ailleurs.

- Bah, vous et votre manie de tout cataloguer, râla le Capitaine en quittant son bureau. Cette histoire de coï t intergalactique lui avait fait oublier son désordre mental. Il s’amusa à imaginer quel genre de créatures avaient eu le culot de venir ici bas pour s‘envoyer en l‘air.

- Rassure-moi, Tosh. Ce truc est sans danger?

Ils descendaient rejoindre le reste de l’équipe.

- Aucun danger, à ma connaissance.

- Parfait. J’aime autant ne pas avoir à le manipuler de nouveau, avoua Jack, en grimaçant à l’idée d’avoir trempé ses mains dans cette gelée dégoûtante. Laissons-le moisir en sécurité.

Tosh rit en remontant ses fines demi-lunes.

- Une chance qu’Owen ne soit pas tombé dessus en premier, ajouta-t-il. Quoique j’aurais adoré voir sa tête en apprenant les résultats de tes analyses. Bon boulot Tosh.

Plus tard dans l’après-midi, Jack retrouva Ianto et, ensemble, ils se mirent à parler de cette découverte peu banale et source de nombreuses blagues salaces.

- Elle est où à présent? Demanda le jeune homme.

- Pourquoi? Tu veux la toucher, encore? Plaisanta Jack.

Ianto devint raide.

- Je n’y ai jamais touché, Jack. Encore heureux!

- C’est vrai. Oh tu sais, c’est une substance comme une autre.

Le visage douloureux de Ianto indiquait qu’il ne partageait pas son avis.

- Mouais, c’est assez…déroutant, quand on y pense, concéda Jack.

Owen ne tarda pas à les rejoindre et à alimenter de plus belle leur discussion déjà très orientée sexuellement.

- C’est de la gelée à la menthe sauf qu’elle est verdâtre, dit-il, souriant jusqu’aux oreilles. Et elle a une odeur ou pas?

- Oh, tu es dégoûtant Owen, fit Ianto, visiblement choqué.

- J’avoue que je n’ai rien senti de particulier, rétorqua Jack devant les deux hommes dont la bouche s’allongea en même temps.

- Quoi? C’est la base de notre boulot ! Utiliser nos 5 sens pour tout diagnostic. Je n’ai fait que mon boulot, et mon constat est sans appel : c’est une gelée verte, poisseuse et sans odeur ! Affaire classée!

Ravi de la mine déconfite de ses deux jeunes employés, Jack se leva, presque bondissant et s’éloigna , le sourire aux lèvres. Il entendit nettement Owen le traiter de fou ou de quelque chose d’approchant et son sourire se fit plus large. Cela l’amusait drôlement. Et il avait besoin d’amusement. Car la confusion de son esprit allait le rattraper et il décida qu’il ne dormirait pas de la nuit, quitte, pour y parvenir, à boire tout le contenu du percolateur de Ianto. Il voulait tester ses capacités mentales et physiques et repousser ses propres limites. Tant qu’il n’en aurait pas le cœur net, Jack traînerait âme errante et indécise. Et cela n’était pas en adéquation avec son poste de chef envahissant et déterminé.

Un détail vint pourtant démolir son plan nocturne. Ianto. Ce dernier lui fit comprendre, en musardant dans le Hub, et en se délestant peu à peu de ses vêtements, qu’il aimerait bien passer la nuit avec lui. Jack n’eut pas le cœur de lui refuser quoi que ce fut. C’est donc non sans une certaine appréhension que le Capitaine se coucha à ses côtés, après l’amour, en attendant que son amant s’endorme. Une fois certain que celui-ci rêvait paisiblement de lui, (Ianto rêvait de lui tout le temps), Jack se leva doucement pour vider deux tasses de café serré et monter sur le toit. La vigilance et la peur de tomber le tiendraient éveillé jusqu’à l’aube. Le froid se chargerait quant à lui de raidir ses membres. Il ne fallait surtout pas qu’il s’endorme. D’une, pour éviter d’écraser un passant dans sa chute. De deux, pour ne pas rêver d’ Alec et son entêtante perfidie.

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Jack dut néanmoins rentrer car la nuit devint bien trop glaciale. Il était encore trop tôt pour redémarrer la journée. Il fit chauffer un reste de café qu’il engloutit d’une traite. Commença alors une longue et pénible attente. Il se mit sans raison cohérente à penser à Gwen et à son heureux mari. Ce brave homme droit et solide, Jack l’estimait déjà beaucoup sans même le connaître vraiment. Il pensa qu’une invitation à dîner serait une agréable opportunité de faire plus ample connaissance avec le dévoué bonhomme que Gwen avait choisi pour compagnon officiel. Maintenant que Rhys avait été mis dans la confidence quant au travail ultraconfidentiel de son épouse, autant gagner sa confiance et ainsi préserver la vie privée de Gwen. La jeune femme vivait ce bonheur de pouvoir concilier sa vie de femme et d’agent expérimenté au service d’une institution aussi trouble et usante que Torchwood. Jack se rassurait de savoir cela encore possible. Le couple Williams-Cooper en était la plus belle illustration.

- Vous aussi vous avez quelqu’un qui vous aime et que vous aimez, dit Alec.

- De qui parlez-vous? Lui demanda Jack en couvrant sa joue de baisers piquants.

- De moi, bien sûr. Avoua Alec, sans rire.

- Vous quitteriez votre femme pour moi?

Jack osa un regard inquisiteur, sans vraiment attendre de réponse.

- Absolument.

Alec ne riait toujours pas. Il ne souriait même pas.

- Vous êtes sérieux?

- Oui.

Sans savoir pourquoi, Jack pensa que son amant disait vrai. Mais ce n’était juste pas possible. Impensable. Inouï .

- Non, vous ne le feriez pas. Je ne le mérite pas. Je n’en vaux pas la peine.

- Personne n’en vaut la peine, Jack. Ni vous ni Claire, ni moi. Personne.

- Que voulez-vous dire?

- Simplement que l’amour n’est pas une question de quota, de mérite ou de bons points à distribuer. L’amour est libre. Ce sont les amoureux qui refusent de l’être.

Jack lui décocha un sourire traître.

- Je ne vous savais pas aussi philosophe, Alec.

Le rire merveilleux d’Alec le fit frissonner.

- Vous ne savez pas grand-chose de moi, Jack.

- Alors dites-m’en plus, supplia Jack, d’une voix tentatrice.

- Tout ce que vous voudrez. Et même au-delà.

Les deux hommes échangèrent un baiser tendre.

- Que voulez-vous savoir?

- Tout ! Grogna Jack, qui le renversa sans ménagement sur le lit.

- Et après, ce sera votre tour de tout me dire de vous? Tout ce dont tu n’avais pas eu le temps de me dire la première fois? Minauda Alec en s’installant contre l’oreiller, prêt à lui raconter sa vie. Jack sauta sur le lit et vint l’imiter, en croisant les jambes comme lui. Les mains jointes derrière sa nuque, comme lui.

- Oh oh, fit Jack, si vous avez cinquante ans à me consacrer, ça devrait pouvoir se faire.

- J’ai toute la vie pour vous.

Une fois encore, malgré l’énormité de l’aveu, Jack le trouva sincère. L’idée de le savoir réellement partant pour tout quitter pour lui lui noua la gorge. Le Capitaine commençait à bien le connaître et s’il ne rechignait pas à le provoquer sans cesse, Jack discernait à présent parfaitement le vrai du faux dans la voix d’Alec. Il savait interpréter le moindre de ces mots, choisis à bon escient et toujours révélateur de son humeur du moment. Alec était d’humeur sombre, aujourd’hui, et emprunte de mélancolie.

- Vous êtes prêt à entendre l’histoire de ma petite vie, Jack?

- Oui, tout à fait prêt. Et impatient, réussit-il à dire.

- Je suis né dans la banlieue nord de Glasgow, il y a…quelques années.

- Soyez plus précis, Alec. Combien d’années? Fit Jack, caustique.

- Une brouette d’années au regard de votre âge canonique ! Bref, continua Alec, plus sérieusement. J’ai eu un frère aîné. Il est mort dans un accident de voiture il y a …quelques années.

Jack se garda bien de demander combien. La nouvelle l’ébranla.

- Ma mère est une femme fière et sans instruction comme beaucoup de femmes de sa génération. Je suis sa plus grande réussite.

Alec parlait sans orgueil. Il badinait encore pour le plus grand plaisir de Jack qui l’écoutait religieusement, les yeux fermés.

- Mon père travaillait dans une usine de métaux. Il nous a quitté l’année dernière, emporté par un cancer du larynx.

Jack toussota. Il se sentit mal à l’aise.

- C’est votre vie que vous me racontez ou bien un roman de Dickens? Tenta-t-il pour dédramatiser le récit douloureux qu’il entendait.

- Jack, soupira Alec en se penchant sur lui. La vie est faite de pertes. Vous êtes bien placé pour le savoir, non?

- Veuillez me pardonner. C’est juste que vous commencez par le plus triste. Est-ce intentionnel? Votre but est peut-être de m’amadouer…

Alec poursuivit sans relever la pique.

- J’ai travaillé dans un magasin de bricolage pour payer mes brillantes études.

- Je comprends mieux votre inclination pathologique pour la manipulation de tout ce qui tombe entre vos mains.

Alec sourit.

- Absolument. C’est d’ailleurs une des vendeuses de la boutique qui m’a déniaisé, lâcha Alec, sans émoi.

Jack ouvrit un œil, la comptine devenait intéressante.

- Soyez plus précis, Alec. Son petit nom? Son âge? La couleur de ses cheveux? Avait-elle des taches de rousseur? Du poil aux pattes?

À nouveau le rire de l’expert l’enchanta.

- Non, Jack. Vous ne saurez rien.

Jack, tous yeux ouverts, se redressa contre le mur du lit. On venait de lui faire miroiter une friandise sous le nez et voilà qu’il en était privé.

- Parlez ou je vous égorge!

- Très bien, je cède.

Alec s‘affaissa un peu plus dans le lit douillet, et joignant les mains sur sa poitrine, il raconta sa première fois à un Jack tout ouie.

 


chrismaz66  (16.05.2010 à 13:40)

La jeune femme s’appelait Fiona, elle était d’origine anglaise, et n’était pas plus âgée qu’Alec. Quel âge au juste? L’expert s’amusa à ne pas le révéler pour le faire enrager de curiosité. Jack tomba d’accord avec lui-même en affirmant que le jeune É cossais avait du perdre sa virginité bien plus tard que la moyenne. Le subterfuge ne prit pas. Et Alec, même blessé dans son orgueil par une telle vacherie, ne se laissa pas berner. Ils l’avaient « fait » chez les parents de Fiona, un dimanche pluvieux, comme bien des dimanches à Glasgow, plaisanta encore Jack. Alec n’en menait pas large mais Fiona avait su le mettre en confiance et tout s’était passé à merveille selon ses dires, en comparaison à ce qui se dit souvent des « premières fois », évidemment. Alec fréquentait Fiona depuis quelques mois. Elle n’était ni belle ni ingrate. Un physique commun mais une nature qui l’était beaucoup moins. Et peu avare de ses charmes discrets et redoutables. Pas de taches de rousseur, puisqu’elle était blonde comme les blés, au grand dam de Jack qui avouait un certain penchant pour les rousses et les …roux. Ils ont une odeur particulièrement érogène qui lui montait automatiquement au cerveau.

- Parce que vous appelez cela ainsi ?

Alec profita du rire éclatant de son amant pour continuer le récit de son amour de jeunesse. Jack ne cessait de l’interrompre pour placer un bon mot ou une remarque désobligeante entre deux aveux. Alec se livrait trop facilement, détaillant chacune de ses caresses, chacun de ses gestes. Jack n’en demandait pas tant, malgré sa curiosité. Il eut l’impression d’être un psychanalyste en pleine séance. Lorsque l’expert lui raconta comment il avait connu la jouissance du corps pour la première fois, en dehors de ses expériences solitaires, Jack crut s’étrangler.

- C’est bon, je vois bien la scène ! Le coupa-t-il, gêné sans savoir par quoi exactement, mais gêné tout de même.

- Je suis désolé. Je m’emporte, s’excusa Alec. Je n’ai jamais su si j’étais réellement amoureux d’elle. Je ne le pense pas. Je crois que j’ai été amoureux de ma femme, uniquement

Jack fit la moue en détournant le visage. Drôle de conclusion. Pourquoi lui parlait-il tout à coup de Claire? Jack ne dit rien. Il ferma les yeux. Il ne voulait surtout pas surenchérir à ce dernier coup de griffe.

- Et puis Fiona a déménagé. Je la croise parfois, elle est mariée et a deux garçons adorables, aussi blonds qu’elle. Son mari est dans la police, il est très instruit et très drôle. Elle l’a échappé belle avec moi !

- Je me doute bien. Fit Jack, laconique.

- Pourquoi dites-vous ça? Lui demanda Alec, passablement offensé.

- Vous n’êtes pas un modèle de fidélité, Alec. J’en suis la preuve flagrante.

- La faute à qui? Je vous le demande !

Alec était en colère.

- Je vous écoute ! cria-t-il hors de lui.

Jack ne comprenait pas du tout ce soudain excès de rage. Il ne disait que la vérité, rien de plus.

- Alec, je vous prie de m’excuser…bredouilla-t-il.

- Non, c’est trop facile, Jack! Vous me séduisez et ensuite vous me traitez de mari volage? De quel droit osez-vous?

Jack se leva du lit, ramassa son manteau et sans le regarder, il lâcha, d’une voix posée.

- Qui est venu dans mon bureau pour me baiser? Qui m’a embrassé comme un veau qui vient de naître et qui tête déjà sa mère? Qui?

Jack était prêt à partir, son manteau sur le dos. Sa détresse sous le crâne. Puis il remarqua un détail qui jusque là lui avait complètement échappé. La voix d’Alec était forte, ses lèvres pincées, ses poings serrés enfoncés dans les draps. Mais ses yeux, ses grands yeux vert-gris, ou gris-vert , ces beaux yeux-là riaient. Jack le dévisagea de biais et analysa rapidement la situation. L’expert n’avait pas bougé d’un pouce. Tout dans son esprit se mit à tournoyer. Tout se mit à valser au rythme lent et hypnotique des feuilles d’automne, qui s’écrasèrent sur le sol moelleux de la chambre dans un rire de farfadet espiègle et malin. Alec riait aux éclats.

- Vous êtes d’une naï veté, Jack, parvint-il à articuler entre deux rires. J’ai des raisons de vous en vouloir mais bon sang…

Alec vint le rejoindre pour glisser les bras sous son lourd manteau, autour de sa taille.

- Pas pour si peu. Comment pourrais-je vous en vouloir pour si peu?

Alec cueillit ses lèvres. Jack se déroba, reculant vivement mais les tentacules de l’autre le serraient si fort.

- Vous trouvez que ce n’est pas assez? Je vous ai poussé à tromper votre épouse. Permettez-moi de considérer cela comme un exploit ! Dit-il entre le sourire et le remord.

Alec le serra encore plus fort. Il frotta sa joue contre celle de Jack.

- Vous n’êtes pas responsable. Je suis le seul à blâmer. C’est moi qui me suis jeté sur vous, j’assume totalement et je vous saurai gré de ne pas vous soucier des cas de conscience qui sont les miens depuis que je vous connais. Ce sont mes problèmes , pas les vôtres.

Alec vint cueillir à nouveau ses lèvres qui cette fois ne se dérobèrent pas.

- La morale n’est pas sauve pour autant. J’aurais dû vous raisonner. Mais comment ? Je ne sais pas être raisonnable ! Alors pour quelles autres raisons m‘en voudriez-vous?

- Ah, soupira Alec, songeur. Vous ne voulez pas laisser tomber votre maudit boy-scout pour moi. Alors que je suis prêt à tout quitter pour vous…

Mal à l’aise, Jack desserra l’étreinte autour de sa taille.

- Je n’en crois pas un mot. Seuls les actes comptent. Tout le reste n’est que duplicité et intentions néfastes, calculatrices.

- Et si avec votre Faille, nous faisions disparaître Claire McNeil et Ianto Jones dans un monde parallèle, nous serions libres de nous aimer jusqu’à notre …mon dernier soupir.

- Vous abusez trop de vos fameux whiskies, mon ami, vous en plein delirium.

Les deux hommes immobiles se reflétaient la même image. Celle d’un homme perdu, les mains dans les poches de son pantalon, souriant péniblement mais certain de vivre un amour indicible. Un amour au pouvoir despotique et insoumis.

- C’est sans issue, Alec. Vous le savez aussi bien que moi.

- Vous voyez que vous n’êtes si déraisonnable que vous le prétendez. Pourquoi devons-nous nous retrouvés ligotés à ces fichus carcans ? Pourquoi ne pouvons-nous pas graver notre histoire ailleurs que dans le marbre funéraire? Tout cela est stupide, Jack!

- J’ai inscrit bien des histoires sur tous les supports existants et même sur d’autres dont vous ne soupçonnez même pas l’existence, lui dit Jack, soudain léger. Il ne tient qu’à vous de choisir l’emplacement idéal pour votre histoire. Sur ma peau par exemple, qu’en dîtes-vous?

Le Capitaine se rapprocha et renversa Alec sur le lit.

- J’ai une peau coriace, allez-y, je ne suis pas une pleureuse. Et vous savez quoi?

- Non?

Jack s’allongea de tout son poids sur l’expert qui inspira profondément. Si Jack ne bougeait pas, pensa Alec, il lui faudrait s’inscrire à des cours d’initiation de plongée en apnée.

- Vous parlez trop ! Et vous pensez trop ! Les actes, je ne réagis qu’aux actes !

- Soit. Mais dans cette position, ne vous attendez pas à des cascades, je suis littéralement compressé. Qu’avez-vous donc à vouloir m’écraser ainsi tout le temps?

Jack se rendit compte de son imposante corpulence. Il se releva, emprisonnant les jambes de l’autre entre ses genoux et retira son manteau tout aussi encombrant.

- Désolé.

Alec le saisit par la ceinture et l’attira vers lui.

- Maintenant je suis tout à fait libre de mes actes. Donnez-moi votre peau, comme convenu, et vous ne serez pas déçu.

- Je suis du genre blasé, mon cher. Vous avez intérêt à ne pas me décevoir. Je suis difficile à contenter.

Alec perdait patience à tenter de lui défaire sa chemise.

- Tout est dans la qualité, Jack, marmonna-t-il, et je suis un perfectionniste dans l’âme. Mais que diable votre chemise va me rendre fou…

Jack se souleva légèrement et déboutonna la chemise rebelle.

- Perfectionniste ou pas, dit Jack en riant, je vous promet de vous épuiser à la tâche.

Alec lui attrapa le visage entre ses mains, d’un geste brusque.

- Vous parlez trop, Harkness. Taisez-vous!

Les situations où Jack renâclait à obéir à un ordre , d’où qu’il vienne, étaient légions. Mais il obéit sagement. Offrant sa terre promise - sa peau- au talent de l’expert, qui n’allait sûrement pas démériter, une fois de plus.

Sa peau fut le terrain de jeux vite dévasté par la passion d’Alec. Griffures, pincements, claques, et bien entendu, morsures pimentèrent copieusement ces agapes cannibales. Mais ce qui tira à Jack, le robuste, un lourd cri de douleur, à la limite du supportable, ce fut lorsqu’il sentit son poignet droit se tordre violemment dans un craquement sec. La douleur fut telle que le Capitaine se dégagea de toutes ses forces et n’osa plus bouger le poignet, pensant qu’il le lui avait tout simplement brisé.

- Je te préviens, Harkness. Je veux ce qui me revient et tu vas me le donner !

Jack se massait délicatement le poignet, grimaçant sous la souffrance du coup porté. Puis il jeta son œil le plus haineux vers son adversaire. John Hart souriait, avec son habituel rictus d’escroc patenté. Il caressait pourtant Jack de ses yeux plissés en un aveu explicite. Jack ne décolérait pas. Son ancien amant venait de lui briser la main et il l’invitait tacitement à une réconciliation immédiate? Le sang lui monta à la tête. Jack constata, après plusieurs mouvements souples, que son poignet n’était finalement pas cassé. Ce qui ne minimisait en rien l’insolence de John et Jack se promit de nécroser l’esprit tordu de ce dernier, dès que la douleur dans sa main aurait disparu.

- Alors?

- Qu’est-ce que tu veux?

- Le fluide. Tu es devenu sourd? L’onanisme te perdra, Jack. Où est-il?

- Quel fluide? S’énerva Jack.

John Hart baissa la tête, excédé de devoir se répéter. Il s’approcha de Jack, qui se massait encore le poignet.

- Dépêche-toi, Jack. J’ai autre chose à faire !

- Le fluide vert estampillé TW0S58 qu’on a prélevé dans la cave à vin de St-Adam?

- Oui, celui-la même, Jack. Il m’appartient. Tu vas me le rendre immédiatement où je te brise les deux bras pour de bon, dit John d’une voix lasse.

- C’est un sperme alien ! Tu n’es pas un alien !

- C’est une longue histoire. Ta phrase fétiche, pas vrai? Alors pas d’explications et exécution !

Jack soutint le regard noir, puis il amorça une manœuvre de séduction.

- Tu as baisé avec un alien? Je veux dire récemment? Il a dû lui aussi te prendre pour un alien ! C’était comment, tu sais que ça m’a toujours excité…

- Remballe ta panoplie de Casanova. Tu es pathétique. Allez, je vais perdre patience!

Jack dégaina son autre arme. L’art de la négociation.

- Je te le donne si tu me dis où est mon frère…Tu l’as réellement retrouvé ou est-ce une de tes ruses à la gomme? Fit-il entre ses dents.

Les yeux de John se mirent à briller d’un éclat peu reluisant.

- Je l’avais retrouvé, mais il…m’a faussé compagnie, avoua le Capitaine de pacotille. Bon, assez discuté. Le fluide !

Jack baissa les armes. Après tout, ce fluide n’avait aucune valeur, ni médicinale ni même marchande. Et l’usage qu’en ferait ce tordu importait peu.

- Très bien. Suis-moi. Mais passe devant moi, je veux t’avoir à l’œil.

John obtempéra, ravi.

- Ne me reluque pas le derrière, Jack. J’ai la décence de porter des blazers qui mettent mes formes en valeur mais ce n’est pas pour toi. Toi et ton fichu sac de couchage que tu appelles manteau!

- Pas d’inquiétude, John. Cela fait très longtemps que j’ai changé de menu : je suis passé de la soupe au caviar.

Aucune comparaison.

Offusqué, John se retourna et Jack, dans son élan, faillit lui rentrer dedans.

- C’est ton maigrichon tout rose et tout raide que tu appelles du caviar? S’énerva John, presque incrédule.

Jack ne répondit pas. L’indifférence, une autre de ses armes favorites. dans un grognement incompréhensible, John fit demi tour et trébucha sur une dalle mal calée au sol, près de la tour d’eau. Il tomba la tête en avant, se retenant in extremis, sous les yeux étincelants du Capitaine.


chrismaz66  (16.05.2010 à 13:43)

CHAPITRE THREE

Jack se tapa les cuisses, hilare, tandis que John se relevait avec l’agilité d’un félin.

- Je parie que ces dalles ne sont là que pour culbuter de beaux morceaux comme moi ! Mais je ne suis pas intéressé, Jack.

Il sortit un couteau minuscule dont la fine lame brilla de mille confettis multicolores. Jack le détailla d’un air malicieux.

- Tu as toujours été incapable de jouer avec de gros calibres, hein? Ta place est chez les Lilliputiens, tout est petit chez toi…

- Ahaha, ricana John, à peine vexé. Alors que ton cerveau ne passe plus les portes. Ta place à toi est chez les Gawfies.

- Les quoi?

- Les Gawfies. Sérieux Jack, arrête la masturbation. Tu es sourd comme un pot et ce n’est pas bon pour assurer tes arrières.

Jack, canaille, passa devant lui et son ridicule opinel, sans un regard ni pour l’un ni pour l’autre, et continua de marcher.

- J’ai de bons éléments qui se font une joie d’assurer mes arrières. Je ne risque rien si ce n’est d’être constamment protégé avec bienveillance et plaisir.

Les marmonnements qu’il entendit dans son dos le comblèrent de satisfaction. Et c’est d’un pas rapide qu’il entra dans la salle des coffres, dont il interdit l’accès au Capitaine Hart.

- Tu restes ici. Je te ramène ton…sperme.

John acquiesça. Jack revint avec une fiole grise en fer forgé, du plus bel effet, et la garda dans sa main. Un éclair de dédain traversa son regard bleu.

- Si ce n’est pas malheureux. Un si bel ouvrage pour un contenu si …commun de vulgarité.

Sans se troubler, John tendit la main.

- Donne-moi cette bouteille ! Fit-il d’un ton sec.

- Ce n’est pas une bouteille , triple crétin ! C’est une fiole faite à la main, dont les nervures sont soigneusement recouvertes de fil d’or. Tu réalises ou pas? C’est une œuvre d’art !

- Comme ce qu’il y a à l’intérieur. Donne !

Jack dissimula la fiole dans son dos.

- Dis-moi ce que contient cette fiole et qui sont les Gawfies !

John soupira, plus qu‘agacé. Il leva les yeux au ciel, et répéta d’une voix sèche.

- C’est du sperme alien qui appartient au peuple des Gawfies, un peuple qui habite sur Zimbra. Une planète que je viens de visiter avec beaucoup d’intérêt et que je vais revisiter, par intérêt, dès que tu m’auras rendu cette maudite boîte de conserve!

Jack le jaugea, sceptique. Mais John semblait dire la vérité, pour une fois.

- Tu veux t’en servir comme monnaie d’échange, j’imagine? Tu ferais commerce de ta propre famille si tu en avais une.

- Je suis mandaté pour récupérer ce machin sinon je serais retenu prisonnier par cette bande de tordus. Donne !

- Je ne te crois pas!

- Qu’est-ce que tu veux entendre bordel? C’est la vérité!

- Comment ce truc a-t-il atterri ici?

Jack ne se lassait pas de voir le Capitaine Hart fulminer de colère.

- Je leur demanderai dès que tu m’auras rendu cette bouteille!

Jack recula et lui tourna le dos. Il ouvrit la fiole et plongea son nez dessus. Aucune odeur.

- C’est impossible. Ceci n’est pas ce que tu dis que c’est , dit-il en lui faisant face, tu ne l’auras pas tant que je ne saurais pas ce qu’il y a dedans.

John Hart hésita. Son cerveau de malade tournait à plein régime, se dit Jack. Il le vit changer plusieurs fois d’expression, passant du mercenaire prêt à tout au rival vaincu. Mais Jack n’arrivait jamais à usurper les pensées exactes de son ancien compagnon. John s’avança doucement vers lui, les bras ballants, et leva les yeux vers le Capitaine qui le dépassait d’une tête. Il rangea discrètement son petit couteau dans une poche de son blazer.

- Ok, Jack. Mes intentions ne sont pas très louables, murmura-t-il, d’une voix suave. Mais les bénéfices sont conséquents. Tu auras ta part si tu te montres…arrangeant avec ton vieil ami. Et je ne te parle pas d’être loyal envers moi, non. Tu es devenu si pitoyablement loyal depuis que tu vis sur cette planète idiote.

John s’approcha encore et le dévisagea, admiratif.

- Non, je pensais plutôt à t’autoriser quelques regards sur mes formes parfaites et plus si affinités. Car j’avoue que malgré ton grand âge, tu as encore de beaux restes.

Les yeux dans les yeux, Jack et John se toisèrent un moment. Jack réfléchissait vite mais un soupçon de désir monta en lui, dans le creux de ses reins. Ses rapports avec John avaient toujours été électriques. Avec Alec, c’était une affaire de chimie organique. Quant à Ianto - entre lui et le jeune homme- Jack pencherait plus pour une réaction épidermique et délicieuse. La lueur lubrique qu’il crut voir dans les yeux mi-clos de John l’arracha à ses réflexions. Jack reprendrait ses assertions légères et adjoindrait le meilleur qualificatif à chacune de ses aventures intimes un peu plus tard.

Il accueillit sans résister les lèvres de John sur les siennes. Un baiser fougueux et bestial, à l’image de leur idylle passée. La fièvre de John était contagieuse et Jack se laissa contaminer. Il plongea la fiole dans la poche de son manteau dont il se débarrassa prestement pour se jeter sur le Capitaine en rut. Il savait que cet excès de sensualité avait pour but de le distraire. À la première occasion, John se précipiterait sur le manteau pour récupérer sa fiole de malheur. Ainsi posé au sol, le manteau serait une cible moins facile et Jack aurait tout le temps de faire main basse sur son bien avant l’autre. Cependant à sa grande surprise, John semblait ravi de voir son désir partagé. Il sourit en se pinçant la lèvre quand Jack libéra sa bouche pour reprendre son souffle.

- Tu n’as rien perdu de tes qualités d’amant, Jack, dit-il entre deux respirations saccadées.

- Ta façon d’embrasser a mieux vieilli que ton visage, le taquina Jack, revêche.

Les deux Capitaines autoproclamés, visiblement en totale osmose, se décidèrent en même temps. Ils se ruèrent l’un vers l’autre et Jack l’immobilisa contre le mur. John souriait mais l’interrogea du regard, vaguement inquiet. Jack lui arracha un baiser torride de tous les diables. John, qui détestait les préliminaires, palpait déjà son entrejambe et répondit à son baiser. Les deux Capitaines se tripotaient la même zone sensible et des spasmes de plaisir les submergèrent de plein fouet. Ils conclurent rapidement et efficacement leur échange animal. Sous le coup de l’émotion et de la décharge électrique de l’extase, John sentit ses jambes se dérober sous lui et commença à glisser le long du mur. Jack le saisit par les épaules et le remonta d’un coup sec. L’effet était manifeste. Le visage de John était détendu et légèrement empourpré.

- Alors, où en étions-nous? Demanda Jack, pas tout à fait remis de ses émotions, mais n’en laissant rien paraître.

John reprenait doucement sa respiration.

- La fiole !

- Tu vois quand tu veux, tu sais appeler les choses par leur nom.

- Ma proposition de partager les gains tient toujours. Comme celle de te casser les deux bras, d’ailleurs.

- Ce serait un gâchis. Tu as vu ce que je peux faire avec mes mains.

Le regard soudain sombre, John s’avança et posa une main ferme sur l’entrejambe de Jack, qui recula.

- Qu’est-ce que tu fais? Tu n’en as pas eu assez?

- Tu as un slip en béton ou bien tu n’as pas jouï ?

Jack s’humecta les lèvres très lentement, en souriant.

- Devines ?

John n’était pas aussi perspicace. Jack avait pris son pied mais John avait raison d’en douter. Il avait la bonne idée de toujours porter des sous-vêtements triple coton, très absorbants. De la même matière que ses pantalons, robustes et résistants à toutes les cascades et autres indélicatesses. Le visage défait de John était un pur ravissement. Mais l’escroc était du genre vif et alerte. Et nombriliste. Il n’avait que faire des frustrations sexuelles de Jack, lui avait goûté au plaisir fugace. Le reste n’avait pas la moindre importance.

- La fiole ! Dit-il pour la centième fois.

- Qui sont ces Gawfies?

Jack ramassa son manteau et l’enfila, une main contre la poche pour s’assurer que la fiole n’avait pas disparu par enchantement.

- Tu m’exaspères, Harkness!

- Et qu’ai-je à voir avec ces créatures? Tu dis que je pourrais appartenir à leur peuple. Pourquoi?

- Parce qu’ils ne pensent qu’à baiser. Ils se considèrent comme les meilleurs amants de l’univers. C’est aussi ce que tu penses être, non?

Jack rit franchement.

- Je ne suis pas le seul à le penser…

- J’en ai ma claque de tes fantasmes, Harkness, s’énerva John en dégainant un pistolet d’un beau calibre - cette fois-ci- qu’il cachait coincé dans sa ceinture, dans le dos.

Jack regretta d’avoir joué avec les nerfs et la patience de son ancien amant aussi longtemps.

- Donne-moi la fiole où je fais exploser ta jolie tête en ectoplasme !

Jack plongea la main dans sa poche, tout doucement.

- Même si je te la donne tu ne pourras pas aller bien loin. Le Hub est verrouillé, mentit le Capitaine en sortant le flacon.

John dodelina de la tête. Jack sentit la balle lui transpercer le crâne. Puis plus rien.


chrismaz66  (20.05.2010 à 10:38)

- Jack? Jack? Debout !

La voix éraillée d’Owen réveilla le Capitaine, allongé sur la table d’autopsie.

- Tu fichais quoi par terre, étendu comme un tapis? Lui demanda le médecin dès qu’il vit Jack ouvrir les yeux.

- Quoi? Fit Jack, déboussolé.

Il se redressa et s’assit sur la table. Il n’avait plus son manteau. Owen lui brandit sous le nez des fragments de tôle grise.

- Regarde ta fiole. Feue la fiole ! Tu l’as cassée. On l’a retrouvée sous tes grosses fesses !

- Quoi? Tu plaisantes, Owen, dis-moi que tu plaisantes!

Owen ne plaisantait pas.

- Une chance que ce machin soit dense et gélatineux. Beurk ! S’exclama Owen en réalisant qu’il avait dû toucher du sperme. Elle glisse comme de l’huile, imperméable, non abrasive et biomorphique.

- Bio quoi?

- Biomorphique. Elle reprend sa forme initiale, quel que soit le nombre de manipulations exercées sur elle. Ton inculture me chagrine, Jack.

- Tu l’as mise où? S’inquiéta Jack en remettant son manteau.

Owen alla chercher un flacon en fer inoxydable et le tendit à son patron.

- Là-dedans. Ni vu ni connu!

Jack s’empara du flacon, le mit dans la poche et se dirigea vers l’escalier. Owen le rattrapa par le bras.

- Hey, où tu vas comme ça? T’as une minute?

- Oui, Owen. Un problème?

Le jeune homme hésita.

- Tu as l’air bizarre ces jours-ci, lui dit-il d’une voix trop douce. Tu as des soucis? On peut en parler si tu veux?

Jack secoua la tête et voulut lui dire que tout allait bien mais Owen posa une main sur sa joue.

- Je suis votre médecin. Tout ce que tu me diras restera entre nous.

Owen se mit sur la pointe des pieds pour atteindre les lèvres de Jack. Ce dernier, interloqué, le repoussa gentiment.

- Tu as manipulé cette chose pendant combien de temps?

Surpris, Owen ne répondit pas. Ses yeux scintillaient d’un désir urgent.

- Oh mon dieu! Je vais me réveiller ! Je vais me réveiller !! Souffla Jack en reculant vers l’escalier, qu’il ne vit pas à temps. Il trébucha et tomba à la renverse, son séant heurtant douloureusement une marche. Owen se jeta sur lui, la bouche salivante, les yeux brouillés.

- Jack, j’ai envie de toi, tout de suite!

Le Capitaine détourna son visage et les lèvres baveuses du médecin vinrent se coller contre son oreille.

- Pfiou, on peut dire que tu m’as presque tapé dans l’œil, Owen!

Jack se releva, après s’être dégagé des bras du jeune médecin. Il courut jusqu’en haut de l’escalier et pointa un doigt autoritaire vers son Docteur Folamour.

- Owen, tu ne bouges pas d’ici. C’est un ordre. Si tu approches qui que ce soit, tu es viré, c’est clair?

Il sortit du labo et appela Ianto, Tosh, Gwen, le Grand Manitou, via son intercom. Les prévenant tous de ne pas approcher le médecin tant qu’il ne serait pas calmé. Il leur expliqua la situation délicate dans laquelle le sperme alien avait plongé son subordonné, d’habitude beaucoup plus réfractaire à toute idée d’intimité avec son chef de Capitaine.

- Qu’est-ce que tu dis, Jack? Tu as bu?

Gwen semblait tomber des nues. Ou était-ce Jack qui délirait?

- Le sperme n’a rien de toxique, lui affirma Tosh.

- Qu’est-ce qu’il a essayé de te faire? Se renseigna Ianto qui, lui, avait bien compris. Ianto comprenait toujours tout à tout.

- Rejoignez-moi sur les docks dans 5 minutes. Tosh, tu vas reprendre ton analyse depuis le début. Gwen cherche des menottes, il nous faut neutraliser Owen le temps de trouver ce qui cloche. Ianto, j’ai besoin d’un bon nettoyage à sec, illico!

Jack était déjà sur les quais quand il mit fin à la communication de groupe. Il lorgnait sans cesse sur la porte d’entrée de l’office du tourisme, inquiet de voir Owen débouler hors du Hub, la faim au ventre. Il sortit le flacon de sa poche et l’examina dans tous les sens, sans l’ouvrir. Que pouvait-il y avoir de si aphrodisiaque dans cette gelée? Jack et Owen étaient les seuls à l’avoir manipulée. Cela aurait pu être pire. Un doute l’assaillit. Avaient-ils vraiment été les seuls à l’avoir touchée? Durant son retour à la vie, après que John l’ait tué, quelqu’un d’autre en dehors du médecin aurait pu la toucher. Il n’avait pas pensé à le leur demander ! Et pourquoi John n’avait-il pas repris ce qui selon lui lui appartenait. C’était pour ça qu’il était revenu. La raison de son meurtre impuni. Alors quoi?

Jack sentit ses membres s’engourdir subitement. Il rangea le flacon dans la poche, et sa vue commença à se brouiller. Ils entendit des pas au loin, beaucoup de pas. Des pas rapides. Puis plus rien.

 


chrismaz66  (20.05.2010 à 10:39)

Jack se réveilla, de nouveau allongé, sur son propre lit. Nu et recouvert d’un drap au toucher de velours remonté jusque sur sa poitrine. Il le rabattit sur ses hanches et tâtonna l’oreiller d’à côté. Vide. Il était en nage et respirait difficilement. Encore un de ces rêves à vous couper le souffle, pensa-t-il, dérouté. Il se souvint de la fiole, de John qui n’avait pas hésiter à lui tirer une balle dans la tête, et qui était reparti bredouille. Puis la perdition d’Owen qui avait tenté de l’embrasser. Quel rêve déjanté !

Il revêtit son pantalon aux bretelles tombantes et sortit de son antre, le cheveu hérissé et le torse nu. Le bruit de vaisselle et l’odeur familière du café le conduisirent vers Ianto.

- Déjà là?

Il regarda sa montre. Ianto, surpris, lui jeta un regard distrait et remplit une tasse qu’il vint lui offrir. Le jeune homme était comme à son habitude. Propre sur lui, frais comme un gardon et terriblement sexy dans son complet noir et sa chemise fuschia. Jack adorait cette chemise, elle lui donnait une aura fortement sexuelle.

- Merci, Ianto.

Jack prit la tasse des deux mains et huma le parfum charnel du café.

- Tu as une mine à faire peur, lui dit Ianto en s’approchant. Et tu transpires comme un cheval.

- Ce n’est pas la seule particularité que je partage avec le cheval, tu sais, répondit-il avec son sourire canaille.

Il but une gorgée du nectar, sous les yeux débordants de son amant. Soudain, Jack fut saisi d’un doute, encore un. É tait-il en train de rêver ou est-ce que ce spectacle adorable devant lui était bien réel. Il reposa la tasse.

- Ianto. Dis-moi quelque chose que tu ne m’as jamais dit.

- Comme quoi? Demanda Ianto, perplexe.

- Comment le saurais-je? Puisque c’est une chose que tu ne m’aurais jamais dite?

- Tu es vraiment bizarre Jack, depuis quelques jours…

- Je le sais déjà ça. Dis-moi quelque chose de personnel sur toi, ou sur moi…

Ianto se passa la main dans les cheveux, l’œil hagard.

- Drôle de demande…Je ne sais pas quoi te dire. Qu’est-ce qui te prend?

Jack soupira. Il enroula ses bras autour du cou de Ianto, se perdant dans ses yeux, respirant ses lèvres.

- Je veux être sûr que je ne suis pas en train de rêver.

- Tu ne rêves pas. Je suis bien là.

- C’est pas une preuve. John, Alec, Owen, eux aussi étaient tous bien là! S’emporta le Capitaine.

- Tu as rêvé d’eux?

- Je n’en sais rien. Je suis perdu, Ianto.

Le ton cassé de sa voix troubla le jeune homme. Il était tout aussi perdu que lui quand Jack le regardait ainsi, avec amour et détresse. Ianto le consola d’un baiser doux et gourmand.

- Laisse-toi aller, Jack. Je vais m’occuper de toi, lui susurra-t-il en parcourant de ses mains nomades le dos en sueur de son héros misérable. J’ai envie de toi, Jack.

- Quoi? Non, ce n’est pas vrai? Ç a recommence! Pesta Jack en reculant brutalement. Ses yeux étaient remplis de questions. Sa bouche crispée d’incrédulité. Son souffle coupé.

Ianto le fixa, sonné.

- Mais qu’est-ce qui t’arrive, Jack?

- Je n’en sais rien! S’écria le Capitaine. Je fais des rêves tellement réels que je ne sais plus où ils s’arrêtent. Je suis certain de rêver encore. Tu n’es pas là, je suis en train de rêver de toi! Et la fiole de sperme alien, elle existe ou est-ce un autre délire de mon imagination?

Jack criait son désarroi. Ianto en avait presque les larmes aux yeux. Il avait rarement vu son Jack si impuissant, si fragile.

- Calme-toi, Jack. S’empressa-t-il de dire. La fiole existe, tu n’as pas rêvé. Je te le jure.

- Et je l’ai cassée? C’est bien ça?

- Mais non. Quand l’aurais-tu cassée?

- John m’a tué pour la récupérer. Je l’ai brisée en tombant dessus, hier? Ou je ne sais plus quand exactement…

Les yeux vides, Jack ressemblait à un spectre venu de nulle part. Son corps entier tremblait, des perles de sueur ruisselaient sur son torse.

Ianto prit sa main, avec douceur.

- Viens. Je vais te montrer la fiole.

Il l’emmena à la salle des coffres, et, ne le quittant pas des yeux, pianota la combinaison de sécurité et s’empara de la fiole. Jack la lui vola des mains et la fixa, hébété. Elle était magnifique, les sculptures dorées sur les contours brillaient de leur plus bel éclat. C’était la fiole originale. Pas celle plus rustique dans laquelle Owen l’avait récupérée, pour remplacer la fiole brisée. Alors Owen n’avait rien tenté de déplacé à son encontre? Il n’avait pas eu envie de le violer? Cette déduction lui arracha un soupir de soulagement. Mais il n’était pas à l’abri d’un nouveau déraillement onirique. Comment en être sûr?

Si son raisonnement était juste, aucun de ses anciens amants, encore moins son médecin venimeux, n’avaient existé en dehors de ses rêves. Alors pourquoi Ianto avait-il soudain envie de lui? Il avait prononcé cette dernière phrase à haute voix, sans même s’en rendre compte. Il vit Ianto s’avancer.

- J’ai toujours envie de toi, Jack. Je pensais la chose avérée, depuis le temps.

- Pourquoi maintenant? Pourquoi là tout de suite? Bégaya Jack, qui tenait toujours la fiole dans les mains.

- Parce que maintenant fait partie de toujours, et tout de suite est inclus dans maintenant. Jack? Tu me fais peur !

- Je me fais peur aussi, Ianto.

- Hier, j’ai regardé un film chez moi. « Charade », tu connais? Avec Cary Grant et Audrey Hepburn. Un film rétro délicieux et drôle. L’héroï ne s’interroge tout le temps sur l’identité du héros, le beau Cary, ils jouent au chat et à la souris et c’est captivant jusqu’au dénouement inattendu…

- Pourquoi me racontes-tu ce film? Oui je le connais, j’ai beaucoup aimé quand je l’ai vu à l’époque.

- C’est une chose que je ne t’ai jamais dite. Puisque je ne t’en parle que maintenant.

Jack secoua la tête, insatisfait.

-Ce n’est pas une preuve. Ce n’est pas une preuve, répéta-t-il, cherchant une réponse sur la fiole.

- Alors c’est à toi de me dire quelque chose.

- Quoi?

La voix brisée de son Capitaine anima Ianto d’un désir confiant. Il trouva le moment idéal pour revendiquer ses attentes les plus folles.

- Dis-moi quelque chose que tu ne me dis jamais.

Ses yeux, pétillants, parlaient pour lui. Jack garda la fiole dans sa main et serra Ianto fort dans ses grands bras frissonnants.

 

(héhé j'arrête là pour aujourd'hui car la suite est CAPITALE  !!! A moins que quelqu'un ne me supplie à genoux de poster la fin de ce chapitre spécial ^^^)


chrismaz66  (20.05.2010 à 10:43)

Attention passage hot:

- Je t’aime, Ianto. Je t’aime.

Ianto ne vit pas les larmes de Jack mais son flair était à l’affût. Jack était sincère et il lui disait qu’il l’aimait. Le jeune homme dévasté par la déclaration, crut rêver lui aussi. Ils étaient dans de beaux draps tous les deux!

Jack recula pour le regarder de ses yeux rougis et humides.

- Je t’aime. Je t’aime. Je t’aime. Je t’aime.

Si peu lui coûtait de dire et répéter ces mots si longtemps bannis de sa vie, c’est que Jack…était en train de rêver ! Ces mots sonnaient pourtant si juste. Ils les couvait depuis si longtemps et Ianto était bien le seul à présent à les exiger, à les mériter. Au premier de leurs regards, Jack avait compris que ce jeune homme admirable, si bien bâti, si droit était celui qu’il avait attendu si longtemps. Le seul qui puisse rendre à l’amour ses lettres de noblesse. Sa suprématie millénaire. Son éclat unique et aveuglant.

- Encore.

Ianto demandait un rappel. Juste pour être sûr.

- Je t’aime, Ianto.

Jack s’exprimait sans effort, et cela l’effraya. Il s’était juré de ne jamais prononcer cette phrase magique, et voilà qu’il lui livrait en quantité industrielle ! Rien ne saurait distinguer le rêve de la réalité. C’était une impasse mentale qui s’imposait à lui, au moindre recoin de ses pensées. Qui lui faisait perdre la raison, à petit feu.

Fatigué, Jack rebroussa chemin, la fiole dans la main. Il sortit de la salle des coffres, certain que Ianto ne le rejoindrait pas. Car ce n’était qu’un rêve et Jack attendait le énième tourbillon qui le replongerait dans le noir le plus total.

Il avait regagné son bureau d’un pas lourd, remarquant à peine la présence de ses sbires à leur poste de travail respectif. Sans réaliser non plus qu’il venait de déambuler torse nu devant eux. Il s’habilla rapidement et pensa soudain à Owen. Jack ne le voyait pas vu mais il avait clairement entendu son rire strident depuis le labo. Il se précipita dans la salle d‘autopsie.

Owen accrochait un nouveau badge à sa blouse, le douzième ou le treizième, et racontait comment il avait « levé » une poulette aux formes plantureuses et aux manières peu farouches la veille au soir, ce qui expliquait sa bonne humeur matinale.

- Elle n’a pas arrêté de crier « Ro-wen!!!! », une vraie tigresse et…

Le médecin cessa de fanfaronner dès qu’il aperçut son chef en haut de l’escalier. Jack avait les bras croisés sur sa poitrine et un pied posé sur le barreau vertical de la rambarde. Owen lui décocha un sourire de connivence assorti d’un clin d’œil. Que voulait-il dire par ces gestes? Faisait-il un pied de nez à son supérieur? É tait-ce sa façon de conclure son récit coquin? Ou était-il vraiment et simplement de bonne composition ce matin?

Jack descendit l’escalier et s’approcha d’Owen qui étalait sur la table des fragments de fer gris !!!! Le Capitaine sentit son cœur s’ouvrir. Rien ne sortit de sa bouche. Il ne trouva plus un seul brin d’air pour oxygéner ses poumons comprimés.

- C’est pas la grande forme on dirait, Jack! Toi aussi tu as fait don de ton corps à …une certaine science?

Owen fouilla le Hub du regard à la recherche du pseudo scientifique en question, Ianto, qui leva les yeux au ciel. Mais Jack, dont le cœur se refermait doucement, retrouva un semblant de dignité et posa négligemment une main sur l’épaule du jeune médecin.

- Tu devrais aller plus souvent au zoo, Owen. Les tigresses ont un effet positivement salutaire sur toi.

Owen lui offrit son sourire fétiche, celui des jours moins pires que les autres, et Jack fut rassuré. Il connaissait cet Owen-la, et il ne ressemblait en rien au fauve lubrique qui avait eu envie de voir ce que Ianto pouvait trouver de si irrésistible à fricoter avec un étalon de son gabarit.

Soulagé, Jack se mit au travail. Il examina encore la fiole dorée sans l’ouvrir, puis il appela Ianto.

- Est-ce que tu l’as ouverte ne serait-ce qu’un dixième de seconde? Lui demanda-t-il lorsque ce dernier entra dans le bureau.

- Non, Jack. Pourquoi?

- Pour rien. Remets-la dans le coffre, s’il te plait, dit-il en lui tendant la fiole.

Ianto s’avança et la prit dans ses mains, les yeux toujours rivés sur son patron.

- Quoi?

- Tu n’as pas oublié ce que tu m’as dit?

Jack n’avait pas oublié.

- Alors tu peux me le redire?

Ianto ne perdait pas le nord, lui au moins. Jack lui sourit généreusement et se leva pour l’emprisonner à nouveau dans ses bras. C’était drôle cette manie qu’il avait de vouloir à tout prix le serrer fort pour lui dire des mots doux. Et ces mots dépassaient en douceur et en délice tous les mots du monde.

- Oui, je peux te le redire, fit Jack en l’embrassant sur la joue. Quoi?

- Redis-le.

Jack rit.

- En échange d’une faveur.

- Laquelle? Demanda Ianto, prêt à tout entendre.

- Qu’on fasse l’amour ici, maintenant.

Le jeune homme ne résistait pas à Jack. Et oui, il perdait aussi le nord dans les bras de son amant. Il dénoua sa cravate et enleva sa veste. Il déboutonna avec soin sa chemise, et s’occupa de celle de Jack.

- Alors?

- Quoi? Fit en écho Jack qui se débarrassa de son tee-shirt.

- Tu le fais exprès? Dis-le.

- Tu n’es pas sérieux? Ils vont nous voir, le sermonna Jack, rieur.

- Peu me chaut.

- Tu parles comme Al…

Jack déglutit péniblement. Le collet se resserrait sur lui. Au diable, la bienséance.

- Je t’aime, Ianto. Je t’aime. Je t’aime. Je t’aime…Je…

Jack ponctuait chacune de ses déclarations par un baiser, sur ses épaules, sur son torse, sur son ventre. Sur sa ceinture. Tiens, à dégager, le lien de cuir.

- Je t’aime….Je t’aime….Je t’aime…

Un baiser sur ses hanches, à droite, à gauche, puis au milieu. Les mains du jeune amant plantées dans ses cheveux ébouriffés. Des gémissements qui encourageaient sa ferveur experte. Des soupirs qui magnifiaient son propre désir impétueux. Jack bascula Ianto contre le bureau et s’emprisonna entre les jambes du jeune homme qu’il fit remonter sur sa taille. Il coucha Ianto sur le bureau, après avoir fait place nette en renversant tout ce qui s’y trouvait. Puis sans cesser de le lécher, de couvrir son torse de baisers ardents, il le prépara doucement mais fermement à l’union de leurs deux corps. Il n’avait rien sous la main qui puisse adoucir son intrusion imminente mais qu’importe. L’amour n’est-il pas le plus efficace des lubrifiants? D’un geste brutal, il posséda le corps vibrant de Ianto qui cria de douleur? De plaisir? Accélérant le rythme de ses coups de reins, il se pencha petit à petit vers le jeune homme pour l’embrasser amoureusement et reprendre la litanie savoureuse.

- Je t’aime, Ianto. Je t’aime. JE T’AIME ! JE T’AIME !!!! JE T‘AI…ahhhhhhhhh !!!!

La tête de Ianto heurta le bord du bureau. Jack n’eut pas le temps de savourer son orgasme. Il lâcha les jambes et prit le visage de son amant dans ses mains.

- Ianto? IANTO ????

Ianto balança la tête faiblement, un sourire béat aux lèvres. Jack souffla dans son cou, soulagé.

- Tu n’as pas eu mal?

- Quand?

Jack rit bruyamment. Il souleva d’un geste puissant le corps de chiffon de Ianto et le serra contre sa peau nue et moite.

- Tu penses encore que c’est un rêve? Dit Ianto dans un filet de voix.

Jack pesa le pour et le contre, et reléguant le souvenir du corps d’Alec dans un coin de son âme, constata, apaisé.

- Non, je ne rêve pas. Ianto. Et je t’aime.

- Moi aussi, je t’aime, Jack.

Les deux amants, les deux amoureux, perdus dans leur tourbillon des sens, furent surpris par des cognements répétés contre la porte du bureau. En se rhabillant en vitesse, Jack distingua des ombres derrière la baie vitrée. Leurs cris avaient dû faire trembler les murs aussi fort que leurs corps.

- Vite, Ianto!

Le jeune homme fut entièrement revêtu bien avant que Jack n’ait eu le temps de remettre sa chemise. Il alla ouvrir aux curieux, les trois petits cochons, un rictus aux lèvres. Jack s’installa à son bureau, en tee-shirt, et ne daigna pas s’expliquer sur le comment du pourquoi. Son bureau était vide. Peu pratique pour travailler. Mais Jack se balançait sur sa chaise, l’air radieux. Innocent comme le nouveau-né. Tout gisait au sol mais son contentement atteignait des sommets. Il flottait sur un nuage de sérénité, de tendresse, de réel bonheur. Il se fichait bien de savoir si les autres avaient assisté au spectacle de visu ou s’ils s’étaient limités au fond sonore. Ils étaient tous et toutes des partenaires sexuels aguerris, du moins ils en côtoyaient certains dans leur entourage proche. Tous savaient que Ianto l’aimait et qu’il aimait Ianto. Affaire classée.

Jack commença à ramasser ses outils de bureau qui venaient de flirter avec le sol, et ne remarqua pas Ianto qui refermait la porte derrière lui. Il tenait la fiole dans sa main, Ianto l’avait laissé tomber. Jack réalisa avec angoisse que son couvercle avait disparu. Il inséra un doigt dans l’étroit goulot et en extirpa une substance verte et visqueuse.

La réalité le rattrapa. Ou le rêve, comment savoir?

¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤


chrismaz66  (20.05.2010 à 20:12)

CHAPITRE FOUR

Jack se précipita sur le sol à la recherche désespérée du couvercle qu’il finit par retrouver. Il mit la fiole dans sa poche et enfila sa chemise puis son manteau d’un geste fébrile. L’esprit cisaillé par l’angoisse, il sortit à toutes bringues du bureau en appelant Ianto. Mais le marasme mental recommença. Personne. Plus personne à l’horizon. Le Hub était plongé dans le noir. Quelques faibles néons et les veilles des machines tentaient vainement de rivaliser avec la pénombre quasi absolue. Aussi impénétrable que ses pensées anarchiques. Cette fois-ci, cependant, Jack resta maître de ses sens car il était clair que le rêve avait remplacé la douce réalité de son amour offert et accueilli avec grâce. Il avait un coup d’avance sur son adversaire invisible. Il progresserait ainsi en toute confiance, sachant que rien de ce qu’il allait vivre ne serait réel.

Et c’est là que la déception succéda à l‘appréhension. Une désillusion inattendue, sadique. Il s’habitua peu à peu à l’obscurité. Jack n’alluma aucune lumière. Quelle différence cela ferait-il? Voir ou ne pas voir le démon qui le bravait sans relâche depuis quelques temps? Cela ne changerait rien à son impuissance, puisque tout se déroulait dans sa tête. Au bout de quelques secondes qui lui parurent une éternité, ce qu’il prit pour une ombre projetée par les néons sur un coin du mur menant à la morgue, se précisa devant ses yeux plissés. La silhouette d’un homme se fit plus nette et cet homme venait vers lui. Il le reconnut vite. Jamais il ne pourrait oublier cette ligne d’épaules carrée, ce maintien impeccable et ce …visage. Jack se maîtrisa. Il était en plein rêve fou : et délectable. Confiné dans son bel uniforme militaire, l’homme lui adressa un sourire timide, lorsqu’il ne fut qu’à quelques pas de lui.

- Capitaine Harkness?

- Capitaine Harper. Capitaine James Harper ! Lui dit l’autre en le saluant solennellement.

Jack encaissa le choc de ces retrouvailles. Nombreuses furent les nuits où il avait effectivement rêvé de cet autre lui. Incessantes les pensées attendries qui l’avaient convié pendant longtemps à se souvenir du Capitaine Jack Harkness.

L’aliénation mentale de Jack devenait plus logique. Tous ces rêves convergeaient vers un seul et même microcosme affectif : le sien. Et s’il arrêtait de mettre la fiole dans sa poche? C’est vrai qu’elle le suivait partout, et que la géniale Tosh avait peut-être mésestimé l’impact de la substance sur lui. Tosh lui avait assuré qu’il n’existait aucun danger pour les humains qui la manipuleraient mais Jack était un homme hors du commun , avec quelques particularités significatives qui échappaient totalement à la science, même immense, de l’espèce humaine. Ses fameuses phéromones affolantes réagissaient peut-être à ce sperme alien? Le forçant à vivre et revivre des fantasmes, mais aussi des moments du passé où son corps et son cœur ne faisaient plus qu’un.

Tout était lié, Jack en était persuadé. Il avançait lentement mais sûrement vers la résolution de son problème, et l’idée le calma. S’il devait en passer par là, alors autant franchir les étapes une à une, revivre le plaisir qui allait de pair avec l’ évocation imposée des amours de sa vie.

Le Capitaine Jack Harkness, le véritable soldat mort en exercice durant la Seconde Guerre Mondiale et que Jack avait rencontré en plein Blitz, cet homme séduisant, remarquable -et ambivalent- lui faisait face. Toujours souriant.

- Vous savez ce qu’on dit des personnes comme vous et moi ? Lui demanda-t-il sans bouger.

- Comme vous et moi? C’est-à-dire? Dit Jack, troublé.

- Des hommes qui aiment les hommes, comme je vous ai aimé, Jack. Vous vous souvenez?

Le Capitaine s’était rapproché en parlant, un peu nerveux. Jack matérialisait son rêve. Il en était l’unique créateur. Alors pourquoi ne lui donna-t-il pas plus d’assurance? Pourquoi ne le poussait-il pas à venir l’enlacer, l’embrasser, l’aimer?

- Oui je me souviens.

- Vous savez ce qu’on dit?

- Non, Je n’en sais rien…Jack.

- On dit que ces hommes recherchent leur propre miroir à travers leurs amants. D’un point de vue psychanalytique, tout cela se résume en un mot : narcissisme.

Jack souffla pour ne pas rire. Voilà qu’il se prenait pour Sigmund Freud (qu’il avait bien connu, soit dit en passant). Quel était le but de cette apparition? Et pourquoi, bon sang, Jack Harkness restait-il planté là comme un lampadaire qui l’éblouissait, corps et âme?

- Pure rhétorique pompeuse. Théorie fumeuse.

Jack parlait comme un robot.

- James?

Jack ne broncha pas. Il ne se sentit pas visé. Et pour cause. La poignée de mains des deux hommes le jour de leur rencontre avait fui son souvenir.

- James? Répéta Jack Harkness en s’approchant enfin de lui.

Jack réalisa que c’est sous cette identité qu’il s’était présenté à lui.

- Oui…Jack?

- Vous n’y croyez pas?

- Pas du tout.

- Je suis soulagé, soupira Jack Harkness, Mon reflet est peu avantageux. De plus, vous êtes irrésistiblement unique.

- Vous l’êtes tout autant, sinon plus. Je vous assure.

Les deux Capitaines s’enlacèrent amoureusement, et le baiser fut tendre. Sans fin. Si loin de la rigueur militaire et de son indigence affective. Jack savoura chaque seconde de cette étreinte irréelle et pourtant fusionnelle. Il n’était pas du genre bégueule. Inconstant en amour, sans doute, mais fidèle à ses coups de cœur. Ses sens ne lui firent pas faux-bond. Pour rien au monde il ne voulait renoncer à ce cliché de son âme qui le berçait dans une douce nostalgie. Il ne désirait qu’une chose à cet instant : s’accrocher à ce rêve insensé, à ces lèvres adorées. Pour toujours. Mais les meilleures choses ont une fin, et c’est douloureusement qu’il lâcha le soldat transi d’amour.

Jack recula assez loin pour s’arracher à ce mirage saisissant et envoûtant. Il savait que tout n’était qu’illusion mais le goût des lèvres du Capitaine persistait dans sa bouche. Sa présence si charnelle contre son corps le réchauffait encore jusqu’aux os. Il abaissa son regard sur les chaussures vernies du soldat.

- Vous allez disparaître à nouveau. N’est-ce pas? Alors qu’attendez-vous?

Jack parlait fort. Prêt à revivre ce déchirement, une nouvelle fois. C’était son rêve. Il invoqua sa toute puissance mentale pour abréger le supplice qu’il s’était infligé.

- Partez. Disparaissez !

Jack Harkness était encore là, face à lui, le visage triste et incrédule.

- Vous voulez que je m’en aille, Jack? Pourquoi?

- Vous n’êtes pas réel !

- Que voulez-vous dire? Je suis revenu pour vous. Je vous aime.

- Je vous aime auss…

La douleur psychique devint insoutenable. Jack ralluma les lumières du Hub pour mettre fin à cette mascarade qui ne le faisait que trop souffrir.

Un sentiment indicible mêlé de soulagement et de chagrin pulsait violement dans sa poitrine. Le Capitaine Jack Harkness avait disparu. Sans le halo éclatant de félicité qui avait précédé son départ, en 1941. Au lieu de cela, les lumières agressives du Hub intensifièrent le malaise qui s’abattit sur Jack. Allait-il encore s’évanouir pour se réveiller dans un autre rêve ou dans la réalité?


chrismaz66  (30.05.2010 à 16:30)

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