Alors que la grève des scénaristes et des acteurs ne connaît aucune accalmie, Netflix jette de l'huile sur le feu avec une offre d'emploi très controversée.
Tandis les scénaristes depuis plusieurs mois tentent de renégocier leurs contrats, notamment pour que leurs salaires soient revalorisés, le géant du streaming préfère quant à lui miser sur les intelligences artificielles, ce qui peut paraître une bonne idée, qui n'en est peut-être pas une. En effet, cela pourrait surtout signifier que la plateforme préfère miser sur les IA que sur des travailleurs en chair et en os.
Netflix recherche un poste de chef de produit d'apprentissage automatique (AI Product Manager) avec une rémunération entre 300 000 et 900 000 dollars par an. Selon la Screen Actors Guild (Sag-Aftra), 87% des acteurs de la guilde gagnent moins de 26 000 dollars par an. Bien sûr, les abonnés y trouveraient leur avantage car le poste énumère des objectifs ambitieux dans tous les domaines d'activité : "façonner le catalogue de films et d'émissions de télévision en apprenant les caractéristiques qui font le succès du contenu, optimiser la production de films et d'émissions de télévision originaux" et aussi permettre de "prendre en compte les préférences des utilisateurs de la plateforme de streaming afin de mieux les cibler ". Leur objectif :"établir les priorités en matière dinvestissement".
Ce n'est pas le seul nouveau poste d'IA recherché par Netflix. La société cherche également à embaucher un directeur technique pour l'IA générative dans son studio de jeux pour un maximum de 650 000 $ par an. L'IA générative peut produire du texte, des images et des vidéos à partir de données d'entrée, qui pourraient être utilisées pour créer du contenu original ou à des fins publicitaires. Netflix s'est déjà essayé à ce genre de pratique avec Deep Fake Love, émission de téléréalité espagnole, dans laquelle des scans des visages et des corps des candidats sont utilisés pour créer des simulations "deepfake", mais aussi pour produire des récits et des dialogues.
Mais Netflix n'est que le dessus de l'iceberg, Disney a également répertorié plusieurs postes du même genre bien qu'il n'ait pas précisé la fourchette de salaires. Le directeur général Bob Iger, qui a qualifié d'"irréalistes" les demandes des acteurs et des écrivains pour une plus grande rémunération avoue déjà l'utilisation de l'IA pour créer des gains d'efficacité et mieux servir les consommateurs. Disney a eu recours à une IA pour créer le générique de sa nouvelle série Marvel, Secret Invasion ou encore Harrison Ford a été rajeuni de 40 ans dans le dernier volet d'Indiana Jones. Récemment, un faux épisode de South Park a été entièrement réalisé à l'aide de l'IA pour montrer que cela était possible, un synopsis pour un reboot contemporain de Mad Men proposé en quelques secondes.
Au cours des dernières négociations, la Writers Guild of America (WGA), principal syndicat du secteur, a demandé un encadrement du recours à cette nouvelle technologie, mais pas son interdiction. Ils demandent principalement des garanties pour préserver leurs emplois de l'arrivée de l'intelligence artificielle. En effet, la proposition faite actuellement a de quoi inquiéter la profession : "Ils ont proposé que les figurants puissent être 'scannés', soient payés une journée, et que leur image appartienne aux sociétés de production, afin qu'elle puisse être réutilisée pour n'importe quel projet, n'importe quand, indéfiniment, sans compensation [...] Si nous ne nous levons pas maintenant nous risquons tous d'être remplacés par des machines et des grandes entreprises qui se préoccupent plus de Wall Street que de vous et de votre famille".
Alors, pour ou contre l'Intelligence Artificielle ? Les scénaristes ont-ils raisons de vouloir défendre et revaloriser leurs droits ?